Médiapart
Le Sénat a adopté, dans la nuit de samedi à dimanche, le projet de loi sur l'emploi, au terme d'un débat agité. Le gouvernement avait en effet décidé d'utiliser un vote bloqué pour faire accélérer les débats, ce qui a déclenché la fureur des sénateurs communistes qui ont retiré tous leurs amendements et quitté l'hémicycle.
Le texte a été voté par 172 voix contre 24 à l'issue d'un débat houleux. Le PS, le RDSE et les centristes ont voté pour. L'UMP et les écologistes se sont abstenus. Seuls les communistes ont voté contre, ainsi que Marie-Noëlle Lienemann (PS). Ce débat aura accru spectaculairement la fracture entre les communistes et les écologistes et la majorité gouvernementale.
« Nous avons la conviction que ce texte marque une avancée pour les salariés », a assuré Christiane Demontès (PS). « C'est un moment de progrès, ce sont des opportunités nouvelles dans le dialogue social qui s'ouvrent », a déclaré le ministre du travail, Michel Sapin.
« Vous avez bradé le code du travail et les droits des salariés », leur a opposé Dominique Watrin (CRC, communistes). « Les efforts demandés au patronat sont flous tandis que ceux demandés aux salariés sont sonnants et trébuchants », a renchéri Mme Lienemann, de l'aile gauche du PS. « Si des progrès existent, les reculs étaient trop importants (mobilité contrainte, licenciements massifs facilités, changement des clauses du contrat imposé au salarié) pour emporter notre adhésion », a indiqué un communiqué du Groupe écologiste.
Alors que le groupe CRC défendait pied à pied et très longuement les quelque 400 amendements qu'il avait déposés, le gouvernement a décidé samedi matin de demander un vote bloqué, procédure qui empêche le vote sur chaque amendement au profit d'un vote global en fin de débat.
Cette procédure, rarement utilisée et encore moins contre un membre de sa propre majorité, a provoqué la fureur des communistes qui ont quitté l'hémicycle. « Il s'agit d'un coup de force pas seulement contre la démocratie parlementaire, mais aussi contre le monde du travail », s'est indignée la présidente du CRC, Eliane Assassi.
Le projet de loi de « sécurisation de l'emploi » transpose l'accord du 11 janvier (ANI) signé par le patronat (Medef, CGPME, UPA) et trois syndicats (CFDT, CFTC, CFE-CGC) mais refusé par FO et la CGT. Il accorde plus de flexibilité aux entreprises (accord de maintien dans l'emploi, mobilité interne, refonte des procédures de licenciements...) tout en créant de nouveaux droits pour les salariés (accès élargi aux mutuelles, droits rechargeables au chômage, formation...).
Principale modification, le Sénat a supprimé la « clause de désignation » permettant aux partenaires sociaux de désigner l'organisme assureur qui prendra en charge la généralisation de la complémentaire santé prévue par le texte. Les autres amendements adoptés sont mineurs.
Inscrit en procédure accélérée (une lecture par assemblée) et déjà adopté par l'Assemblée nationale, il va maintenant être soumis à une CMP (commission mixte paritaire, 7 sénateurs, 7 députés) dont les conclusions seront soumises à une nouvelle lecture des deux chambres.