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24 janvier 2012 2 24 /01 /janvier /2012 11:51

LEMONDE.FR | 24.01.12 | 11h06   •  Mis à jour le 24.01.12 | 11h58

 
 

 

Selon les prévisions économiques, le million d'autoentreprises devrait être atteint le 15 février.

Selon les prévisions économiques, le million d'autoentreprises devrait être atteint le 15 février.AFP/OLIVIER LABAN-MATTEI


A 22 ans, Nathan rêve de s'acheter une voiture, pour pouvoir parcourir plus souvent la centaine de kilomètres qui le séparent de sa fiancée. L'aide financière de ses parents – 400 euros mensuels en plus de son loyer – ne suffit pas à cet étudiant en licence professionnelle de management informatique, installé à Rennes. En mars 2009, trois mois après la création du régime de l'autoentrepreneur par le gouvernement Fillon, Nathan décide donc de monter son "petit business, sans prétention, pour arrondir les fins de mois".

Après "trois clics" sur Internet et trois semaines de délai, le voilà propulsé patron "en toute simplicité". En parallèle de ses cours, il propose dès lors ses services de maintenance et d'installation de matériel informatique. Une activité qu'il pratiquait déjà auparavant "mais au noir, et très irrégulièrement".

Ce tout nouvel entrepreneur répond parfaitement aux objectifs du régime de l'autoentrepreneur : "offrir la possibilité à de nombreux salariés, étudiants, retraités et chômeurs de compléter leurs revenus". Mais, malgré un investissement humain et financier croissant pour faire connaître ses services, il ne voit pas décoller son activité. "Je gagnais en moyenne 150 euros par mois une fois les charges retirées, alors que je travaillais plus de dix heures par semaine". Une fois son diplôme acquis, il est embauché en CDI et laisse de côté son autoentreprise, après un an et demi d'efforts vains.

"TRÈS MAUVAISE SURPRISE"

Malgré le slogan accrocheur du régime de l'autoentrepreneur – "pas de chiffre d'affaire, pas de charge" – Nathan reçoit fin 2010 un courrier qui lui réclame plus de 600 euros, au titre de la cotisation foncière des entreprises (CFE). Cet impôt forfaitaire, qui remplace en partie la taxe professionnelle, vise à financer les collectivités territoriales et varie selon l'implantation géographique. Pour un autoentrepreneur, dont l'entreprise est généralement située à son domicile, elle constitue dans les faits une seconde taxe foncière. Une "très mauvaise surprise" pour le jeune homme, qui s'acquitte de la somme, mais résilie ensuite son statut d'auto-entrepreneur. "J'ai baissé les bras", conclut l'informaticien, partagé entre amertume et "honte" d'avoir renoncé.

En 2007, Nathan avait voté pour Nicolas Sarkozy. "Parce qu'il voulait nous mettre au travail et que moi, je ne demandais que ça", avoue-t-il aujourd'hui, une nuance de gêne dans la voix.  Celui qui représentait "le cœur de cible du sarkozysme" ne sait toujours pas pour qui voter en mai prochain, mais à 25 ans, il n'a toujours pas de voiture.

INDICATEURS EN BAISSE

Comme Nathan, ils sont nombreux à avoir opté pour le régime de l'autoentrepreneur et à avoir déchanté depuis. Un système de charges "bien trop élevées proportionnellement au chiffre d'affaires" pour Raphaël, 22 ans, autoentrepreneur en Haute-Savoie. "Un manque d'encadrement juridique et économique", dénonce pour sa part Sylvain, 31 ans, qui propose en indépendant des formations et du coaching de dirigeants. "Une simplicité apparente, mais derrière, les ennuis s'accumulent", déplore Charlie, 25 ans, domicilié à Anglet.

En 2011, l'Insee a relevé une baisse de 18,9 % des créations de ce statut. Selon les prévisions économiques, le million d'autoentreprises devrait être atteint le 15 février. Un chiffre dont se félicite le gouvernement, mais qui doit tout de même être nuancé, selon Grégoire Leclercq, président de la fédération des autoentrepreneurs. "On recense depuis la création du régime 370 000 résiliations de statut et sur le reste, seuls 50 % des autoentrepreneurs sont considérés comme actifs et dégagent un chiffre d'affaires", affirme Grégoire Leclercq, lui-même autoentrepreneur.

 

 

Dans le secteur du bâtiment, les autoentrepreneurs subissent la pression des artisans qui dénoncent une "concurrence déloyale".

Dans le secteur du bâtiment, les autoentrepreneurs subissent la pression des artisans qui dénoncent une "concurrence déloyale".AFP/MYCHELE DANIAU


PRESSIONS POLITIQUES

Alors qu'il dopait à son lancement le nombre de créations d'entreprises en France, le statut aurait-il depuis perdu son attractivité ? "Nous subissons surtout les attaques répétées au régime, qui le font évoluer dans le mauvais sens", selon Grégoire Leclercq. Depuis sa création, le statut doit composer notamment avec la pression des artisans et des commerçants, qui voient dans l'autoentreprise une "concurrence déloyale, voire du travail au noir déguisé."

Une pression qui tend à s'accélérer, en cette période pré-électorale. Certains candidats envisagent ainsi de limiter la durée du statut, à l'instar de François Hollande. Une proposition "démagogique qui précarise encore un peu plus le régime", pour Grégoire Leclercq. Le signe aussi d'"un certain mépris" affiché par la classe politique, alors que "le régime a tout de même permis à l'Etat de récupérer 600 millions d'euros de recettes fiscales en trois ans." Pour contrer cette offensive, la fédération des autoentrepreneurs a présenté le 18 janvier un livre blanc pour interpeller les parlementaires et les candidats à l'élection présidentielle sur l'intérêt économique et social de ce régime.

>> A lire : Le livre blanc de l'autoentrepreneur

Au cœur de ces propositions, miser sur la "formation et l'accompagnement" des autoentrepreneurs. "Quand on va a la rencontre des autoentrepreneurs, ils nous disent souvent 'c'est terrible, on souffre de solitude'", explique Grégoire Leclercq. "En lançant le régime, on n'était pas préparé en France à former et accompagner toute une nouvelle population d'entrepreneurs", affirme l'ancien gendarme, qui a fait partie des mille premiers autoentrepreneurs français.

"D'UNE PRÉCARITÉ À UNE AUTRE"

Un accompagnement d'autant plus primordial que le régime a été pris d'assaut par de nombreuses personnes "en situation précaire", considérant l'autoentreprise comme une potentielle issue de secours au chômage.

 

 

Le régime de l'autoentreprenariat a été pris d'assaut par de nombreuses personnes "en situation précaire", qui l'ont considéré comme une potentielle issue de secours au chômage.

Le régime de l'autoentreprenariat a été pris d'assaut par de nombreuses personnes "en situation précaire", qui l'ont considéré comme une potentielle issue de secours au chômage.AFP/JEFF PACHOUD


"Gagner quelques centaines d'euros, c'était toujours ça", explique ainsi Sophie, 42 ans, qui a créé l'an dernier en Mayenne une autoentreprise pour se lancer à temps plein dans la vente de bijoux. Grâce à un microcrédit, elle a pu se fournir auprès d'un grossiste et a commencé son activité sur les marchés. "Je vendais pour 500 euros par mois", un "coup de pouce bienvenu" pour cette mère de deux enfants au RSA. Mais le régime d'autoentrepreneur ne permet pas de déduire du chiffre d'affaires les achats et frais de déplacements. "Au final, après les déductions, frais et investissements, je travaillais beaucoup, pour très peu à l'arrivée. Les quelques bénéfices que j'ai tirés de cette affaire m'ont simplement permis de rembourser mon prêt."

Un scénario qu'a souvent pu observer Jean-Paul, entrepreneur à la retraite et bénévole pendant quatre ans à l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADEI), principal opérateur de microcrédit en France. Sa fonction : "redresser les gens qui allaient dans le mur". "Avant 2009, créer son entreprise était une démarche compliquée, cela nécessitait des connaissances commerciales, un investissement théorique, une formation de base en marketing", énumère Jean-Paul, qui délivrait alors des formations "qui faisaient à chaque fois salle comble". Mais le statut d'autoentrepreneur "a donné l'illusion aux gens qu'être entrepreneur était simple et qu'à moindre frais, ils allaient pouvoir s'en sortir. Au bout du compte, la grande majorité passe d'une précarité à une autre."

L'ADEI, qui offre une prime à ses salariés en fonction du nombre de microcrédits réalisés, permet ainsi le lancement de nombreux projets "qui ne sont pas viables". Au moment du départ de Jean-Paul, en 2010, près de 50 % des demandeurs de prêts devaient être refinancés par l'association. A des taux d'intérêts d'environ 15 %.

"L'ÉCHEC D'UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE"

Pour d'autres, le statut constitue également "une aubaine", car il est souvent "la dernière chance de se faire embaucher". A 57 ans, après un licenciement, retrouver un travail était "une mission quasiment impossible" pour Daniel, dessinateur-projeteur en Normandie. En 2009, il se renseigne sur le statut d'autoentrepreneur et bénéficie d'une aide à la création d'entreprise pour se lancer dans l'aventure. Grâce à son réseau, il parvient à réaliser 27 000 euros de chiffre d'affaires en 2010, puis 17 000 euris en 2011. Une baisse qu'il explique par le contexte économique difficile et la "condition précaire du régime", mais il maintient que "ce statut [lui] a évité la mort professionnelle".

Senior comme Daniel, Maryvonne est plus critique. Si elle reconnaît aussi que son statut d'autoentrepreneur lui a permis de continuer à être active, elle dénonce tout de même cette "rustine pour continuer à vivre", qui "montre l'échec d'une politique économique." Et de conculre : "Avec ce régime, on nous a proposé de créer notre propre emploi, parce qu'on n'était pas capables d'en créer à grande échelle ou d'inciter les entreprises à embaucher des seniors. Au final, on travaille et on survit avec pas grand chose, mais pour le gouvernement, ça fait toujours ça de moins sur les listes du Pôle emploi."

Charlotte Chabas


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