LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 19.02.12 | 11h43 • Mis à jour le 19.02.12 | 12h00
Les militants syriens s'attendaient à de nouvelles manifestations à Damas dimanche 19 février. La journée est placée sous le signe de la désobéissance civile, au lendemain de rassemblements d'une ampleur inédite non loin du cœur de la capitale. Les militants tentent de mobiliser autour des premiers "martyrs" de la capitale, jusqu'alors plus habituée aux démonstrations de force du régime avec des rassemblements massifs et médiatisés de partisans du président Bachar Al-Assad. Samedi, entre "15 000 et 20 000 personnes" selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) ont participé aux funérailles de quatre manifestants abattus la veille par les troupes du régime dans le quartier de Mazzé, les premiers protestataires tués au coeur de la capitale.
Au cours de ces funérailles, un cinquième manifestant a péri lorsque les troupes ont tiré sur les participants à la cérémonie, devenue une manifestation anti-régime. Les militants pro-démocratie ont appelé à la désobéissance civile dimanche dans la capitale sur leur page Facebook "Syrian Revolution 2011".
Plus au nord, dans la province de Homs, une femme a été abattue au cours de perquisitions menées par les troupes du régime, tandis qu'un homme est mort sous les balles des forces de sécurité dans la province d'Idleb. Par ailleurs, dans cette même région, le procureur général et un juge ainsi que leur chauffeur ont été abattus par des tireurs non identifiés, selon l'OSDH, tandis que l'agence officielle Sana a attribué ces assassinats à des "bandes terroristes armées". L'agence rapporte également que des "bandes terroristes armées" ont tiré une roquette sur un réservoir de carburant de la raffinerie de Homs (centre). Enfin, l'OSDH affirme que les bombardements, entamés le 4 février, se poursuivent sur Homs, la "capitale de la révolution".
Un corps à proximité d'un cours d'eau à Idlib, après une attaque de l'armée syrienne, le 18 février 2012.AFP/BULENT KILIC
TENSIONS AU SEIN DE LA LIGUE ARABE
L'Egypte a décidé, dimanche, de rappeler son ambassadeur en Syrie, a annoncé le ministère égyptien des affaires étrangères. Le chef de la diplomatie égyptienne Mohammed Kamel Amr a reçu l'ambassadeur dans la matinée après l'avoir convoqué et il a été décidé que le diplomate rester au Caire "jusqu'à nouvel ordre", selon un communiqué du ministère.
L'Egypte avait appelé mercredi à "un changement pacifique et réel" en Syrie et à l'arrêt immédiat des violences contre les civils, tout en rejetant une intervention militaire. La Ligue arabe a décidé la semaine dernière de fournir un soutien politique et matériel à l'opposition syrienne et de demander au Conseil de sécurité la formation d'une force conjointe ONU-Arabes pour mettre fin aux violences en Syrie.
A Alger, le ministre d'Etat et secrétaire général du Front de libération national (FLN-parti présidentiel), Abdelaziz Belkhadem, estime que la Ligue arabe doit être réformée. "La Ligue n'est pas une ligue et (...) encore moins arabe. C'est une Ligue qui fait appel au Conseil de sécurité contre un de ses membres fondateurs ou à l'OTAN pour détruire les capacités de pays arabes. Elle a besoin d'être profondément revue", a déclaré M. Belkhadem, qui a également le statut de représentant personnel du chef de l'Etat. La situation en Syrie "est tragique. Les Syriens sont en train de s'entretuer. Il faut mettre un terme à cette tragédie et permettre aux Syriens de décider seuls de leur avenir, de la forme du régime qu'ils veulent et des dirigeants qu'ils veulent", a souligné M. Belkhadem.
L'Irak a annoncé des mesures pour renforcer le contrôle de sa frontière avec la Syrie et empêcher la contrebande d'armes et de personnes, a indiqué samedi le bureau du premier ministre irakien Nouri Al-Maliki. L'Irak veut que la Syrie participe au sommet arabe prévu fin mars à Bagdad, bien que la Syrie soit actuellement suspendue de la Ligue arabe, a déclaré le premier ministre irakien dans une interview diffusée samedi. La Ligue arabe a décidé en novembre dernier de suspendre la Syrie de ses activités jusqu'à ce que Damas ait appliqué un plan arabe visant à mettre fin à la crise syrienne. Le 12 novembre 2011, lors d'une réunion ministérielle au Caire, 18 des 22 membres de la Ligue arabe ont voté pour la suspension de la Syrie de toutes les activités au sein de l'organisme panarabe, et ce jusqu'à l'application totale par Damas d'un plan arabe de sortie de la crise syrienne. La Syrie a qualifié cette suspension d'"illégale".
ESPOIR DE NÉGOCIATION POUR PÉKIN
Il reste un espoir que la crise syrienne puisse se résoudre pacifiquement par le dialogue, estime dimanche l'agence Chine nouvelle qui insiste sur les bouleversements régionaux qu'entraînerait une intervention armée pour mettre fin aux violences qui durent depuis 11 mois. Pékin a envoyé à Damas son vice-ministre des affaires étrangères, Zhai Jun, qui a rencontré Assad samedi et a répété le soutien de son pays au projet de référendum constitutionnel du président syrien comme moyen de sortir de l'impasse. "Parmi les différents groupes de l'opposition en Syrie, certains ont exprimé leur volonté de dialoguer avec le gouvernement et ont également mis en garde ceux qui souhaitent une intervention extérieure du danger de devenir un instrument de l'Occident", écrit Chine nouvelle dans un article en anglais. "Pourtant, leur appel à un dialogue pacifique inter-syrien a été largement ignoré, de manière intentionnelle ou fortuite, par les médias occidentaux qui diffusent le sentiment faux qu'il existe un consensus dominant entre les différentes factions des forces de l'opposition en faveur d'une intervention dans leur pays".