Source : www.marianne.net
Sauf que voilà : les coûts se sont envolés et les PPP ont pris des allures de bombes à retardement pour les pouvoirs publics, incapables de faire face à la tendance furieusement inflationniste de ces réalisations hybrides, comme le soulignait un rapport sénatorial publié en juillet dernier. Face à l'ampleur du dérapage financier, de plus en plus d'actions juridiques sont entreprises pour sortir du bourbier et tenter de limiter la casse.
Début novembre, le tribunal administratif de Cergy-Pointoise a ainsi annulé le PPP signé entre le ministère de l'Ecologie et une filiale de Bouygues pour la construction de 63 centres d'entretien routiers (consulter la décision du tribunal en cliquant ici). En 2010, les deux parties s'étaient alliées pour bâtir ces grands hangars destinés à accueillir le personnel et le matériel nécessaires à l'exploitation et l'entretien du réseau routier national pour un montant de 355 millions d'euros. Alors que les bâtiments ne devaient revenir à l'Etat qu'en 2040, date d'échéance du contrat, le tribunal administratif a ordonné sa résiliation à compter du 1er juillet 2015.
« Rien ne justifiait le recours à un contrat de PPP pour construire ces équipements », souligne Denis Dessus, le vice-président du Conseil national de l’ordre des architectes, à l’origine de plusieurs actions en justice, dont celle-ci. De fait, le projet n’était ni complexe, ni urgent, les deux critères qui justifient la mise en place d’un PPP plutôt qu’une traditionnelle commande publique.
En revanche, la rupture entre les deux partenaires s'annonce, elle, particulièrement complexe : pour reprendre ces centres routiers déjà sortis de terre et qui, pour l’heure, appartiennent au constructeur, l’Etat se retrouve dans un imbroglio juridique et financier dans lequel il risque de devoir rembourser la part d'investissement privé. Et ce n'est peut-être que le début.
En 2014, un précédent PPP a été annulé par la justice. En janvier, la cour administrative d'appel de Lyon, saisie par l'Ordre régional des architectes d'Auvergne, a résilié le contrat relatif à la piscine de Commentry, dans l'Allier. A Bordeaux, le Syndicat national du second œuvre (SNSO) a attaqué le PPP de la cité administrative (50 millions d'euros) pour défaut de complexité – le tribunal administratif ne s'est pas encore prononcé, alors que la structure a déjà été inaugurée. « Nous demandons la résiliation de ce PPP », explique Renaud Marquié, le président du syndicat qui avait déjà engagé un recours en 2011 contre la construction d'une école en PPP à Saint-Laurent-Médoc.
A Bordeaux, toujours, le conseiller municipal socialiste Matthieu Rouveyre a saisi le Conseil d'Etat pour que soit renégocié le contrat relatif au Grand Stade. Une telle décision, l'avocat Jean-Benoît Saint-Cricq l'a obtenue en juillet 2014. Le Conseil d'Etat a jugé que la délibération autorisant le recours à un PPP pour la réalisation de Biarritz Océan (une structure qui regroupe le Musée de la mer et la Cité de l’océan) était illégale. Cet arrêt donne la possibilité à la mairie de remettre à plat le contrat signé avec Vinci pour trente ans (1,8 million d'euros de loyer annuel).
Face à toutes ces décisions, reste néanmoins une question de taille : l'Etat impécunieux sera-t-il financièrement en mesure de reprendre à sa charge tous ces PPP ?
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