Le mouvement des Indignés américains se radicalise. Ceux d'Oakland, en Californie, appellent à la grève générale sur l'ensemble de la ville, pour le mercredi 2 novembre. Dans plusieurs villes, des vétérans de la guerre en Irak, en armes, ont rejoint les manifestants pour les protéger de la police.
« On se serait cru dans les années 1960, au milieu d’une manifestation contre la guerre du Vietnam », écrivait leNew York Times du jeudi 27 octobre, après la répression violente subie le mardi soir précédent par les Indignés d’Oakland. Gaz lacrymogènes et balles lestées (plusieurs balles minuscules regroupées dans une enveloppe en plastique) furent alors utilisées par la policepour les déloger de la place qu'ils occupaient au centre ville. Des affrontements très violents eurent ensuite lieu entre manifestants et policiers. Un vétéran de la guerre d’Irak a été grièvement blessé par une arme « non-létale » tirée par un policier, causant une vague d’émotion dans le pays. Le mercredi, 3 000 manifestants réoccupaient la place de la ville, avec l'aide de vétérans des Marines. Le jeudi soir, réunis en assemblée générale, ils lançaient cet appel à la grève générale à Oakland :
« Nous, occupants de la place Oscar Grant, proposons que le mercredi 2 novembre 2011, nous libérions Oakland et que nous mettions un coup d’arrêt au 1 %.
Nous proposons une grève générale sur l’ensemble de la ville et nous proposons que tous les étudiants quittent les cours. Au lieu que les travailleurs aillent au travail et les étudiants à l’école, les gens convergeront vers le centre-ville pour arrêter la ville. Toutes les banques et les grandes entreprises devront fermer pour la journée ou nous marcherons sur elles.
Bien que nous appellions à une grève générale, nous appelons aussi à bien plus. Les gens qui sont occupés en dehors de leurs quartiers, écoles, organisations communautaires, groupes affinitaires, lieux de travail et familles sont invités à s’auto-organiser d’une façon qui leur permette de prendre part à l’arrêt du fonctionnement de la ville, de la façon qui leur convient et comme ils le peuvent.
Le monde entier regarde Oakland. Montrons leur ce qui est possible. »
À l’image d’Oakland, les autorités d’autres villes américaines ont décidé de déloger les manifestants campant dans leur centre ville, comme à Nashville au Tennessee, où la police est intervenue à la demande du gouverneur républicain (36 arrestations). À Atlanta (Géorgie), la police a arrêté 50 manifestants, mercredi 26 octobre, indique le New York Times quiprédit un même scénario pour la ville de Providence (Rodhes-Island) et Baltimore (Maryland).
D'autres grandes villes, telles que New York, Boston, Philadelphie et Los Angeles, ont adopté une tactique moins brutale en autorisant les campements des Indignés. Là, les autorités parient sur l'essoufflement du mouvement ; ou sur le général Hiver, comme à New-York, où la brigade des sapeurs-pompiers a confisqué les groupes électrogènes et le combustible utilisés pour se chauffer par les Indignés retranchés dans le parc de Lower Manhattan, non loin de Wall Street... en prévision de la tempête de neige qui s'est abattu samedi matin sur la ville. « La neige ? Quelle neige ? Je dois m'occuper de mon pays », ont écrit des manifestants à l'entrée du campement balayé par des rafales de vents glaciales.
Depuis sa naissance à Wall Street, le 17 septembre dernier, le mouvement des Indignés américains n'a cessé de monter en puissance. C'est le soutien des principaux syndicats locaux qui a changé la donne . Dès le 27 septembre, 700 pilotes d'avion, qui se font des cheveux blancs pour leurs pensions de retraite ont rejoint le mouvement. Deux jours plus tard, c'était au tour du très influent syndicat du secteur des transports (64 000 adhérents) d'afficher son soutien, rejoint ensuite par le syndicat du secteur de la santé (300 000 adhérents).
À New York, par exemple, plus de 39 syndicats et associations ont manifesté avec les Indignés de Wall Street. Et il y a aussi le soutien des First Responders, les pompiers, policiers, sauveteurs, ouvriers et volontaires qui ont participé aux opérations de sauvetage et de déblaiement dans les ruines du World Trade Center après le 11-Septembre. Ils reprochent au gouvernement un manque de prise en charge des frais occasionnés par les maladies que beaucoup d'entre eux ont développées.
Maintenant, se sont des vétérans de l'armée, en uniforme militaire et puissamment armés, qui se déploient de leur propre initiative autour des cortèges, à Phoenix (Arizona) d'abord puis dans d'autres villes, pour sécuriser les manifestants contre de possibles attaques externes et contre les violences policières !
Le 23 octobre dernier, Noam Chomsky, intellectuel radical connu pour ses critiques de l'impérialisme américain et des médias, déclarait devant des milliers de personnes réunies à Boston, face au bâtiment de la banque de la réserve fédérale : « Ce mouvement est spectaculaire. C'est sans précédent. Je ne me souviens pas qu'il y ait jamais eu quelque chose comme ça. Si les associations qui ont lancé ces rassemblements peuvent tenir pendant une longue et dure période -parce que la victoire ne viendra pas rapidement- cela pourrait vraiment se révéler être un événement historique, un moment important de l'histoire américaine. »
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