Dans un essai Le Viol d'Europe, l'économiste Robert Salais revisite soixante ans de construction européenne. Pour pointer les échecs successifs qui ont réduit l'Europe à une simple pièce d'un ordre mondial néolibéral.
À quelques mois des élections européennes et alors que la crise de l'euro menace de repartir, c'est un essai qu'il faut lire. Dans Le Viol d'Europe, l'économiste Robert Salais revisite méthodiquement, texte après texte, soixante années de construction européenne. Objectif : déconstruire le grand récit officiel qui n'a cessé de « vendre » aux citoyens une Europe des peuples libres et égaux, assise sur le progrès social et l'approfondissement démocratique.
Or c'est un tout autre paysage européen qui a surgi avec les crises qui se succèdent depuis 2008. Cette Europe vantée par les pères fondateurs, relancée par Jacques Delors, n'est pas : à l'inverse l'Union européenne n'est devenue qu'une simple pièce d'un ordre mondial néolibéral. « L'énigme européenne est là, dans ce divorce entre l'Idée au nom de laquelle tout est fait, et la réalité de ce qui se passe. Elle est dans ce paradoxe qu'en travaillant soi-disant à réaliser l'idée d'Europe, le processus politique européen la fait disparaître », écrit Robert Salais.
Pourquoi ces échecs en série, pourquoi Jacques Delors n'a-t-il pas pu faire valoir l'« Europe sociale », pourquoi le rêve européen a-t-il mué en un cauchemar néolibéral ? Entretien.
Robert Salais, Le Viol d'Europe, PUF, 425 pages, 20 euros.