Source : www.lemonde.fr
Le Monde.fr | 12.08.2014 à 07h46 • Mis à jour le 12.08.2014 à 14h00 | Par Eric Albert (Londres, correspondance)
EDF Energy, la filiale britannique de l'électricien français, a annoncé lundi 11 août la suspension soudaine de quatre réacteurs nucléaires dans le nord de l'Angleterre, représentant le quart de sa capacité de génération en Grande-Bretagne. Elle a pris cette décision inhabituelle après avoir détecté une défaillance technique dans l'une de ses chaudières.
Le problème a initialement été découvert l'an dernier dans sa centrale de Heysham, au nord-ouest de l'Angleterre. Une inspection de routine aux ultrasons a révélé un « résultat inattendu » dans l'une des huit chaudières du réacteur. Celui-ci a repris du service au début de l'année, à puissance réduite, mais EDF Energy a décidé de mener de plus amples tests. Débutés en juin, ceux-ci ont « confirmé la présence d'un défaut ».
MESURE DE PRÉCAUTION
L'entreprise n'a détecté aucun problème similaire sur ses autres centrales, mais l'anomalie est suffisamment inquiétante pour qu'elle choisisse de mettre à l'arrêt les quatre réacteurs qui sont du même design, deux à Heysham et deux à Hartlepool (nord-est de l'Angleterre). La suspension est prévue pour une période estimée à huit semaines, le temps d'approfondir l'enquête.
Le défaut concerne le support central de la chaudière (« boiler spine »). Cette pièce soutient les différents tubes qui y sont installés. EDF Energy assure que la sécurité de ses centrales n'est pas mise en cause, et que leur arrêt temporaire est une mesure de précaution.
Pour l'entreprise, cette décision va avoir d'importantes conséquences financières. Pour le deuxième semestre, elle a revu à la baisse sa production maximale d'électricité de presque 9 %, à 30,1 Térawattheures.
DÉCONVENUES EN SÉRIE POUR EDF
Ce problème vient s'ajouter à la longue liste de difficultés depuis l'acquisition en 2008 par EDF du parc nucléaire britannique, qui produit 20 % de l'électricité du pays. A l'époque, l'électricien français avait deux objectifs. Le premier était de bénéficier de terrains permettant de construire de nouvelles centrales, de type EPR (comme celle de Flamanville). Après bien des délais et une forte augmentation des coûts, un accord a été signé l'an dernier avec le gouvernement britannique et des investisseurs chinois en vue d'investir dans deux premiers réacteurs. L'entreprise est désormais en attente du feu vert de la commission européenne, qui doit décider si le soutien apportée par le gouvernement britannique dans ce projet constitue ou non une aide d'Etat.
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Le second objectif était d'améliorer l'exploitation des quinze réacteurs existants, pour la plupart vieillissants. De ce point de vue, EDF Energy a multiplié les déconvenues. Une fuite dans le circuit de refroidissement à Dungeness, et des problèmes à Heysham et Sizewell avaient fait de 2010 une année noire. Depuis, les progrès étaient enfin au rendez-vous. L'année dernière a été la meilleure depuis huit ans en terme de production.
ETENDRE LA DURÉE DE VIE DES CENTRALES
EDF travaille aussi à l'extension de la durée de vie des centrales. Actuellement, Heysham et Hartlepool, les deux suspendues ce lundi, doivent être fermées en 2019, mais EDF espère obtenir cinq années de plus. Ensuite, quatre réacteurs doivent arriver en fin d'opération en 2023, l'année où la nouvelle centrale EPR doit en principe entrer en service. Cela éviterait une chute trop brutale des revenus. Restera enfin les deux derniers réacteurs : l'un qui devrait pouvoir être étendu de dix ans, pour le mener à 2028, et l'autre prévu pour 2035.
Eric Albert (Londres, correspondance)
Journaliste au Monde
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