Le Monde.fr avec AFP | 07.11.2013 à 03h41 • Mis à jour le 07.11.2013 à 08h43
Au Nigeria, des milliers de personnes ont fait du trafic de pétrole un sport quotidien. La pratique consiste à pirater des pipelines de pétrole brut afin de le raffiner ou de le revendre à l'étranger.
Crédits : REUTERS/AKINTUNDE AKINLEYE
Amnesty International accuse le pétrolier Shell de nier ses responsabilités dans les fuites de pétrole au Nigeria, rejetant la faute sur les gangs criminels, dans un rapport publié jeudi 7 novembre. "La corrosion et le manque de maintenance des infrastructures pétrolières" sont les principales sources du problème, au même titre que le sabotage criminel, selon le rapport.
Le géant pétrolier anglo-néerlandais a lui rejeté l'accusation, la considérant "sans fondement". "SPDC [Shell Petroleum Development Company] regrette que certaines ONG continuent à avoir une démarche militante au lieu de se concentrer sur des solutions sur le terrain", a estimé le porte-parole de la filiale nigériane de Shell.
Le nombre de fuites, dans la région pétrolifère du delta du Niger, dans le sud du Nigeria, premier producteur de brut africain, est "stupéfiant", a déclaré l'organisation de défense des droits de l'homme dans son rapport intitulé "Mauvaises informations : enquêtes sur les fuites de pétrole dans le delta du Niger".
DES INFORMATIONS "PAS FIABLES"
Shell, qui a le plus grand nombre d'exploitations onshore dans cette région, a annoncé 348 fuites depuis début 2012, alors que la filiale nigériane de la société italienne AGIP a rapporté plus de 1 000 fuites sur la même période. "Les déclarations de Shell sur les fuites de pétrole ne sont pas fiables", a déclaré Audrey Gaughran, responsable des questions internationales au sein de l'ONG (voir aussi ses explications sur le site d'Amnesty).
Les études cherchant à déterminer les responsabilités de ces fuites sont souvent financées et contrôlées par la compagnie pétrolière, selon Amnesty et le Centre pour l'environnement, les droits de l'homme et le développememnt, coauteur du rapport. Et l'Agence nigériane de détection et de réponse aux fuites pétrolières (NOSDRA), chargée de mener des études indépendantes, n'a ni les ressources ni l'expertise nécessaires, selon Amnesty.
Selon les spécialistes indépendants, le sabotage d'oléoducs est un des principaux facteurs de pollution dans le delta du Niger. Les voleurs de pétrole installent des robinets sur les conduits et siphonnent du brut, très lucratif au marché noir. Ce trafic représente un manque à gagner de 6 milliards de dollars annuels (4,5 milliards d'euros) au Nigeria, selon les estimations officielles.
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