Le Monde.fr | 06.07.2012 à 09h46 • Mis à jour le 06.07.2012 à 09h46
Par Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP), AC, APEIS, Génération précaire, Solidaires, Collectif Roosevelt 2012
Les 9 et 10 juillet se déroulera la conférence sociale, chargée de fixer l'agenda et le cadre des grandes réformes sociales du quinquennat qui s'ouvre : cette conférence est annoncée comme porteuse de réels changements. Car on se rappelle que le changement, c'est maintenant, et avec tous.
Tous les français seront concernés : salariés, employeurs, stagiaires, apprentis, auto-entrepreneurs, fonctionnaires, retraités, artisans et agriculteurs, et surtout, si l'on écoute les discours, les chômeurs et précaires, qui n'ont pas – ou si peu – d'emploi, de salaire, de retraite ou même de protection sociale.
Tous les français devraient donc être concertés. Mais au milieu du mouvement général qui s'impulse, un îlot de constance demeure, rassurant les uns dans leur conservatisme et désespérant les autres dans leur précarité. Les chômeurs et les précaires, dont on parlera d'une manière ou d'une autre à toutes les tables rondes de la conférence, n'auront aucun droit à la parole. Cas unique, mais permanent, dans le dialogue social en France, on discutera lutte contre le chômage et la précarité sans les chômeurs ni les précaires. Débuts peu prometteurs...
Envisagerait-on de réformer la politique familiale sans les organisations familiales ? Imaginerait-on de parler smic sans les syndicats de salarié ? Penserait-on à toucher aux universités sans les associations et syndicats étudiants ? Naturellement non. Et pourtant, on se satisfait très naturellement d'évoquer les minima sociaux ou de poser les bases des vastes changements à Pôle emploi sans interroger ni même consulter les représentants des chômeurs et des précaires.
Mais alors, les chômeurs ne seraient-ils pas des citoyens de plein droit ? N'auraient-ils aucune idée ni la moindre proposition ? Les précaires seraient-ils inaptes à la parole collective ? N'existerait-il enfin aucune organisation qui les regroupent et les défendent, et puissent porter leur expression ? Naturellement, oui. Les chômeurs et les précaires pensent, votent et s'expriment. Des organisations ont vocation à les regrouper, à les défendre, et portent leur expression, certaines depuis plus de vingt ans, pour faire entendre cette parole certes différente mais parfaitement légitime.
Les différentes organisations signataires entendent les arguments prétendument pragmatiques et autres appels à la patience. Ils ne sont plus admissibles, car ils reposent sur des principes surannés et une réalité dépassée voire oubliée. Mais surtout, ils nient la dignité collective des chômeurs et précaires, impatients de parole reconnue autant que d'emploi et de vie digne. On exige beaucoup des chômeurs, on soupçonne beaucoup les précaires, mais on refuse aux uns comme aux autres davantage encore de droits, dont l'un des premiers d'entre eux et qui ne coûte pas grand chose : le droit à l'expression.
Le renouvellement tranquille est un leurre et le courage ne se marie jamais avec l'immobilisme. Tout en notant un élargissement partiel à de nouveaux syndicats, nous appelons le nouveau gouvernement, promoteur déclaré d'un nouveau dialogue social, à convier, dans l'égalité, l'ensemble des acteurs réels et actifs du mouvement social à participer à la conférence sociale, au premier rang desquels figurent les chômeurs et les précaires.
Jacques-Henri Vandaele (MNCP) ; Joëlle Moreau (AC) ; Christiane Grave (APEIS) ; Ophélie Latil (Génération Précaire) ; Catherine Lebrun (Solidaires) ; Patrick Viveret (Collectif Roosevelt 2012).
Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP), AC, APEIS, Génération précaire, Solidaires, Collectif Roosevelt 2012