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17 décembre 2011 6 17 /12 /décembre /2011 21:33

Marianne - Vincent Drezet - Chroniqueur associé | Samedi 17 Décembre 2011 à 12:01 |

 

Alors que l'origine de la dette fait débat, Vincent Drezet, secrétaire général du Syndicat national unifié des impôts, s'intéresse ici au poids des allègements fiscaux, justifiés au nom de l'adaptation à la mondialisation et à la concurrence fiscale. Ces allègements, note-il, ont surtout été coûteux pour les finances publiques sans que personne ne puisse démontrer leur efficacité en termes économiques.



L'origine de la dette fait l'objet de discussions passionnées. Oubliant d'une part que, contrairement à une idée reçue répandue, la part des dépenses de l’État baisse dans le produit intérieur brut (PIB) et, d'autre part, que les besoins en matière de protection sociale sont en hausse, le discours gouvernemental tente de culpabiliser les citoyens en les accusant d’avoir vécu au-dessus de leurs moyens pour mieux imposer son plan de rigueur.

C’est oublier que de longue date, le financement de la dette publique a mis les États sous la dépendance des marchés financiers dont la crise a montré l’irrationalité et la dangerosité (l’activité spéculative et la vision court-termiste sont déstabilisateurs) : cette dépendance se paie au prix fort via les taux d’intérêt dont les variations, notamment à la hausse, alimentent les déficits publics.

C’est également oublier l’impact de la crise qui, à l’origine, n’est pas une crise de la dette publique mais une crise de la financiarisation de l’économie. Par suite, l'intervention de l'action publique pour soutenir l’activité économique et la baisse des recettes provoquée par la crise ont fait exploser les déficits publics. C’est oublier enfin le coût des allègements fiscaux qui ont creusé les déficits publics, donc la dette (la somme des déficits passés non remboursés).

Il n'est pas inutile de revenir un instant sur ce point. Les allègements fiscaux ont en effet été nombreux, notamment durant les années 2000. Justifiés au nom de l'adaptation à la mondialisation et à la concurrence fiscale, ils ont surtout été coûteux pour les finances publiques sans que personne ne puisse démontrer leur efficacité en termes économiques.

Baisses de l'impôt sur le revenu (IR) : près de 160 milliards d'euros perdus sur 12 ans.
La France présente de longue date le niveau d'imposition des revenus le plus faible d'Europe (7,3% du PIB en moyenne, représentant la somme de l'IR et de la CSG, contre 9% en Europe en 2009) : c'est pourtant l'impôt sur le revenu qui a été déconstruit par l'accumulation de niches fiscales et la baisse des taux du barème. Ces baisses de taux, dont le bénéfice a été massivement concentré sur les contribuables les plus aisés, sont intervenues entre 2000 et 2007.

Elles ont été particulièrement coûteuses et se sont ajoutées les unes aux autres : il est instructif de mesurer ce qu'aurait rapporté l'IR si l'on avait tout simplement maintenu le barème de 1999 au cours des années 2000 à 2011. Ce rendement théorique, autrement dit le manque à  gagner global cumulé de des baisses des taux du barème de l'IR, s'élève à 160 milliards d'euros (compte tenu de l'inflation). Ce manque à gagner pèse lourdement dans la dette publique. Chaque année, ce sont ainsi environ 15 milliards d'euros qui manquent au budget de l’État.

Loi « tepa » d'août 2007 : 20 milliards d'euros perdus en 5 ans.
Parmi les nombreux allègements récents, ceux de la loi «tepa» sont également loin d'être anodins. Sur le strict plan des recettes fiscales (c'est-à-dire compte non tenu de l'exonération de cotisation sociales des heures supplémentaires, elle aussi loin d'être anodine puisque son coût est supérieur à 3 milliards d'euros par an), le manque à gagner cumulé de la loi «tepa» sur la période 2007/2011 s'élève à un peu plus de 20 milliards d'euros.

Ces deux estimations (qui représentent à elles seules 10% de la dette publique actuelle) sont tirées des données des lois de règlement et des lois de finances. Elles ne tiennent pas compte des allègements d'autres impôts intervenus dans la même période : baisse de la TVA dans la restauration, exonération d'ISF dite « pacte d'actionnaires », exonération de certaines plus-values à l'impôt sur les sociétés etc. C'est dire si en réalité, le bilan budgétaire des allègements fiscaux des années 2000/2011 est largement supérieur à ces 180 milliards d’euros. De quoi poser la question de la politique budgétaire en d'autres termes...
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