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12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 18:33
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François Hollande l'a déclaré le 10 décembre lors d'un déplacement à Oslo : « La crise de la zone euro, je l'ai déjà dit, elle est derrière nous. (…) Et donc tout ce que nous avons à faire, ce n'est plus simplement de sortir de la crise de la zone euro : c'est fait. » Le président français a-t-il pêché par optimisme, sous le coup du prix Nobel de la paix que les dirigeants européens venaient de recevoir ?

Dans un entretien publié en début de semaine sur Mediapart, qui tranche avec l'analyse de l'exécutif français, l'économiste André Orléan rappelait à quel point les incertitudes pesant sur l'avenir de la zone euro restaient vives, en cette année 2013. Au même moment, Eurostat a publié des chiffres une fois de plus alarmants, avec un taux de chômage historique, à 11,8 % dans la zone euro, pour le mois de novembre dernier.

Même le commissaire européen à l'emploi et aux affaires sociales, le socialiste Laszlo Andor, y est allé de son analyse sinistre, le 8 janvier : « Vous n’avez pas besoin de me dire que 2012 était une autre très mauvaise année. Après cinq ans de crise, la récession est de retour et le chômage a atteint des niveaux inconnus depuis deux décennies». Avant de prévenir: «Il est peu probable que l’Europe voie sa situation s’améliorer en 2013. »

Pour faire le point sur le marasme social qui plombe l'Europe, et les pistes pour en sortir, nous nous sommes entretenus avec Raymond Torres, qui dirige l'Institut international d'études sociales, le centre de recherche de l'Organisation internationale du travail (OIT), à Genève. Adversaire de l'austérité, il dresse un tableau critique des remèdes proposés par la commission européenne, pour contrer la flambée du chômage, et estime que les pays du Nord de l'Europe, contrairement à ce qu'il est souvent dit, ne sont pas épargnés.

Quelle est la situation de l'emploi en Europe, cinq ans après l'éclatement de la crise aux États-Unis ?

 

 
© OIT

 

Elle est préoccupante dans l'ensemble de l'Union européenne, et plus particulièrement dans la zone euro. Les pays sont touchés à des degrés divers, avec une situation particulièrement difficile dans l'Europe du Sud. Le taux de chômage au troisième trimestre de 2012 a atteint 24,6 % en Grèce et 25 % en Espagne, soit plus de 16 points de plus qu’avant la crise.

Mais la tendance est à la détérioration même dans les pays jusqu’ici peu touchés. Depuis octobre dernier, le taux de chômage est reparti à la hausse en Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas. Il est faux de dire que la crise est un problème réservé à certains pays dans le Sud de l'Europe et que par conséquent seuls ces pays-là devraient adopter des mesures : la crise fait tache d’huile.

Etes-vous tout de même d'accord pour dire que le fossé entre pays du Nord de l'Europe et pays du Sud est en train de s'aggraver ?
Les trois pays les plus frappés sont effectivement au Sud : Espagne, Portugal et Grèce. L'Italie connaît une augmentation plus lente de son taux de chômage. La France elle aussi enregistre une détérioration régulière. En Irlande, la situation est très difficile, même si elle tend à se stabiliser depuis peu. Au Royaume-Uni, la situation est contrastée : le taux de chômage a légèrement diminué ces derniers mois, mais c'est surtout grâce à un développement du temps partiel non choisi, et à la baisse du taux de participation (c'est-à-dire que de plus en plus de personnes quittent le marché du travail – ndlr).

 

Qu'en est-il du chômage de longue durée ?
La caractéristique de cette crise, ce ne sont pas tant les vagues de licenciements, qui existent, mais qui sont relativement peu nombreuses, par rapport à d'autres périodes de crise. A l'exception de cas très particuliers – par exemple le secteur immobilier en Espagne, ou le secteur bancaire au Royaume-Uni. Cette crise est d'abord marquée par l'absence de créations d'emplois. Conséquence: c'est particulièrement difficile pour ceux qui cherchent un premier emploi (les jeunes), et bien sûr pour ceux qui étaient déjà chômeurs avant que la crise n'éclate. Ils deviennent alors massivement des chômeurs de longue durée.

À Bruxelles, la commission européenne propose, pour lutter contre l'envolée du chômage, de réformer le marché du travail. De ce point de vue, l'Espagne, avec ses réformes à répétition du droit du travail, fait figure de modèle. Qu'en pensez-vous ?
Il est désormais établi qu'une politique d'austérité, combinée à la réforme du marché du travail, ne permet pas de sortir de la crise. En tout cas, cela ne s'est pas vérifié une seule fois depuis deux ans. Dans un contexte de récession tel que nous le connaissons, une réforme du marché du travail ne peut pas marcher.

 

Pire, en facilitant les licenciements, les réformes du marché du travail en Espagne, en Grèce ou au Portugal ont accéléré les pertes d’emplois sans pour autant stimuler les embauches. Ces réformes s’inspirent de théories selon lesquelles les employeurs seront moins réticents à embaucher, parce qu'il leur sera plus simple de licencier par la suite. Mais ces théories ne fonctionnent pas dans un contexte récessif. Elles ne permettent pas de créer des emplois et se traduisent par moins de sécurité pour ceux qui en ont un.    

Je signale au passage que l'Autriche a mené, en 2003, l'une des réformes du marché du travail les plus novatrices. Cette réforme, conclue avec l’assentiment des partenaires sociaux, combine des éléments de sécurité pour les travailleurs, et de prévisibilité, pour les employeurs, en ce qui concerne les coûts des licenciements. Aujourd'hui en Autriche, le taux de chômage est faible et on trouve peu de contrats précaires.

La commission européenne milite également pour alléger le coût du travail pour les entreprises. Est-ce une piste sérieuse ?
C'est vrai que la fiscalité qui pèse sur le travail est trop élevée dans certains pays. Je pense à certains pays d'Europe de l'Est, comme la Hongrie, à la France ou, dans une certaine mesure, à l'Allemagne et l'Italie. Je peux comprendre que l'on décide de s'attaquer à ce déséquilibre structurel, pour faire davantage peser la fiscalité sur les revenus de la rente. Mais à court terme, pour l'emploi, cela ne produit que peu d’effet, pour autant que la croissance et donc la création d’emplois restent anémique.  

Que propose le BIT ?

Il faut sortir de cette logique d'austérité. Bien sûr qu'il est nécessaire, à moyen terme, de réduire les déficits publics. Mais tout dépend du rythme et du type de mesures adoptées pour réduire ces déficits. Nous proposons de maintenir, et même renforcer, les dépenses publiques pour l'emploi. Face au chômage des jeunes par exemple, nous défendons des “garanties d'activation”. Cela recouvre une batterie de solutions : de l'aide renforcée pour rechercher un travail, l'accès à un emploi aidé pour les jeunes les plus en difficulté, proposer de combiner la sortie d'école avec une expérience en entreprise, et même, pour certains qui ne seraient pas assez formés, le retour vers le système éducatif.

 

Vous avez budgété ces « garanties »?
Nous les chiffrons à 21 milliards d'euros pour l'ensemble de la zone euro. C'est un coût, mais on peut par exemple le financer par un redéploiement des fonds structurels européens, qui ne sont pas tous correctement utilisés. J'insiste : ce n'est pas une utopie. C'est ce que la Suède a fait après avoir subi une grave crise financière du début des années 90, et cela a marché.

Et pour les chômeurs longue durée ?
Beaucoup de ces chômeurs arrivent en fin de droits. Il faut absolument prolonger les droits de ces chômeurs, tout en s’assurant bien entendu qu'ils cherchent effectivement du travail. En Italie par exemple, il n'y a plus aucune aide financière, passés 12 mois au chômage. Or, dans un contexte de crise caractérisé par une faible création d’emplois, le fait de maintenir la prestation ne dissuadera par les chômeurs de prendre un emploi pour autant qu’ils le trouvent.

En d’autres termes, il y a peu de chances que, comme certains le pensent, les chômeurs profitent abusivement du système d'aides publiques. Là encore, cela a un coût budgétaire, mais qui sera toujours très inférieur, par exemple, à celui d'une baisse ciblée de la TVA. Par ailleurs, il y va de la cohésion sociale.

 

Le commissaire Laszlo Andor à Bruxelles le 8 janvier. 
Le commissaire Laszlo Andor à Bruxelles le 8 janvier.


D'autres pistes?
Il faut également une politique de relance salariale. Actuellement, une pression à la baisse se fait sentir dans beaucoup de pays européens, au nom de la compétitivité, pour doper les exportations. Mais si tous les pays vont dans ce sens, il n'y a plus personne pour importer… On va dans l'impasse. Il faut donc que les pays qui ont connu une situation confortable de leurs comptes extérieurs réfléchissent à relever leurs salaires en parallèle avec les gains de productivité. Cela s'est déjà vu ces derniers mois dans certains secteurs, en Allemagne. Et c’est un pas dans la bonne direction.

Par ailleurs, pour que la création d’emploi reprenne, il est fondamental d’assainir le système financier et de s’assurer qu’il joue son rôle d’intermédiation entre épargne et investissement productif. La situation actuelle est moins grave pour les grandes entreprises, qui peuvent se financer directement sur les marchés de capitaux, que pour les petites. Celles-ci dépendent du crédit bancaire et les banques sont frileuses ou, dans certains cas, elles font davantage de profits en plaçant les dépôts sur des actifs financiers.

Une idée est de créer des banques publiques d'investissement pour aider les PME à développer des projets et créer de l’emploi. A mon avis, l'une des raisons pour lesquelles l'économie allemande va bien, et dont on parle peu, c'est son système de garanties des prêts aux petites entreprises. L'État se porte en partie garant des prêts aux petites entreprises, et donc les banques s’engagent davantage vis-à-vis de celles-ci. D’où aussi leur succès à l’exportation.

 

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