Source : www.reporterre.net
Nicolas de La Casinière (Reporterre)
mercredi 23 avril 2014
Alerte à l’expulsion de Saint Jean du Tertre ! Le message a couru sur la toile et sur le fil, hier. Dès l’aube, ce matin, une centaine de personnes étaient là - et Reporterre. Les gendarmes ne sont pas venus. Récit.
Saint-Jean-du-Tertre (Loire-Atlantique), reportage
Cinq heures du matin. Des lucioles sillonnent les chemins creux. Des lampes frontales d’opposants rejoignent la ferme menacée d’expulsion, passant les barricades d’engins agricoles, de solides barres de béton de chantiers de travaux publics, de pneus, de tracteurs. « Les traces blanches sur la route, c’est des poteaux électriques en béton, qu’on traîne avec nos tracteurs » signale un paysan. L’appel à mobilisation pour défendre la ferme s’est fait du jour au lendemain. À la demande d’AGO (Aéroport Grand Ouest, consortium dominé par Vinci), propriétaire de certains terrains dont cette ferme, le tribunal de grande instance de Nantes a ordonné mardi l’expulsion de la ferme de Saint Jean du Tertre, occupée depuis le 14 avril. À effet immédiat.
D’où des chaînes de courriels, de textos, d’alertes sur les réseaux militants, paysans, zadistes, citoyens, aux alentours, de reprises sur les médias attentifs comme Reporterre. L’alerte a été lancée avant la décision de justice prononçant l’expulsion : « Malgré les annonces du gouvernement visant à ne pas débuter les travaux avant l’épuisement des recours juridiques, la société AGO et l’État menacent de détruire une nouvelle maison ».
Thermos, raquettes et barricades
Et chacun rapplique avec ses bottes, sa loupiote, son thermos de café chaud... La rosée mouille les bas de pantalons. Des fumigènes dépassent d’un sac à dos. Les raquettes de tennis censées renvoyer les grenades lacrymogènes sont à nouveau de sortie. Certains sont venus dormir sur place. Toute la nuit, des voitures ont rameuté du monde. Les routes convergeant vers la ferme étant toutes barrées et barricadées, les derniers soutiens se garent à la ferme voisine de Bellevue, l’exploitation agricole réinvestie en janvier 2013 par le collectif paysan Copain, juste après le départ de son occupant.
Les infos s’échangent dans la nuit : personne n’a vu de convois de fourgons bleu marine de la gendarmerie. Pas non plus aperçu de camionnette EDF qui viendrait démonter le compteur. Même si une intervention des électriciens publics est bien programmée dans la commune voisine. Les éclats gyrophares sur la route près du bourg de Notre Dame ? Un gars en retard pour embaucher à cinq heures du matin et qui s’est pris le fossé jusqu’à renverser sa voiture sur le flanc. « Et il va comment ? - Un peu groggy, il répétait toujours la même chose, mais sinon avait l’air d’aller ».
Report d’expulsion
Mais question expulsion, ce ne sera pas ce matin. « L’opération qui était effectivement calée dès mardi matin, a été annulée vers 20 heures au plus haut niveau de l’État. Cinq escadrons de gendarmes mobiles ont alors été démobilisés », note Ouest-France. Les 510 militaires ne se sont donc pas venus dans le bocage. Pas cette fois en tous cas. Les abords de la ferme se découvrent au point du jour, détaillant les silhouettes de frondaisons pétillant de chants d’oiseaux du petit matin.
« On va rester là. On n’a pas d’infos sur des mouvements de gardes mobiles, mais on surveille tout le temps », explique un zadiste lors d’une prise de parole après le lever du jour. Il manque un préalable, la venue d’un huissier signifiant l’imminence de l’expulsion mais elle peut être faite en même temps, « c’est vrai qu’aujourd’hui, il n’aurait pas pu passer en voiture. Mais ce sera peut-être demain, ou après demain... » commente une zadiste. « Du coup c’est un appel permanent à soutenir la ferme, tous les jours qui viennent. Ça peut être deux heures de temps en temps, avant d’aller au boulot, une matinée tous les quinze jours, tout est bienvenu... », explique Vincent du collectif Copain.
Le préfet en croisade contre l’impunité...
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