Le blog des Indignés de Nimes et de la Démocratie Réelle Maintenant à Nimes
Photo : Florian El Brico
Hier encore, ils n'en doutaient plus. Comme une évidence: leur pays n'était pas conquis. Poussés par la force de leurs convictions et l'ampleur de la tâche à accomplir, rien, alors, ne semblait les perturber. Partis sur les routes de France, ces coureurs du nouveau monde se bornent à montrer que les Alternatives existent. Et qu'elles fonctionnent. Reste à convaincre la foule de s'en emparer.
En 2008, l'effervescence autour de l'écologie battait son plein. Les Poulidor du moment s'appelaient Al Gore, Brown ou encore Hulot. Ils couraient en tête quand le Grenelle a dopé les troupes. Inspirés par le tour du monde en "80 hommes" de Sylvain Darnil et Mathieu Le Roux ou le périple de la famille De Cherisez, Gilles, Hélène et Bertrand partirent à l'aventure.
Pour mon compte, je les suivais à distance. Ces étudiants voulaient établir un état des lieux d’initiatives mises en oeuvre dans l'hexagone.
"Ce sont autant de solutions pour inventer une relation plus harmonieuse avec notre environnement naturel, social, économique" expliquait Gilles.
Un petit ouvrage réunit depuis l'ensemble de ces solutions rencontrées alors. Et le jeune homme continue à promouvoir ses explorations et ses rencontres avec des hommes et des femmes de terrain (explorateurs, aventuriers, etc.) via Vive la Terre, son association.
Ceux-là furent téméraires. Partis pendant près d'un an, Alexis et Goulven utilisèrent un micro pour croquer le paysan bio français: "en termes d’agriculture et de modes de vie durables, qui fait quoi en France? Quels choix de vie cela implique-t-il? Pourquoi aboutir à de tels systèmes de production ?" se demandaient-ils.
Dénonçant un modèle agricole productiviste, leur périple les mena à la rencontre de vingt agriculteurs alternatifs branchés en mode d'agriculture bio et locale. La mise en relation de la parole d'un exploitant et de l'univers sonore quotidien dans lequel il vit apportât à leur approche une dimension fort rafraîchissante.
Philippe Green n'en était pas à son premier coup d'essai. Habitué des longs périples pour défendre ses idées, c'est avec un vieux combi Wolkswagen qu'il partit avec son équipe cet été.
Objectif: répandre les principes de l'écofrugalité, aller à la rencontre des acteurs, et jouer de la roue (de récup!) écofrugale pour tester les connaissances de ses interlocuteurs en matière d'économies générées par l'écologie.
Bilan de sa course ? Plus de 5000 kilomètres parcourus malgré quelques pannes en route, et un constat: "les Français ont envie d’agir pour la planète à condition qu’on leur apporte les preuves concrètes que c’est bon pour leur pouvoir d’achat et leur niveau de vie. Du coup j'ai décidé que mon livre, le Guide Ecofrugal, serait téléchargeable gratuitement sur internet pour le rendre accessible au plus grand nombre", déclarait le coureur sur la ligne d'arrivée.
Le jeune journaliste Emmanuel Daniel souhaitait en savoir plus sur les alternatives qui poussent en France. Sa devise, reprise d'Eluard, est la suivante: "un nouveau monde existe, il est dans celui-ci". Parti sur la route des utopies concrètes, il quitta la région parisienne vers le 20 juin 2013. Son voyage, entièrement participatif (utilisant les principes de l'économie du partage - stop, covoiturage, couchsurfing, échange du logis contre cuisine à domicile, etc.), est conçu pour aller à la rencontre de ceux qui élaborent des solutions locales, concrètes et reproductibles en réponses aux problématiques de logement, d’alimentation, de santé et d’éducation.
"Ces expériences sont autant de pistes concrètes à explorer pour relocaliser l’économie, renforcer la démocratie, préserver notre environnement et favoriser le vivre-ensemble" déclarait récemment le jeune homme sur son site. Porté par l'envie de redonner espoir et envie d’agir à ses lecteurs, il prévoyait de clôturer son périple en remontant la côte ouest de la France, pour finir en décembre 2013 par la Bretagne ("le meilleur pour la fin" dit-t-il)
Du 4 août 2013 au 16 septembre 2013, ce fut au tour du toulousain Frédéric Bosquet, à l'origine de la monnaie alternative le Sol Violette et du site Alternatives humanistes, de partir sur 4000 km en 40 jours. Equipé d'un vélo électrique, son objectif était de faire signer l'initiative citoyenne Européenne en faveur d'un Revenu de base inconditionnel pour tous.
Ici aussi, la démarche reposait sur la rencontre en demandant l'hospitalité chaque soir à des groupes de citoyens "engagés à un revenu, une entreprise, une planète, une existence et une cité pour tous".
Pour le soutenir dans ses efforts au-delà de la Grande Boucle, il suffit de signer la pétition en ligne sur revenudebase.info.
Aujourd'hui, c'est Armel le Coz qui se lance sur les routes de France. Son angle d'attaque: les candidats et maires de France. Il souhaite les questionner sur leur connaissance des alternatives, et sur leur perception de la démocratie participative.
Ce jeune designer de 28 ans, d'ores et déjà investi dans le développement du projet Parlements et Citoyens, a toujours été animé par l'envie de simplifier, par le design, la compréhension des décisions politiques. Désireux de réaliser des boîtes à outils pour les collectivités qui lui font appel (pour la conception d’un dispositif numérique, une démarche de facilitation, la conception d'un atelier créatif, etc.), il souhaite aller plus loin: ne plus travailler pour les services de l'administration, mais avec les élus.
"Je suis dans une recherche personnelle d’un modèle de société qui fonctionnerait mieux" confiait-il avant de partir, animé par "l'envie de les sensibiliser et leur faire découvrir ces nouvelles alternatives tout autant que découvrir leurs pratiques, pour voir comment la démocratie est pratiquée, côté élu et candidat".
Convaincu que la démocratie doit se pratiquer autrement qu'au travers d'une logique de partis, il part sans prévoir ses points de chute. Inspiré par l'émission Nus et Culottés, il veut se confronter avec l'existant pour réaliser son rêve: dessiner le modèle de société qui lui plaît, un "objectif idéal" reconnaît celui qui a démarré durant la nuit blanche du 5 octobre à Paris, devant l'hôtel de ville.
A voir la multiplication de leurs initiatives, on comprend: ils ne font pas le tour de France pour se promener, mais pour courir et rattraper le temps perdu à tergiverser. C'est une vraie course contre la montre. Et une nouvelle fois la preuve que la France est riche de ceux qui la voient autrement. De quoi inspirer un détour de France ?
Anne-Sophie Novel / @SoAnn sur twitter