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Le blog des Indignés de Nimes et de la Démocratie Réelle Maintenant à Nimes

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La démocratie verrouillée du Parlement européen

 

 

Source : www.marianne.net

 

 

La démocratie verrouillée du Parlement européen
Jeudi 22 Mai 2014 à 16:00

 

 

Ils pourraient et devraient être un vrai contre-pouvoir face à la très libérale Commission et au puissant Conseil européen. Malheureusement, les députés de Strasbourg sont confinés dans un rôle trop secondaire pour peser efficacement sur le fonctionnement de l'Union.

RUFFER/CARO FOTOS/SIPA
RUFFER/CARO FOTOS/SIPA

La démocratie verrouillée du Parlement européen

>>> Article paru dans Marianne daté du 9 mai

Ils sont deux à guigner la première place en Europe : à droite, le champion du Parti populaire européen (PPE), Jean-Claude Juncker, conservateur et luxembourgeois. A gauche, le social-démocrate allemand Martin Schulz. Ils se connaissent bien : les deux hommes sont des piliers du système institutionnel européen, puisque l'un présida dix ans l'Eurogroupe et que l'autre est le président sortant du Parlement européen. On comprend pourquoi on roupille ferme lorsqu'ils débattent de l'avenir de l'Union européenne.

 
 

Trop de compromis, pas toujours honteux d'ailleurs, jalonnent leur histoire commune, pour que l'homme de gauche sorte réellement du cadre de la « pensée standard » européenne. S'il critique volontiers la méthode « contre-productive » de José Barroso, si son programme électoral promeut une « nouvelle croissance » en Europe, et souhaite combattre les inégalités sociales et les paradis fiscaux, pas question pour autant de remettre en question les fondements de l'ordre existant. A Paris, le 17 avril, il est à côté de Jean-Christophe Cambadélis au Cirque d'hiver, pour le lancement de la campagne du Parti socialiste européen. Le tout nouveau premier secrétaire du PS, désireux de donner un peu d'oxygène politique durant cette campagne, ose imaginer une renégociation des critères de Maastricht et notamment de la « règle de 3 % », « qui date d'un autre temps ». Le président sortant du Parlement européen le douche aussitôt comme un professeur remet un élève à sa place : « Les règles existent, elles ne sont pas négociables. Il faut donc les appliquer... »

 
 

Bonne volonté
 

En fait, Martin Schulz est à l'image de l'assemblée qu'il préside : plein de bonne volonté et d'imagination mais impuissant. Inconnus pour la plupart dans leurs pays d'origine, les eurodéputés ont pourtant accompli un travail considérable, souvent resté dans l'obscurité. Qui se souvient que c'est le Parlement européen qui fit la seule proposition de « mutualisation des dettes publiques », au moment de la crise grecque ? Qui sait que c'est la commission des Affaires économiques et monétaires (Ecom) qui a été le moteur de la rerégulation des banques et des secteurs financiers après la grande crise issue du laxisme généralisé des pays de l'Union ? Et pourtant, c'est la réalité : des banques locales aux fonds de pension, ou spéculatifs, jusqu'aux assurances, une quarantaine de directives (lois européennes) ont tout remis sous la surveillance d'une autorité publique... « Nous avons reconstruit en cinq ans ce que le néolibéralisme avait détruit pendant vingt ans », se réjouit Liêm Hoang-Ngoc, député sortant (et non reconduit par le PS).
 

Michel Barnier, commissaire chargé du Marché intérieur, reconnaît volontiers s'être appuyé sur les parlementaires pour tordre le bras du puissant lobby des banques (doté d'un budget de 120 millions d'euros à Bruxelles !), soutenu par les gouvernements britannique, allemand ou français. C'est bien grâce aux parlementaires européens si la directive sur le secteur bancaire proposée par Barnier est bien plus radicale que la loi Moscovici en France. De même, la taxe sur les transactions financières  (dite encore « taxe Tobin »), adoptée par 11 pays, a été conçue au sein de l'Ecom. Il arrive même au Parlement de rejeter un traité négocié avec les Etats-Unis, comme l'accord Swift sur l'accès aux données personnelles, ou l'Acta, sur la contrefaçon.
 

Certes. Mais cette assemblée démocratique (elle est élue au suffrage universel depuis 1979), toute besogneuse et éclairée qu'elle soit, fait figure d'éternelle mineure des institutions européennes. Depuis le traité de Lisbonne, le Parlement est « codécisionnaire » dans la plupart des domaines, (sauf la fiscalité et les affaires étrangères). Mais, le plus souvent, les députés doivent s'adapter aux compromis passés entre la Commission et le Conseil des ministres (des Etats). Et encore, raconte le député vert portugais Rui Tavares : « Lorsque nous devons rencontrer un gouvernement, c'est un ambassadeur qui le représente, comme si nous étions des élus étrangers ! » C'est ainsi que les parlementaires qui souhaitaient une révision profonde de la directive sur les travailleurs détachés (qui permet de contourner les règles sociales) n'ont pu qu'approuver, souvent à regret, des modifications marginales concoctées dans leur dos entre Paris, Berlin, Londres, Varsovie et Bruxelles.


Quant aux questions de politique économique, c'est pis puisque le Parlement ne donne qu'un avis consultatif sur les orientations que la Commission de Bruxelles impose aux Etats membres ! L'ancien ministre et futur commissaire français Pierre Moscovici tenait le Parlement de Strasbourg dans une telle estime qu'il ne vint jamais expliquer devant cette assemblée la politique économique de la France, et ce, en dépit de quatre invitations...
 

Enfin, lorsqu'il possède un réel droit de veto, comme sur le budget pluriannuel (2014-2020) de l'Union, il renonce à l'utiliser. Plutôt que d'imposer un budget de relance, les élus ont préféré suivre les injonctions de leurs gouvernements respectifs. Isabelle Durant, députée écologiste belge, l'avoue : « Nous aurions pu dire non. Dans tous les groupes, on a dit que c'est un mauvais budget. Mais on s'est écrasés en rase campagne. C'est un acte manqué démocratique... » De quoi donner raison au président permanent du conseil des chefs d'Etat et de gouvernement, le cynique Herman Van Rompuy, selon qui « les citoyens comprennent très clairement la différence entre le Parlement européen et ceux qui prennent les vraies décisions ».

 

 

 

 

Source : www.marianne.net

 

 

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