Correspondance, Roumanie
Ce matin 8 décembre au réveil, les nouvelles de Roumanie sont mauvaises. Malgré le communiqué de presse de Chevron, datant d’hier à 14 heures, annonçant la suspension de ses travaux sur le site, la police anti-émeute roumaine a terrorisé la population de Pungesti durant la nuit, comme en témoignent des personnes présentes sur place.
« La terreur s’est installée à Pungesti et dans toute la Roumanie avec les opérations de Fracking de Chevron. C’est une véritable guerre que Chevron a déclaré au peuple roumain, soutenu par le gouvernement de notre pays qui recourt à la police anti-émeute, branche lourde et brutale de la police militarisée.
Dans un pays où les droits de propriété sont manifestement violés, la liberté d’expression bafouée, le droit à la libre circulation entravé, nous avons désespérément besoin de la solidarité internationale !
Hier, le 7 décembre, nous avons connu un jour de guerre, peu médiatisé ni débattu dans les médias roumains, ce qui n’est pas une surprise.
Dans un premier temps, les gens qui s’étaient réunis à Pungesti pour envoyer un message fort à Chevron et au gouvernement roumain, qui a tout fait pour imposer le projet de fracturation hydraulique de Chevron, ont fait tomber en l’arrachant la clôture entourant le terrain - où Chevron a commencé à ériger sa première plate-forme sur le territoire roumain de manière abusive et malgré la forte opposition locale. Vingt personnes ont été arrêtées, d’autres blessées dans les échauffourées qui ont suivi ces arrestations, en particulier lors de tentatives de libération des personnes arrêtées sans ménagement.
Voir :
Le camp a été entièrement évacué et détruit par la police anti-émeute pour cause d’insalubrité ! Ils ont accusé les gens de possession d’armes blanches (ce qui est totalement faux) et de matériaux inflammables. Or dans le camp, il n’y avait que du gaz pour la génératrice d’énergie.
La police a attendu que la nuit tombe pour envoyer ses troupes dans les maisons du village à la recherche d’hôtes (pas de réels activistes, souvent de simples citoyens venus par solidarité en soutien aux habitants de ce Pungsti), ils ont tabassé ces gens dans leur propre cour, sont entrés dans leurs maisons et ont fait payer des amendes à ceux qui accueillaient des personnes étrangères au village, pendant que tout le monde se cachait apeuré dans les maisons, lumières éteintes et chuchotant dans l’obscurité.
Auparavant, en fin de journée, les policiers anti-émeute ont prétexté sans preuves que les manifestants avaient jeté des pierres sur un de leurs camions pour intervenir brutalement : ils sont arrivé au magasin local où les personnes expulsées du camp s’étaient réunies, et ont emmené et battu violemment certains des dirigeants du mouvement politique et environnemental qui voit le jour en ce moment en Roumanie, arrivés depuis peu. L’appareil photo de l’un d’eux a été cassé. Onze personnes ont été arrêtées. Des dossiers pénaux seront ouverts pour beaucoup d’entre eux, et ils sont condamnés à 29 jours d’incarcération, comme s’il s’agissait de vrais criminels, contrairement à ce qui s’est passé jusqu’à maintenant. Les dirigeants du camp ont clairement été ciblés.
Dans le même temps, à Bucarest, des centaines de personnes envahissaient les rues en solidarité avec Pungesti. Elles ont tout de suite été condamnées par la police anti-émeute à payer une amende, et les forces de l’ordre ont essayé de dégager les manifestants de là en utilisant la violence. Toute protestation est donc muselée, quel que soit le type de protestation, toute résistance de la population roumaine brutalement réprimée.
Nous soulignons qu’il ne s’agit pas d’une situation locale, que le pays tout entier soutient Pungesti ! Ce que la dictature roumaine veut faire à Pungesti, c’est obtenir une vitrine de la répression, permettant, par l’exemple, d’ouvrir la voie à d’autres projets dans tout le pays.
Le camp de Pungesti doit résister et il résistera. Aidez-nous et soutenez cette résistance. Faites savoir au monde que les Roumains s’opposent à la fracturation hydraulique et qu’ils souhaitent que leur exemple inspire chacun à faire de même.
Aujourd’hui 8 décembre, de vastes protestations sont prévues en Roumanie. Une répression massive par la police anti-émeute est prévue pour empêcher nos protestations. Ce sera ainsi cette fois encore, mais la situation s’aggrave et le désespoir de ne plus parvenir à nous bâillonner s’installe.
La guerre se poursuit et nous avons besoin d’aide sur place pour affronter cette situation désespérée.
De fait, la situation à Pungesti n’est pas prête de toucher au dénouement : après le communiqué de presse de Chevron, annonçant samedi 7 décembre sa décision de suspendre ses activités à Pungesti, on apprend le 8 décembre, selon une information parue sur le site roumain Realitatea.net que Chevron reprenait ses travaux en utilisant des technologies conventionnelles.
"Notre priorité est de mener des activités de manière sécurisée et respectueuse de l’environnement. Nous respectons le droit des individus à exprimer leurs points de vue, mais nous pensons qu’ils doit être exercé dans les limites de la loi », a déclaré la compagnie. Les clôtures que les manifestants avait fait tomber sur le sol samedi ont été réinstallées. Des témoins annoncent que les opposants ont décidé d’organiser une autre manifestation dans un village voisin de Pungesti, Armăşoaia. Les gendarmes bloquent toujours l’accès à la terre actuellement louée par Chevron.
Les opposants à ce projet qui cristallise le ras-le-bol des citoyens roumains, considèrent cette dernière déclaration de l’entreprise américaine comme une réelle déclaration de guerre.
Complément d’info : Dépêche (en anglais) de l’agence Reuters, datant du samedi 7.
Pour soutenir les habitants de Pungesti, pétition en
ligne ici.