LEMONDE.FR avec Reuters et AFP | 13.02.12 | 08h51 • Mis à jour le 13.02.12 | 12h36
Les forces de Bachar Al-Assad ont repris, lundi 13 février, leurs bombardements sur la ville de Homs au lendemain du soutien explicite apporté à l'opposition par la Ligue arabe, qui a, en outre, proposé à l'ONU l'envoi d'une mission conjointe en Syrie.
Cet appel accentue la pression sur la Russie et la Chine, membres permanents du Conseil de sécurité dont le veto mis il y huit jours à une résolution appelant Bachar Al-Assad à renoncer à ses pouvoirs a été dénoncé par les pays arabes et occidentaux. La Russie étudie la proposition de la Ligue arabe, tout en jugeant qu'un cessez-le-feu est nécessaire avant l'envoi de soldats de maintien de la paix, a déclaré lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. "Pour déployer une force de maintien de la paix, il faut l'autorisation de la partie qui la reçoit", a-t-il dit, et "il faut quelque chose qui ressemble à un cessez-le-feu". De son côté, la Chine a déclaré soutenir les efforts de médiation de la Ligue arabe sans se prononcer explicitement sur l'envoi de casques bleus préconisé par l'organisation du Caire.
Le régime syrien est déterminé à "rétablir la sécurité" dans le pays, où il tente de mettre fin à onze mois de contestation, en dépit des décisions de la Ligue arabe de soutenir l'opposition et d'appeler à une mission de paix mixte avec l'ONU, a rapporté l'agence officielle Sana. "Cette décision et d'autres n'empêcheront pas le gouvernement syrien d'assumer ses responsabilités dans la protection de ses citoyens et le rétablissement de la sécurité et de la stabilité", a indiqué un responsable cité par l'agence. "La Syrie refuse les décisions [de la Ligue arabe] qui constituent une ingérence flagrante dans les affaires intérieures du pays et une atteinte à la souveraineté nationale", a affirmé le responsable syrien.
Le secrétaire au Foreign Office a déclaré lundi ne pas envisager que des troupes occidentales puissent intervenir "au sol" en Syrie dans le cadre d'une force de maintien de la paix, suivant la proposition faite par la Ligue arabe.
William Hague, en visite au Cap, a jugé que les casques bleus qui pourraient être engagés en territoire syrien devraient être originaires de pays non-occidentaux. "Je ne vois pas d'issue en Syrie avec la présence de soldats occidentaux sur le terrain, sous quelque forme que ce soit, y compris sous la forme d'une mission de maintien de la paix", a déclaré le chef de la diplomatie britannique.
23 MORTS DIMANCHE
D'après des opposants, les blindés pilonnent surtout deux grands faubourgs sunnites, Bab Amr dans la partie sud de la ville et Al-Waer dans la partie ouest, près de l'académie militaire. Selon eux, les bombardements ont fait 23 morts dimanche après une journée d'accalmie la veille. Le quartier d'Al-Waer, théâtre, pendant des mois, de manifestations hostiles au régime, est attaqué depuis plusieurs jours par des miliciens du régime, les chabbiha.
Selon un bilan des Nations unies fourni en décembre, la répression du mouvement de contestation a fait plus de 5 000 morts tandis que le régime impute les violences à des groupes "terroristes" soutenus par l'étranger. Dimanche, des soldats appuyés par des blindés ont lancé une offensive à Inchaat, quartier de Homs théâtre de plusieurs incursions des forces loyalistes au cours de la semaine écoulée. Des chars ont roulé sur des voitures civiles et des militaires ont mis à sac des habitations et brûlé des meubles au milieu des rues pour infliger une punition collective à la population, affirme la coalition Homs libre dans un communiqué. Il est difficile de vérifier les affirmations des deux camps car le régime limite de manière très stricte l'accès des journalistes au terrain.
Un convoi du Croissant-Rouge syrien a pu se rendre à Homs pour distribuer de la nourriture, des médicaments et des couvertures aux milliers d'habitants touchés par les violences, a annoncé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) dans un communiqué. "La population, en particulier les blessés et les malades, subit l'essentiel des violences", a déclaré Marianne Gasser, responsable du CICR à Damas. Des opposants affirment cependant que les équipes du Croissant-Rouge se sont rendues dans les quartiers peuplés d'alaouites, la communauté dont est issue la famille Al-Assad, mais pas dans les quartiers sunnites, les plus bombardés.
SOUTIEN À L'OPPOSITION
Des opposants ont profité dimanche d'une pause dans les bombardements pour manifester contre le régime dans les quartiers de Koussour, Bayada, Khalidoua et Bab Houd. Des manifestations ont été signalées à Houla, une localité voisine également bombardée. Des images postées sur YouTube montrent des centaines de jeunes se tenant par l'épaule et dansant sous des drapeaux vert et blanc, les couleurs de la Syrie, avant la prise de pouvoir du parti Baas en 1963. A Hama, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Homs, les forces loyalistes appuyées par des blindés ont pénétré dimanche dans des quartiers proches de la périphérie où l'armée syrienne libre a été active.
La Ligue arabe va fournir un soutien politique et matériel à l'opposition syrienne et demander au Conseil de sécurité la formation d'une force conjointe ONU-Ligue arabes pour mettre fin aux violences en Syrie, les militants dénonçant une grave crise humanitaire à Homs. L'organisation panarabe va "ouvrir des canaux de communication avec l'opposition syrienne et lui fournir toutes les formes de soutien politique et matériel", d'après le communiqué final d'une réunion des ministres des affaires étrangères arabes dimanche au Caire. Dans le même temps, elle "met fin à la mission" de ses observateurs en Syrie, dont le chef controversé, le général soudanais Mohammed Ahmed Moustapha Al-Dabi, avait annoncé quelques heures auparavant sa démission. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a indiqué dimanche à son homologue de la Ligue arabe qu'il reviendra au Conseil de sécurité de statuer sur les décisions prises par les ministres arabes au Caire, a indiqué son porte-parole Martin Nesirky dans un communiqué.
"Nous allons discuter de manière urgente avec la Ligue arabe et nos partenaires internationaux des propositions pour une force de maintien de la paix Ligue arabe-ONU", indique, lundi, le ministre des affaires étrangères britannique, William Hague.