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3 février 2012 5 03 /02 /février /2012 14:23
Marianne - Philippe Murer - Professeur d'économie | Vendredi 3 Février 2012 à 12:00

 

Philippe Murer, professeur de finance vacataire à la Sorbonne, revient sur la crise grecque. Quelles sont les solutions envisageables, au-delà de celles annoncées par le FMI et la troïka ?



Dans ce magnifique pays, berceau de la civilisation européenne, le temps est à la tempête ou à l’ouragan pour les salariés.

  • Les salaires des fonctionnaires ont déjà été réduits de 15 % en 2 ans alors que le nombre était diminué de 20 %.
  • Les retraites ont déjà été réduites de 15 % et l’âge de la retraite repoussé de 60 ans à 65 ans.
  • La Troïka et le FMI demande maintenant que les salaires du privé soient réduits de 20 %, le SMIC en tête !
La main bien visible des grands fonctionnaires internationaux intervient là même ou elle n’a pas sa place dans leur doctrine ultralibérale : le secteur privé. L’ultralibéralisme rejoint ici le communisme par des méthodes de planifications douteuses.

La Grèce est pourtant d’ores et déjà en plein cauchemar :

  • côté économique : chute de 15 % du PIB, vente de détail et production industrielle en baisse de 30 %., rien ne va plus.
  • côté humain : des parents abandonnent leurs enfants à l’orphelinat avant de se suicider, la faim est partout, le chômage approche les 20 % et la pauvreté s’étend de façon considérable
  • côté démocratie : le referendum sur la sortie de l’euro est conspué par les gouvernements européens ; enfin, dimanche 29 janvier, l’Allemagne a fait circuler une proposition reprise par tous les journaux européens pour placer un « commissaire » étranger à la tête du budget grec ce qui revient à établir un protectorat.
Esclavage pour dette, voilà ce que l’Europe fait subir à ce pays. Il y a 2000 ans, les Romains s’étaient révoltées et avaient réussi à abolir cette pratique. L’Europe la remet malheureusement au goût du jour sous de nouveaux habits.

Le problème de l’économie grecque est réel et complexe

Le problème principal est aujourd’hui bien identifié par l’ensemble des économistes. La bénédiction de bas taux d’intérêts à la suite de l’introduction de l’euro a créé de la croissance par endettement privé et hausse de la consommation en Grèce. Les finances publiques étaient stables mais sur un étiage élevé. Malgré cette croissance forte, l’industrie qui était en perte de compétitivité forte n’avait aucune croissance.

 

La Grèce se relèvera avec les Grecs pas en baissant leurs salaires

 

Le régime d’inflation grecque dû à une culture économique différente a conduit mécaniquement les salaires dans une spirale haussière, juste pour rattraper l’inflation. Ainsi, les salaires grecs ont-ils divergés de 70 % par rapport au salaire allemand et de 30 % par rapport à l’Espagne et l’Italie.

 

La Grèce se relèvera avec les Grecs pas en baissant leurs salaires

 

Du coup, lorsque les dettes des ménages et de l’Etat grec ont commencé à baisser début 2008, le pays a déroulé le cycle inverse : l’endettement ne pouvait plus soutenir une économie dont la compétitivité était ruinée. Et le château de cartes s’est effondré. On remarquera que l’Espagne et l’Italie sont dans des situations similaires même si leur économie est plus solide et que les excès ont été moins forts.

Comment adresser ce problème ?

Le choix fait par l’Europe a été de réduire les dépenses publiques pour que le déficit public et la dette publique se réduisent. Malheureusement, on se retrouve forcément dans un schéma de dépression économique ou cercle vicieux.

 

La Grèce se relèvera avec les Grecs pas en baissant leurs salaires
Du coup, le plan n’a pas marché, la dette et le déficit public ont continué à se creuser pour atteindre respectivement 10 % et 160 % du PIB. La dette est hors de contrôle.

Les économistes veulent maintenant régler le problème connexe qui est celui de la compétitivité des salaires afin que de relancer l’économie grecque par la demande extérieure.

Et ils veulent pour cela comprimer les salaires privés de 20 % ce qui ne sera pas assez car les salaires doivent baisser de 20 à 30 % de plus pour que les produits grecs redeviennent compétitifs. Et n’oublions pas que l’industrie est en charpie avec un quart du tissu industriel détruit.

Cette solution est non seulement une impasse mais elle est moralement inacceptable car les Grecs vont souffrir de manière intense et longtemps, encore 5 voire 10 ans, avant que la machine ne puisse se réenclencher. Les dégâts humains seraient alors immenses, peut-être irréparables dans un avenir proche.

Autre solution

La baisse de 30 % de tous les prix et salaires en un seul jour dans le pays. Hormis le fait qu’on ne peut faire baisser les marchandises importées du même niveau, ce genre de solution bureaucratique est forcément aventureuse voire dangereuse.  De plus, la dette grecque deviendrait 30 % plus lourde pour l’état grec et rien ne s’arrangerait. Laissons donc cette solution de côté.

Un constat d’échec dans le cadre actuel

On peut imaginer de réduire la dette des deux tiers afin de se retrouver à un niveau de 55 % du PIB. Il faudrait que le gouvernement grec recapitalise ses banques et assurances en faillite pour un montant de 5 % du PIB et trouve les moyens de relancer un peu la croissance et la confiance.
Cependant, les problèmes ne seront pas résolus car la divergence de l’inflation de la Grèce par rapport à l’Allemagne reprendra de plus belle. Dix ans plus tard, le problème grec réapparaîtra.
 
Dernière solution

La Grèce sort de l’euro. La drachme baisse alors de 60-70% par rapport à l’euro. La Grèce fait « défaut », restructure sa dette, la transforme en dette en drachme et n’en remboursera qu’une partie soutenable, équivalant à 60 % de son PIB mais en drachme. Elle prend le contrôle de sa Banque centrale, fait marcher sa planche à billet pour recapitaliser les banques et assurances du pays qui seront alors en faillite pour 5 % du PIB.

Les salaires grecs redeviennent compétitifs (baisse de 60 % suite à la dévaluation de la drachme) et le resteront car la drachme aura tendance naturellement à baisser par rapport à l’euro, monnaie plus forte.

Enfin, la Banque de Grèce finance des projets rentables à taux zéro pour un montant de 9 milliards d’euros soit 3 % du PIB chaque année et ce pendant au moins 5 ans : infrastructure ferroviaire de qualité construite en bonne partie en Grèce avec l’appui des Français et des Allemands, centrales solaires et éoliennes construites en bonne partie en Grèce avec l’appui des Français, Allemands et autres pays intéressés etc.

La croissance repartira, le chômage baissera, les cotisations sociales et les impôts rentreront mieux et le déficit public s’amoindrira. Certes il y aura de l’inflation importée au départ (15 à 20 % d’inflation à attendre) mais dès la deuxième année, cette inflation baissera et se normalisera par la suite.

Et ce sans sang et larmes, comme cela est le cas actuellement

Les Grecs devront évidemment s’attaquer à la question de l’économie au noir, c’est leur problème, à eux de trouver des solutions. Cela sera plus facile dans une période prospère que dépressive.

Si l’économie était une vraie science, la citation de Rabelais « La Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » s’appliquerait parfaitement aux programmes actuels pour la Grèce. Qu’est ce qui arrêtera la main bien visible de nos hauts fonctionnaires européens?

Les solutions économiques doivent toujours, dans la mesure du possible, rester au service de la démocratie et d’un projet de société, c’est le devoir moral de chaque économiste. La situation actuelle est inversée : la démocratie et le projet de société sont au service de l’économie.

Ce papier a l’air d’une grande violence, mais ce sont les faits qui sont violents, pas l’écriture.

Servir la communauté des citoyens, le peuple selon une expression démodée, est l’objectif légitime d’un haut-fonctionnaire. On a du mal à croire que ce soit le cas en Grèce. C’est à chaque habitant de redevenir citoyen pour que chaque pays d’Europe se relève. Sur ce point là, je pense qu’ « il n’y a pas d’alternative » comme disait Madame Thatcher!

 

 

 

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