«La première décision à prendre, c'est de séparer ce qui relève du crédit, du dépôt, bref du service à l'économie, de ce qui appartient aux opérations de spéculation, pour que les dépôts des épargnants ne soient pas utilisés à d'autres fins que le prêt à l'économie, précisait-il deux jours plus tard. Cette séparation sera faite. Ce sera terminé !»
Une loi sur les banques est aujourd'hui en discussion au Parlement. Hélas, tout laisse craindre une réforme au rabais, une «retouche cosmétique» qui ne réglera aucun problème.
1. L'économie réelle ne sera pas protégée d'un possible tsunami sur les marchés financiers. Faut-il rappeler que, en Grande-Bretagne, la dette du secteur financier atteint 600 % du PIB ? Faut-il rappeler que, en Chine, la dette privée a augmenté de 25 % en un an et que la bulle immobilière vient d'éclater à Pékin ? Malgré la crise en Italie, malgré Chypre, malgré tous les nuages qui s'accumulent sur l'économie mondiale, certains veulent croire que la crise est derrière nous. C'est totalement faux. Il est urgent de protéger les citoyens et l'économie réelle de la prochaine crise financière.
2. Si les banques continuent à spéculer avec nos dépôts, les PME auront toujours autant de difficultés à se financer. Alors qu'une vraie séparation obligerait les banques de dépôt à consacrer l'ensemble de leurs fonds au financement des PME et de l'artisanat.
3. L'argent des contribuables continuera à servir d'assurance tous risques pour quelques milliers de traders et de cadres dirigeants qui seront ainsi encouragés à toujours spéculer avec l'argent de leurs clients.
La loi en cours de discussion prévoit seulement de filialiser une infime partie des activités des banques. Le PDG de la Société générale a reconnu lui-même que cela concernerait moins de 1 % de l'activité de sa banque !
Hélas, une telle filialisation ne règle rien : en 2008, le numéro un mondial de l'assurance, AIG, a été coulé par une microfiliale basée à Paris et qui, malgré sa petite taille (une douzaine de salariés) et malgré les «contrôles» des autorités françaises, a accumulé suffisamment de risques pour faire chuter l'ensemble du groupe !
Pour que la chute d'AIG ne débouche pas sur une récession générale, le gouvernement américain a dû trouver en urgence 180 milliards de dollars... Les risques accumulés par 12 personnes travaillant à Paris ont coûté 130 milliards et des dizaines de milliers d'emplois perdus aux Etats-Unis !
La chute d'AIG montre que la filialisation n'est pas une solution efficace. Que se passerait-il en France si le gouvernement devait trouver en urgence 140 milliards d'euros à cause de la faillite d'une grande banque ?
La solution, c'est la séparation complète des activités de dépôt et des activités d'investissement spéculatif. C'est une des premières réformes imposées par le président Roosevelt en 1933.
C'est comme cela qu'a fonctionné le système bancaire de tous nos pays jusqu'en 1984, ce qui prouve la faisabilité et le bien-fondé de cette solution.
La garantie de l'Etat doit être réservée aux activités d'intérêt général, comme le financement de l'économie réelle avec le dépôt des épargnants. Pour toutes les autres activités, il n'y a aucune raison de donner une garantie de l'Etat.
Même le gouvernement conservateur anglais affirme aujourd'hui qu'il faut mettre en place une «paroi électrifiée» entre les banques de dépôt et les banques d'affaires ! Pourquoi la gauche française n'a-t-elle pas la même ambition ?
Pour lutter contre la spéculation qui détruit petit à petit les fondements mêmes de notre société, pour protéger les comptes bancaires des citoyens, pour protéger les finances publiques, il est urgent de remettre la finance à sa place. La loi sur les banques revient bientôt à l'Assemblée nationale.
Les lobbies vont tout faire pour qu'elle ne soit pas durcie. Un certain nombre de citoyens, d'économistes et d'associations essayent au contraire de pousser les députés à l'audace. Vu la force des lobbies, il est fondamental que nous soyons le plus nombreux possible à nous mobiliser. Ne restez pas spectateurs. Signez la pétition sur separerlesbanques.fr
La loi sur les banques va bientôt revenir devant l'Assemblée nationale. Et il est urgent de remettre la finance à sa place. Citoyens, mobilisez-vous pour qu'un peu d'audace soit insufflée aux députés !
Paru dans le n°832 du magazine Marianne, en vente du 30 mars au 5 avril 2013