Les divisions du « bloc progressiste » comme on disait jadis, le temps presque estival enfin de la journée d'hier, et les préoccupations liées à la campagne électorale ont considérablement réduit l'ampleur de la mobilisation des ex-travailleurs.
Le parti communiste KKE via son organisation syndicale PAME, avait choisi pour lieu de rassemblement (assez massif), l'aciérie en grève près du Pirée, les autres partis de gauche et les « grands syndicats », le centre ville. Quelques échauffourées à la fin, entre les policiers des unités prétoriennes des MAT (CRS) et les jeunes anarchistes et ensuite, des embouteillages dignes du vieux temps... à destination des plages.
Après tout, la mobilisation du monde du travail dans un monde sans travail, c'est peut-être aussi une préoccupation vidée de sens. Surtout que les grands syndicats (en Europe occidentale en tout cas), ont accompagné la fuite en avant dans la financiarisation effrénée du monde depuis trente ans, tout comme leur alter ego politique, à savoir la mouvance des sociaux-démocrates, dont « l'internationale » est toujours « dirigée » par le tout petit Georges Papandréou.
Sauf que les voyages accompagnés, arrivent aussi à destination un jour. Terminus la dette souveraine, tout le monde descend du train. C'est ainsi que la rame ne prendra plus de voyageurs. Tous virés, morts, chômeurs, précaires, et nouveaux Sisyphes du « monde interdépendant », cas d'étude pour les manuels de géographie scolaire. Interdépendants donc, quoi qu'il advienne, élections ou pas. Car gagner la bataille des élections, renversant les forces du Mémorandum, ou entravant déjà leur « gouvernance », ne serait qu'un début.
Le banquier Papadémos, faisant office de haut-parleur de la Troïka, vient de publier une liste contenant les nouvelles mesures de juin, indépendamment du vote, bien entendu. Ce mercredi, lors du dernier Conseil des ministres (Conseil d'administration), il présentera les « engagements » du prochain gouvernement. Quoi qu'il arrive. Il semble que nous assistons à l'avant dernière phase du coup d'État, en cours en Grèce depuis 2009. Les élections deviennent « inutiles » et ainsi annulées de fait. Et pourtant, les bancocrates ne sont guère rassurés.
Au Pasok, on découvre soudainement que « nous étions le laboratoire de l'Histoire » (Venizélos), et que « la Grèce était un cobaye » (Papandréou), car on sait, que former un gouvernement de pacotille (légalisé par le vote pourtant), n'est plus à la portée du dernier mensonge Pasokien ou de la Nouvelle Démocratie.
« Attendons encore un peu, et attendons toutes les suites, après les urnes, mais entre temps il faut survivre. J'irai voter contre le Mémorandum et contre l'Europe », rajoute Manos. Combien sont-ils comme lui ? Impossible à savoir, les sondeurs n'en savent gère davantage. D'où sans doute l'inquiétude du régime, « car on peut voter n'importe comment, mais pas, contre l'Europe », et toute la presse du régime s'y colle merveilleusement (par exemple To Vima : « Quel vote ? Pour ou contre l'Europe ?», par le juriste et universitaire Grigoris Kalfelis, 30/04/2012).
Au parti de la Gauche Démocratique de Fotis Kouvelis et de « l'européisme de gauche », on se déclare « opposé à la dénonciation du Mémorandum pratiquée par Syriza, car cette voie nous conduit tout droit hors de l'Europe, et nous à la Gauche Démocratique, nous voulons à tout prix que la Grèce reste dans la zone euro et dans l'Europe », (représentant de la Gauche Démocratique dans une émission à la radio real-fm, 02/05.2012).
Une voix inattendue et historiquement corrompue, venue enfin de très loin, exprimerait la même inquiétude : « Je crois que la Grèce a besoin de l'Europe, et c'est au sein de l'Europe que la Grèce retrouvera sa place, à égalité des autres pays », telle serait la déclaration écrite de Constantin II (de la dynastie des Glücksbourg), sixième et dernier roi des Hellènes, déposé par le référendum de novembre 1974, selon le site du quotidien Proto Thema.
L'Europe, voie (et voix) royale ?