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19 novembre 2011 6 19 /11 /novembre /2011 18:50
Régis Soubrouillard - Marianne | Samedi 19 Novembre 2011 à 12:01
Mario Monti a été officiellement intronisé jeudi président du conseil italien après un vote de confiance du sénat italien. Pour prouver son indépendance, cet ancien cadre de Goldman Sachs répète qu'il a été qualifié de «Saddam Hussein du business» pour avoir empêché des fusions de grands groupes. Au-delà du personnage c'est le gouvernement Monti composé de technocrates hors du jeu démocratique, considérés comme seuls capables d'appliquer les mesures qui s'imposent, qui pose question.



Un gage de sérieux ou la confiscation du pouvoir par des technocrates « éclairés » ? C’est la question qui se pose après la nomination des 17 ministres du gouvernement Monti en Italie. Sans que l’une des propositions ne soit nécessairement exclusive de l’autre. La composition du gouvernement a surtout des allures de cellule de crise. Le PDG d’une banque au développement économique, une avocate à la justice, une préfète à l’Intérieur, un amiral à la Défense, une économiste aux retraites, un ambassadeur aux affaires étrangères, un professeur d’histoire du christianisme à l’intégration, Andrea Riccardi, fondateur de la très influente Communauté de Sant'Egidio, institution de l'Église. Enfin, un ancien recteur à l’éducation. La dream team de la technocratie.

Des techniciens, véritables managers d'Etat, reconnus pour leurs compétences, qui ne se feront pas tirer l’oreille pour appliquer au plus vite les mesures d’austérité préconisées par les organisations mondiales et européennes.
Mais, précisément, c’est cette Europe de technocrates construite trop vite, à l’abri des peuples, caractérisée par la fuite en avant de l’élargissement, avec cet euro pour totem, qui s’effondrent sous nos yeux. Une Europe de technocrates auxquels les nations européennes apportaient jusque là précisément un peu de la légitimité politique que Bruxelles n’était jamais parvenue à obtenir.

Dès 2004, Marcel Gauchet pointait cette dérive dans un texte intitulé Le problème européen : « En se développant, l’Europe politique a changé de nature, d’une manière qui eût exigé de repenser son objet et les institutions adéquates à son dessein. En n’assumant pas cette transformation et en s’acharnant à enfermer le nouveau dans le corset de l’ancien, elle est devenue un carcan anti-politique, ne répondant à aucune des attentes que les peuples placent dans une communauté politique et secrétant la désorientation et l’anxiété ».

Gouvernement de technos: le symptôme d'une crise dans la crise
Les gouvernements Mario Monti, à Rome, et Lucas Papademos, à Athènes, ne font ainsi que rajouter de la technocratie à la technocratie poussant la logique post-démocratique européenne à son paroxysme. Et l‘union européenne devient toujours un peu plus étrangère aux citoyens qui la composent.

Sur son blog, l‘essayiste belge Charles Bricman
fait ainsi remarquer que « l’arrivée au pouvoir des technocrates a les couleurs d’un contresens: nous venons d’un monde de nations politiques, théoriquement démocratiques, qui pour éviter de continuer à se détruire mutuellement dans des guerres barbares, ont fondé une agence intergouvernementale et concrètement technocratique qu’on appelle l’Europe; un esprit simple comme le mien en déduit que l’étape suivante devrait normalement consister à donner à l’agence une assise démocratique lui permettant de légitimer les limitations qu’elle impose aux anciennes souverainetés nationales; au lieu de quoi c’est l’inverse qui se produit: la prise du pouvoir au sein des anciennes nations par les technocrates de l’agence. Ce n’est pas seulement une faute de goût. C’est la cause première d’une crise qui vient dans la Crise et qui pourrait tout aussi bien nous ramener un siècle au moins en arrière, un peu avant août quatorze ». 

Quoi de plus normal après tout que d’appler les technos à la rescousse en temps de crise. Déjà le concept même de crise est une invention technocratique. De ces mots magiques brandis à tout va (crise financière, crise écologique, crise alimentaire) qui permettent à la technocratie de fuir ses responsabilités, nier ses errances, échapper à ses faillites, d’ignorer son incapacité à apporter des réponses aux évolutions du monde et de s’adapter ou résister au réel. Qu’est-ce qu’une crise sinon un imprévu, une révolution, l’aveu d’une impuissance face à un monde en évolution permanente. Rien à voir avec la notion immédiate de catastrophe auquel on associe le terme aujourd’hui. Etymologiquement, une crise n’est qu’une « décision ».  Ses conséquences pourront en revanche être terribles.

Gouverner sans les politiques, un rêve de technocrate
Après le premier krach de 2008, la plupart des élites européennes ont cherché à se rassurer, ne voyant là qu’une réédition de la crise de 1929, cherchant, dès lors, en toute logique, à appliquer les mêmes recettes qu’à l’époque de la crise des années 30. Patatras ! Les plans de relance ont fait long feu. Pis, croyant éteindre l'incendie, ils n’ont fait que l’attiser un peu plus.

Economiste formé aux Etats-Unis, passé par l’école Goldman Sachs, commissaire européen pendant dix ans, Mario Monti fait figure de casting idéal en ces temps tourmentés pour appliquer « les mesures qui s’imposent ». L’absence de représentants des partis « facilitera plutôt l’action gouvernementale » a lâché l’intéressé au moment de sa prise de fonction. Un lapsus politique qui vaut son pesant d’or. Les politiques envisagés comme des empêcheurs de gouverner en rond. Autant dire que la politique est un obstacle à l’exercice de la démocratie…

C’est là une des vertus de cette fameuse crise que de révéler toujours un peu plus les vices cachés de la construction européenne. Depuis sa fondation, la règle tacite en Europe est que moins le processus est influencé par la politique, plus grande sera la légitimité des technocrates.

Est-ce pour autant le bon moment pour rendre aux technocrates les clés de la maison Europe ? La crise financière n’ouvrait-elle pas une fenêtre de tir pour un retour en force des politiques au cœur du système.  Sans doute. Les politiques mais quels politiques ? Pour quelle politique ? Les politiques au pouvoir n'ont jamais montré leur capacité à mettre en oeuvre une vision européenne ambitieuse et mobilisatrice, pas plus que leur capacité à émanciper le projet européen d'un économisme désincarné.

Berlusconi applaudit des deux mains
On pourra se désoler de voir que le départ de Berlusconi doit plus aux pressions du FMI qu’à un désaveu du peuple italien, et nous ne verserons pas de larmes de crocodiles sur la figure d’Il Cavaliere. Mais cette victoire des technos ne signe qu’un nouvel échec majeur des politiques.

Déjà au niveau européen, les citoyens assistaient immobiles à un processus qui échappait à toute sanction. Ce sont désormais les gouvernements nationaux qui échappent à la sanction électorale.

Lorsque les gouvernements prennent des décisions ; si elles sont mauvaises ils en payent le prix. Le gouvernement Monti échappe à cette confrontation avec les électeurs, à la concurrence avec les autres partis. Le risque zéro. Un hors jeu démocratique le temps de faire le sale boulot. En Italie, la classe politique a vite compris tout l’intérêt qu’elle avait à ne pas taper trop fort sur le nouveau venu , affichant un soutien quasi-unanime au gouvernement.   Le gouvernement Monti a obtenu un vote de confiance historique au Sénat italien avec 281 voix sur 307.

Interrogé, Silvio Berlusconi a concédé : « Nous sommes entre de bonnes mains ». Des mains expertes et une bénédiction aux allures d’épitaphe pour tout le peuple italien.
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