LEMONDE.FR avec AFP | 11.11.11 | 12h13
La répression se poursuit dans le sang au Yémen. Les forces fidèles au président Ali Abdallah Saleh ont tiré vendredi 11 novembre dans la matinée à l'artillerie lourde sur Taëz, deuxième ville du Yémen. Selon un bilan de l'Agence France-Presse, quinze personnes sont mortes, toutes des civils, dont des femmes et des enfants. Des dizaines d'autres personnes ont été blessées.
Selon des témoins, les forces fidèles au président Saleh ont commencé avant l'aube à tirer sur les quartiers entourant la place de la Liberté, épicentre de la contestation de la ville de Taëz, pour dissuader les habitants de se rendre à une manifestation antirégime qui y était prévue. Les tirs ont repris dans la matinée contre la place où campent depuis des mois des contestataires. C'est ensuite vers midi que le bombardement s'est intensifié, au moment où des milliers de personnes y convergeaient pour la grande prière du vendredi, toujours selon ces témoins.
Des habitants qui participaient aux manifestations ont assuré que c'était la première fois que l'armée tirait pendant la prière. Selon des sources médicales, les forces loyales au président Saleh ont même visé les étages supérieurs d'un hôpital de la ville. Selon un expert, interrogé par Le Monde.fr, la stratégie du président Saleh, après son retour au Yémen à la suite de son hospitalisation en Arabie saoudite, est "d'essayer de détruire le mouvement de contestation populaire qui reste pacifique" afin de le transformer en guerre civile.
Vendredi, d'autres villes du pays ont aussi été le théâtre de manifestations. Dans la capitale, à Sanaa, des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées comme chaque vendredi sur la place du Changement pour réclamer le départ du président Saleh et crier leur refus de tout immunité. Un rassemblement similaire a aussi eu lieu à Ibb, au sud-ouest de la capitale. Mais dans le même temps, des dizaines de milliers de partisans de M. Saleh ont manifesté sur une autre place de Sanaa pour lui apporter leur soutien.
L'ÉMISSAIRE DES NATIONS UNIES AU YÉMEN
Ce regain de violences a coïncidé avec l'arrivée jeudi à Sanaa de l'émissaire des Nations unies au Yémen, Jamal Benomar. Il doit tenter d'amener le pouvoir et l'opposition à conclure un accord sur la transition dans le pays. Sa première mission, en octobre, s'était soldée par un échec. Il a cette fois émis l'espoir que cette nouvelle mission "soit l'occasion de régler les questions encore en suspens" au sujet de l'application d'un plan de sortie de crise proposé par les monarchies du golfe. Un plan qui prévoit la démission du président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis trente-trois ans, en échange d'une immunité pour lui-même et ses proches.
Mais M. Saleh, au pouvoir depuis 33 ans et accusé par ses adversaires de corruption et de népotisme, a jusqu'à présent refusé de signer le plan, accentuant le risque d'une guerre civile dans le pays où la répression et les combats entre pro et anti-Saleh ont fait des centaines de morts et des milliers de blessés depuis janvier.
Selon des responsables du parti au pouvoir, le Congrès populaire général, le régime et l'opposition parlementaire, qui a paraphé le plan du Golfe, sont proches d'un accord sur un calendrier d'application. Mais à plusieurs reprises, le président Saleh, sur le point d'accepter le plan, a refusé de le signer.