LE MONDE | 27.04.2012 à 14h54 • Mis à jour le 27.04.2012 à 15h13
Par Service Economie
Frappés par la crise, plusieurs grands groupes envisageraient de fermer des usines ou des services en France après les élections présidentielle et législatives. Tour d'horizon de ces "points chauds".
Eclairage : "Plans sociaux en série pour l'après-élection" (abonnés)
Automobile Plusieurs usines automobiles sont au coeur des interrogations. Les syndicats de Renault craignent la concurrence du nouveau site de Tanger pour l'avenir des salariés français, notamment ceux de Maubeuge, et de Douai, département du Nord, qui fabriquent les Scenic et Kangoo, potentiellement menacés par les véhicules produits au Maroc.
Deux sites de PSA Peugeot Citroën sont aussi sur la sellette. Le premier, à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), est menacé de fermeture à la fin de la production de l'actuelle C3 de Citroën, prévue en 2014. La direction de PSA refuse de s'engager sur l'après-2014, malgré la mobilisation importante des syndicats de ce site de 3 000 salariés. L'avenir de l'usine de Sevelnord, à Valenciennes (Nord), semble moins problématique. Après 2017, Fiat, qui la gère avec PSA, doit en effet se retirer. Selon les syndicats, Toyota pourrait remplacer l'Italien, mais la direction refuse pour l'instant de le confirmer.
Transports La compagnie aérienne d'Air France, à l'origine de la plus grande part des pertes d'Air France-KLM, a gelé les embauches et les salaires, et commencé avec les syndicats des négociations sur la révision des conventions sur les conditions de travail. Fin juin, le groupe doit présenter la deuxième phase d'un plan de transformation, qui ne devrait pas être accompagnée d'un plan social, laisse filtrer pour l'instant la direction.
Dans le ferroviaire, Novatrans, la filiale de transport combiné rail-route de la SNCF, fortement déficitaire, pourrait mettre la clé sous la porte : 260 salariés sont dans l'expectative.
Enfin, après SeaFrance, liquidé début janvier, l'avenir de la compagnie maritime Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM) est en question. Privée par la justice d'un contrat avec la Collectivité territoriale de Corse, cette filiale de Veolia de 2 000 salariés menace de supprimer 800 emplois.
Finance Touchés de plein fouet par la crise de la dette en zone euro et le ralentissement économique, contraints par les régulateurs à renforcer leurs capitaux propres, les banques et les assureurs français ont déjà annoncé leur intention de supprimer 7 200 emplois, dont 2 500 en France, dans les mois à venir, sur une ou plusieurs années. La plupart de ces plans, centrés sur les activités de banque d'investissement, les plus coûteuses en capital, s'engagent tout juste dans l'Hexagone, comme au Crédit agricole (- 2 350 emplois), à la Société générale (- 1 500), et chez BNP Paribas (- 1 400).
Du côté des assureurs, le numéro un Axa va supprimer 1 600 postes en Allemagne d'ici à 2015, pour améliorer sa compétitivité. Malgré ses difficultés, le mutualiste Groupama récuse, pour l'instant, toute idée de plan social. Enfin, le secteur du crédit à la consommation, en chute libre du fait de la crise, devrait réduire ses effectifs : déjà, Cofinoga a annoncé 433 suppressions d'emplois.
Pharmacie Le Leem, le syndicat des industriels du médicament, qui fédère 270 entreprises, s'attend à des pertes d'emplois dans la visite médicale comme dans la production en 2012 et en 2013. Chez Sanofi, si "aucun licenciement" n'est prévu, selon la direction, les syndicats alertent de l'imminence d'un deuxième plan d'économie, avec "des décisions sur l'emploi" prévues après les élections.
Télécommunications Jean-Ludovic Silicani, le président de l'Autorité de régulation des télécommunications (Arcep), a déclaré, le 23 mars, que l'entrée de Free sur le marché de la téléphonie mobile est susceptible d'entraîner la disparition de 10 000 emplois chez ses concurrents. Chez France Télécom, on s'attend à de nombreux départs à la retraite à partir d'octobre 2012, ce qui devrait permettre à la direction de réduire la voilure sans passer par un plan social. De son côté, le syndicat patronal des centres d'appel SP2C estime que l'arrivée de Free "menace jusqu'à 10 000 emplois" dans le secteur de la "relation client à distance".
Technicolor (ex-Thomson) a lancé fin 2011 un plan de réduction de ses effectifs en Europe avec 600 suppressions de postes, dont 125 en France. Le groupe souhaite également se séparer de son dernier site de production français, situé à Angers (350 salariés), qui fabrique des décodeurs.
Sidérurgie Hautement symbolique, le sort de l'aciérie ArcelorMittal de Florange (Moselle) n'est toujours pas réglé. Les deux haut-fourneaux du site, où sont employées environ 600 personnes, sont à l'arrêt depuis juin et octobre 2011. Mi-mai, la direction du groupe doit décider si elle les redémarre où si elle prolonge leur mise en sommeil pour au moins le troisième trimestre. Mais les syndicats craignent qu'une fermeture définitive soit déjà actée.
Malgré un prix renégocié à la hausse avec EDF, l'usine Rio Tinto Alcan (RTA, ex-Péchiney) de Saint-Jean-de-Maurienne (Savoie), est toujours susceptible d'être cédée par son propriétaire. En jeu, l'avenir de 600 salariés, et 2 200 emplois indirects.
Nucléaire Areva traverse une passe très difficile, accentuée par l'accident de la centrale japonaise de Fukushima, qui a entraîné un ralentissement de l'activité de la filière nucléaire. Le gouvernement sortant avait interdit à son patron, Luc Oursel, de réduire les effectifs en France (28 000 salariés sur 48 000), alors que certaines sources indiquaient sa volonté de supprimer un millier d'emplois dans le cadre de son "plan d'action stratégique". Pour l'heure, il s'est contenté de geler les embauches dans l'administration.
Médias Le premier acteur de la distribution de la presse, Presstalis (ex-NMPP), est au bord du dépôt de bilan. Le médiateur du crédit, Gérard Rameix, a remis cette semaine à Matignon des préconisations pour maintenir à flot la trésorerie dans les semaines à venir. L'entreprise a besoin de 170 millions d'euros pour se restructurer et faire partir 800 à 1 000 salariés sur 2 500. Ceux-ci appartiennent pour la plupart au SGLCE, la branche dure du Syndicat du livre. Autant dire qu'il y a un vrai risque de blocage de la distribution de la presse en cas de conflit social. Certains journaux ne s'en relèveraient pas.
Distribution Le PDG de Carrefour, Lars Olofsson, a annoncé, fin mars, le gel "jusqu'à nouvel ordre" des embauches "au sein de tous les sièges en France". D'après la CFDT, la direction continue de réduire les effectifs "de façon anarchique" (départs naturels non compensés, licenciements pour inaptitude...). Pour les mois à venir, les syndicats s'attendent à des mesures drastiques, d'autant que le successeur de M. Olofsson, Georges Plassat, qui doit entrer en fonction en juin, a la réputation d'être un redoutable cost killer (tueur de coûts).
Agroalimentaire L'avenir de l'usine Fralib de Gémenos (Bouches-du-Rhône) est toujours flou. En septembre 2010, la multinationale Unilever annonçait la fermeture de ce site, qui conditionne le thé Lipton et les infusions Eléphant, pour en délocaliser la production en Pologne et en Belgique. Dix-huit mois et deux plans sociaux plus tard, les 103 salariés sont toujours là. Pour combien de temps ? Le 20 avril, les employés ont été déboutés de leur demande d'annulation du troisième plan social par le tribunal de grande instance de Marseille.
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