/http%3A%2F%2Fs1.lemde.fr%2Fimage%2F2012%2F11%2F29%2F534x267%2F1798102_3_2eef_deux-familles-roms-dont-les-caravanes-ont-ete_0f15805ff5282e7c702077b62ba9fdc4.jpg)
Amnesty International a publié, jeudi 29 novembre, un rapport dans lequel elle demande l'arrêt immédiat des expulsions forcées de campements roms et la modification des lois françaises pour les mettre en adéquation avec le droit international. Selon l'ONG, plus de 9 000 Roms ont été évacués en France au cours des trois premiers trimestres de 2012.
Grégoire Cousin, chercheur à l'Observatoire européen Urba-Rom, commente les chiffres avancés par l'organisation de défense des droits de l'homme.
Lire : Amnesty demande la fin des expulsions des campements roms
Partagez-vous le constat d'Amnesty International sur les expulsions forcées des camps de Roms ?
Grégoire Cousin : Il n'y a effectivement ni diminution, ni augmentation des expulsions forcées des camps de Roms depuis l'élection de François Hollande en mai. Elles se poursuivent sur le même rythme que pendant le mandat de Nicolas Sarkozy. On a eu l'impression d'une hausse cet été, mais cela relève sans doute d'un "effet de loupe", les médias en ont davantage parlé à ce moment-là.
N'y a-t-il pas un décalage entre les engagements de François Hollande et ce qui se passe sur le terrain depuis six mois ?
On est très loin de l'engagement pris par François Hollande dans sa lettre du 27 mars 2012 à Romeurope de ne pas procéder à des expulsions "sans solution". Cette promesse a eu un début de concrétisation dans la circulaire du 29 août qui prévoit qu'un hébergement soit proposé lors des expulsions. Or cette disposition n'est toujours pas financée et reste donc lettre morte. La seule sortie possible des bidonvilles passe par le relogement ou du moins l'hébergement des personnes expulsées. Or le système d'hébergement est saturé.
Quant à la disposition de la circulaire du 29 août précisant qu'il ne faut pas procéder à des expulsions sans décision de justice, il s'agit d'une mesure en trompe-l'œil car c'était déjà le cas sous Nicolas Sarkozy.
N'est-ce pas une logique à court terme d'expulser des Roms qu'il faudra de nouveau expulser d'un autre terrain quelques jours plus tard ?
Cela répond d'abord à des logiques locales, où tout terrain public doit être évacué systématiquement. Tous les maires espèrent que les Roms passent sur le terrain de la commune d'à côté. C'est du moins ce qui se passe en Seine-Saint-Denis, mon terrain d'observation. En province, il me semble qu'il existe une marge de négociation plus importante.
A cette logique locale vient s'ajouter la logique de maintien de l'ordre public des préfets. Ils cherchent en permanence à déstabiliser les publics roms qu'ils voient comme une classe dangereuse. Ils veulent éviter qu'ils ne s'imprègnent trop sur un territoire.
La difficulté à résoudre ce problème est-elle uniquement d'ordre financière ?
Pas uniquement. Il faut surtout de la volonté politique au long cours. Pour avoir des logiques de sortie de bidonvilles comme dans les années 1970, il faut une politique d'habitat et de logement ambitieuse. Même si on n'en prend pas trop le chemin, nous ne verrons les effets de la politique de logement de l'actuel gouvernement que dans quelques années.
Le rapport d'Amnesty :
Voir également : Portraits de Roms : "On est tous venus ici pour travailler"