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14 septembre 2014 7 14 /09 /septembre /2014 16:13

 

Source : www.mediapart.fr

 

Polémique sur le témoignage posthume de l'ancien directeur de Fukushima

|  Par La rédaction de Mediapart

 

 

 

Le témoignage de l’ancien directeur de la centrale de Fukushima, Masao Yoshida, interrogé très longuement par une commission d’enquête gouvernementale en 2011, provoque une tempête médiatique au Japon.

Le témoignage de l’ancien directeur de la centrale de Fukushima, Masao Yoshida, interrogé très longuement par une commission d’enquête gouvernementale en 2011, provoque une tempête médiatique au Japon. Ce témoignage était resté confidentiel à la demande de Yoshida, qui est mort en 2013 d’un cancer de l’œsophage.

 

La Une de Asahi Shimbun du 20 mai 2014 
La Une de Asahi Shimbun du 20 mai 2014 © DR

Le gouvernement a finalement décidé, le 11 septembre, de mettre en ligne la transcription intégrale des auditions de Yoshida, après une série de fuites dans la presse. Cette publication a mis dans l’embarras l’un des deux plus grands quotidiens du pays, Asahi Shimbun, qui a reconnu avoir publié en mai dernier un faux scoop prétendument basé sur les propos de Yoshida. Le PDG du journal, Tadakazu Kimura, a fait des excuses publiques, annoncé le licenciement d’un des directeurs, Nobuyuki Sugiura, et pourrait même démissionner lui aussi.

L’article en cause, paru le 20 mai dernier, racontait que 90 % des travailleurs avaient déserté la centrale le 15 mars 2011, quatre jours après le début de l’accident, en désobéissant aux ordres de Yoshida, et s’étaient réfugiés dans la centrale voisine de Fukushima Daini, à dix kilomètres. Asahi Shimbun affirmait s’être procuré le témoignage de Yoshida, alors non public, et y avoir trouvé la preuve de la désobéissance des employés. Ce scoop a fait le tour des médias mondiaux et a choqué le public, donnant l’image d’une centrale abandonnée par ses travailleurs.

À l’époque, les concurrents de Asahi Shimbun ont reproché au journal de ternir l’image des travailleurs, et ont ensuite publié des récits divergents, eux aussi censés s’appuyer sur le témoignage de Yoshida. Cette situation a conduit le gouvernement à divulguer l’intégralité de ce témoignage. Selon le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga, cité par le New York Times, « la préoccupation initiale (de Yoshida), à savoir que son histoire soit exposée sans vérification, s’est de fait réalisée », de sorte que « nous pensons que ne pas publier son témoignage aboutirait à un résultat contraire à sa volonté ».

La transcription divulguée par le gouvernement a pris en défaut le récit de Asahi Shimbun, ce qui a conduit le journal à se rétracter. Dans une déclaration publiée le 11 septembre, le journal admet que son article est erroné et qu’il n’a pas pu démontrer que les travailleurs avaient quitté la centrale « contre les ordres » de leur directeur. Selon les explications du journal concurrent The Mainichi, Yoshida n’a pas formellement ordonné à ses employés de se rendre dans la deuxième centrale à dix kilomètres, mais a jugé après coup qu’ils avaient eu raison d’y aller. Il apparaît que Yoshida voulait que les travailleurs se replient dans un lieu relativement peu exposé aux radiations mais à proximité de la centrale, et que, dans la confusion générale, son ordre a été interprété comme celui d’aller à Fukushima Daini. En tout état de cause, le témoignage de Yoshida fait ressortir le manque de préparation à un accident grave de l’équipe de Fukushima, et de Tepco, la société exploitante de la centrale. Le repli du personnel aurait normalement dû s’effectuer selon une procédure déjà prévue, et non dans l’improvisation.

Le témoignage de Yoshida s’oppose aussi à une allégation du gouvernement de Naoto Kan, premier ministre au moment de la catastrophe, selon laquelle Tepco projetait d’abandonner totalement la centrale le 15 mars 2011. Yoshida affirme dans son témoignage qu’il n’était pas question d’évacuer l’installation, et qu’il a toujours veillé à maintenir un nombre suffisant d’agents sur place, même s’il a pu laisser partir certains personnels non indispensables.

Dans l’ensemble, Yoshida critique durement le gouvernement, à qui il reproche de n’avoir pas du tout perçu la gravité de la situation vécue par les travailleurs sur le site. Il raconte par exemple qu’il a entrepris avec son équipe une opération de ventilation pour faire baisser la pression du réacteur n°1, aux premières heures du 12 mars. Or, alors que les travailleurs s’efforçaient déjà depuis des heures d’effectuer la manœuvre dans des conditions périlleuses, Yoshida a reçu du ministère de l’industrie l’ordre de la mettre en œuvre… « Basiquement, (le gouvernement) pensait que les vannes (par lesquelles s’échappe la vapeur radioactive) s’ouvriraient au moment où le ministre l’ordonnerait », dit-il dans son témoignage. Yoshida s’est aussi vu reprocher d’avoir retardé ladite manœuvre pour permettre au premier ministre de survoler la centrale en hélicoptère. Ce qu’il conteste catégoriquement : « J’ai dit aux travailleurs d’actionner la vanne, mais ils n’ont pas pu (à cause de la difficulté de la situation). Peu m’importait que le premier ministre soit en train de voler au-dessus de la centrale, ou de faire n’importe quoi, les gens sur le site voulaient faire la manœuvre rapidement, pour la sécurité du réacteur. »

 

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

 


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