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Les députés espagnols ont approuvé jeudi 20 décembre le budget 2013 du pays, marqué par une austérité sans précédent et un tour de vis de 39 milliards d'euros, qui a été accueilli dans la soirée à Madrid par un "cortège funèbre" de la mouvance des indignés, pour dénoncer "le budget de la faim et de la misère".
Dans un climat social très lourd, plombé par un chômage à plus de 25 %, une pauvreté galopante, des manifestations quotidiennes, ce budget vise à redresser les comptes publics du pays, quatrième économie de la zone euro, plongé dans la crise depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008. Une politique de la rigueur à outrance de plus en plus contestée par les économistes, perçue comme un frein à la reprise et dénoncée pour ses retombées sociales à long terme.
Déjà, toutes les organisations humanitaires s'alarment : 12,7 millions de personnes sont en danger de pauvreté dans ce pays de 47 millions d'habitants, selon une récente étude européenne. Un chiffre qui pourrait grimper à 18 millions, presque 40 % de la population, dans dix ans, affirme un rapport de plusieurs ONG, dont Oxfam, "si les politiques d'austérité et les coupes sociales ne sont pas corrigées".
"2012 a été l'année la plus difficile qu'il nous ait été donné de vivre", a admis cette semaine le chef du gouvernement de droite, Mariano Rajoy, qui, un an après son arrivée au pouvoir, ne parvient toujours pas à tirer les bénéfices de cette austérité draconienne. "2013 sera une année difficile, mais sera l'année de la stabilisation de notre économie", a-t-il promis.
BAISSE DES PRESTATIONS CHÔMAGE, DES BUDGETS DES MINISTÈRES...
L'année à venir pourtant s'annonce tout aussi sombre, alors que la sortie de la récession dans laquelle est plongée l'Espagne depuis un an se fait attendre : le gouvernement attend un recul du PIB de 0,5 % en 2013, après 1,5 % cette année. Mais l'OCDE prédit déjà une contraction de l'économie beaucoup plus nette, de 1,4 % en 2013.
La reprise est d'autant plus hypothétique que le budget 2013, voté par la droite qui dispose de la majorité absolue au Parlement, dénoncé comme "antisocial" par l'opposition socialiste, multiplie les coupes, dans le but de récupérer 39 milliards d'euros. Parmi les économies à réaliser, les prestations chômage baisseront de 6,3 %, tandis que l'Etat attend des rentrées fiscales supplémentaires, tirées notamment de la hausse de la TVA, pour 15 milliards d'euros.
Les budgets des ministères seront réduits en moyenne de 8,9 %, celui de l'industrie chutant de 21,3 %, celui de l'agriculture de 25,4 %, celui de l'éducation, de la culture et des sports de 17,2 %. Les régions, remises au pas après des années de dérive financière, sont mises à contribution, avec de lourdes répercussions sur les budgets de la santé et de l'éducation, qu'il leur revient de gérer en vertu de leur statut d'autonomie.
Les retraités eux aussi sont frappés : revenant sur une sacro-sainte promesse électorale, le gouvernement a brisé le tabou, décidant que les pensions seraient revalorisées moins que prévu. Ce budget entre dans le cadre d'un plan d'économies dicté à l'Espagne par l'Union européenne, prévoyant 150 milliards d'euros d'économies jusqu'en 2014, afin de réduire un déficit public qui a dérapé jusqu'à 9,4% du PIB en 2011.
"LES PROCHAINES COUPES SE FERONT À LA GUILLOTINE"
Des centaines de personnes ont défilé jeudi soir dans une ambiance tendue à Madrid, lors d'une "marche funèbre" pour dénoncer ce budget d'une rigueur historique. "Je suis indignée par la fraude qu'ils sont en train de commettre dans le secteur de la santé, et que sont en train de faire avec la justice, l'éducation et les salaires, dénonce Ana Hernandez, une fonctionnaire de 53 ans. Pour moi, ce n'est pas une crise, c'est une tromperie pour nous enlever les droits que nous avons gagnés", ajoute-t-elle.
Sifflant les passants pour qu'ils les rejoignent, vêtus de noir et portant des bougies pour certains, les manifestants ont traversé le centre de Madrid en direction du Congrès des députés, devenu ces derniers mois la cible de leur colère. "Les prochaines coupes se feront à la guillotine," criaient-ils. Ou encore "justice", "enterrons ce mauvais budget".