Marianne - Vincent Drezet - Chroniqueur associé | Samedi 17 Décembre 2011 à 12:01 |
C’est oublier que de longue date, le financement de la dette publique a mis les États sous la dépendance des marchés financiers dont la crise a montré l’irrationalité et la dangerosité (l’activité spéculative et la vision court-termiste sont déstabilisateurs) : cette dépendance se paie au prix fort via les taux d’intérêt dont les variations, notamment à la hausse, alimentent les déficits publics.
C’est également oublier l’impact de la crise qui, à l’origine, n’est pas une crise de la dette publique mais une crise de la financiarisation de l’économie. Par suite, l'intervention de l'action publique pour soutenir l’activité économique et la baisse des recettes provoquée par la crise ont fait exploser les déficits publics. C’est oublier enfin le coût des allègements fiscaux qui ont creusé les déficits publics, donc la dette (la somme des déficits passés non remboursés).
Il n'est pas inutile de revenir un instant sur ce point. Les allègements fiscaux ont en effet été nombreux, notamment durant les années 2000. Justifiés au nom de l'adaptation à la mondialisation et à la concurrence fiscale, ils ont surtout été coûteux pour les finances publiques sans que personne ne puisse démontrer leur efficacité en termes économiques.
Elles ont été particulièrement coûteuses et se sont ajoutées les unes aux autres : il est instructif de mesurer ce qu'aurait rapporté l'IR si l'on avait tout simplement maintenu le barème de 1999 au cours des années 2000 à 2011. Ce rendement théorique, autrement dit le manque à gagner global cumulé de des baisses des taux du barème de l'IR, s'élève à 160 milliards d'euros (compte tenu de l'inflation). Ce manque à gagner pèse lourdement dans la dette publique. Chaque année, ce sont ainsi environ 15 milliards d'euros qui manquent au budget de l’État.
Ces deux estimations (qui représentent à elles seules 10% de la dette publique actuelle) sont tirées des données des lois de règlement et des lois de finances. Elles ne tiennent pas compte des allègements d'autres impôts intervenus dans la même période : baisse de la TVA dans la restauration, exonération d'ISF dite « pacte d'actionnaires », exonération de certaines plus-values à l'impôt sur les sociétés etc. C'est dire si en réalité, le bilan budgétaire des allègements fiscaux des années 2000/2011 est largement supérieur à ces 180 milliards d’euros. De quoi poser la question de la politique budgétaire en d'autres termes...