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Le blog des Indignés de Nimes et de la Démocratie Réelle Maintenant à Nimes

La colère grecque étouffée par le fédéralisme européen

Marianne - Pierre Lévy - Blogueur associé | Vendredi 7 Octobre 2011 à 05:01 


Notre blogueur associé Pierre Lévy rebondit sur les mouvements sociaux multiformes qui éclatent en Grèce, tandis qu'Angela Merkel s'entête dans une fuite en avant fédérale, en exigeant la mise en place de « droits d’intervention capables de déclarer nul et non avenu » tout budget d’un pays qui ne respecterait pas les normes d’austérité européennes.



La Grèce a connu, ce 5 octobre, une journée de puissante mobilisation. On le sait, la colère monte depuis plusieurs mois contre la « Troïka » – l’attelage formé par la Commission, la Banque centrale européenne et le FMI.

Parmi les mouvements multiformes qui éclatent quasiment au quotidien, il faut noter l’initiative d’officiers à la retraite qui ont, le 30 septembre, envahi le ministère de la Défense. 2000 d’entre eux – pourtant peu habitués aux mouvements sociaux – se sont massés devant le bâtiment, tandis qu’un groupe de 300 faisait irruption à l’intérieur, cassant plusieurs portes et détruisant les portiques de sécurité.

L’association professionnelle des militaires d’active, tout en prenant ses distances par rapport à cette action, a fait part de la perte de confiance face aux « intentions de l’Etat » : « le mépris grandissant, le refus du dialogue, et finalement la répression violente portent un coup sérieux au moral des officiers ».

Cette prise de position survient dans le contexte où des rumeurs circulent sur un possible recours du gouvernement aux forces armées si la police n’était plus en mesure de faire face au mécontentement grandissant. Le ministre de la Défense a toujours démenti une telle perspective.

Il reste que les forces de l’ordre ne sont pas épargnées par la colère. Ainsi, ce sont des policiers qui, le 25 septembre, ont accroché sur le Mont Lycabette (dominant Athènes) une immense banderole noire proclamant « Jour de paie, jour de deuil ». Le même jour, leur syndicat manifestait également devant les bureaux athéniens de la Commission européenne, de même que devant les ambassades allemande et française. Avec notamment un slogan qui avait le mérite de la clarté : « la Troïka, dehors ! ». Ladite Troïka, on le sait, a été mise en place pour prendre les manettes économiques et financières nationales – un privilège qui, dans l’ancien temps, était réservé au gouvernement élu d’un pays.

Dans la foulée, le syndicat de la police – à l’unisson de revendications analogues affichées un peu partout – publiait une déclaration justifiant ses actions en affirmant : « nous refusons de nous soumettre aux conditions imposées par les occupants de notre pays ». Sur son site Internet, on pouvait lire également : « les Grecs ne négocient pas leur dignité nationale ».

Une dernière affirmation a de quoi inquiéter les autorités : le syndicat des forces de l’ordre entend à l’avenir « refuser de devenir l’escorte des politiciens soumis à l’addiction de leur dernière dose », allusion aux tranches successives de crédits débloquées au compte-goutte par ladite Troïka en échange de mesures toujours plus drastiques votées par les parlementaires. Une référence à la protection policière rapprochée qui fut nécessaire, en juin, pour que les députés pénètrent dans l’enceinte du parlement et ratifient les sacrifices imposés.

Ce n’est pourtant que le début – et pas seulement pour les Grecs – si l’on en croit Angela Merkel. La chancelière allemande vient en effet de gravir un échelon dans la surenchère surréaliste à laquelle se livrent nombre de responsables européens en matière d’abolition des souverainetés nationales. Le 26 septembre, trois jours avant le vote du Bundestag ratifiant l’accord européen du 21 juillet, elle a ainsi exigé la mise en place de « droits d’intervention capables de déclarer nul et non avenu » tout budget d’un pays qui ne respecterait pas les normes d’austérité européennes. Une fuite en avant fédérale qui ne manquera pas de doper encore l’enthousiasme populaire en faveur de l’Europe, qui ne fait que croître du nord au sud du Vieux continent…

Comme en écho, l’Eglise polonaise a cru bon de sonner le tocsin. Ce 25 même septembre, son chef, l’archevêque Jozef Kowalczyk, officiait lors d’une grand-messe à Varsovie, à laquelle participaient tous les membres du gouvernement conduit par Donald Tusk. Faisant preuve d’un humour probablement involontaire, le prélât a insisté auprès des responsables politiques pour que ces derniers gardent à l’esprit « les valeurs de base de l’UE, telles que la solidarité et la justice sociale ». Pour sa part – et comme si un doute s’était insinué quant à l’avenir de cette grandiose aventure – le cardinal Kazimierz Nycz a invité les fidèles « à prendre part à une grande prière pour l’Europe ».

On attend avec impatience l’extrême-onction.


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