Nouveau rebondissement dans les scandales qui frappent la métropole québécoise. Le maire de Montréal, Michael Applebaum, a été arrêté lundi 17 juin au matin et accusé de "complot, abus de confiance et actes de corruption".
Interpellé à l'aube à son domicile, Michael Applebaum est arrivé vers 6 h 45 au siège de la sûreté du Québec (SQ, police provinciale). Les faits reprochés s'étendent de 2006 à 2011 – avant qu'il ne soit maire de Montréal – et portent "essentiellement sur l'obtention d'autorisations et d'appuis politiques concernant deux projets immobiliers" dans l'arrondissement qu'il dirigeait alors, a déclaré André Boulanger, responsable des enquêtes sur la corruption à la SQ.
"FRAUDE ENVERS LE GOUVERNEMENT"
Quatorze chefs d'accusation ont été retenus contre lui, dont "complot, abus de confiance et actes de corruption dans les affaires municipales", a indiqué de son côté l'unité permanente anti-corruption (UPAC) lors d'une conférence de presse.
Depuis le début de l'année, les investigations menées par la commission d'enquête publique Charbonneau et par l'UPAC ont mis à jour un système de corruption impliquant responsables de la mairie, entrepreneurs en bâtiment et membres de la mafia. M. Applebaum, premier maire anglophone de Montréal depuis plus de cent ans, avait été élu en novembre dernier dans la foulée de la démission de Gérald Tremblay, qui avait dû jeter l'éponge face à des révélations en série incriminant son administration.
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Deux autres hommes ont également été arrêtés, lundi, dans le cadre de cette offensive anti-corruption : Jean-Yves Bisson, ancien haut fonctionnaire du même arrondissement, et Saulie Zajdel, ancien conseiller municipal et ex-candidat aux législatives fédérales du Parti conservateur au pouvoir à Ottawa. En tout, 23 accusations, dont celles de "fraude envers le gouvernement" et "commissions secrètes", ont été portées contre MM. Applebaum, Bisson et Zajdel. La police a indiqué qu'ils devraient être remis en liberté plus tard dans la journée et qu'ils comparaîtraient en octobre devant la justice.
"Dans les dossiers qui touchent la ville de Montréal, nos enquêtes se poursuivent, c'est pourquoi nous ne pouvons préciser davantage les faits reprochés", a précisé à la presse Robert Lafrenière, numéro un de l'UPAC.
BRANCHE MONTRÉALAISE DE LA MAFIA ITALIENNE
L'opposition de la ville a réclamé la nomination d'un maire intérimaire d'ici trente jours pour diriger Montréal jusqu'aux élections municipales de novembre. En conférence de presse, la chef de l'opposition, Louise Harel, a demandé que soit "totalement exclue" la mise sous tutelle gouvernementale de la métropole. Une telle mesure avait été récemment mise en œuvre pour Laval, la troisième ville du Québec, frappée elle aussi par des scandales de corruption.
Créée en 2011, la commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction – surnommée commission Charbonneau, du nom de sa présidente, la juge France Charbonneau – doit faire la lumière sur les stratagèmes de corruption dans l'industrie du bâtiment et éclaircir leurs liens avec le financement occulte de partis politiques.
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Le système de corruption consistait, selon plusieurs déclarations, en appels d'offres truqués, les entrepreneurs reversant une partie de leurs gains au parti du maire précédent, Gérald Tremblay, et à la branche montréalaise de la mafia italienne. A la tête de Montréal pendant dix ans, M. Tremblay a toujours affirmé son innocence. Bien qu'entendu par la commission Charbonneau, aucune accusation n'a été portée contre lui.