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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 12:38
Pierre Haski
Rue89 Rue89

 

Hasards du calendrier des sorties cinéma, deux films, l'un américain, l'autre français, s'intéressent simultanément à l'action politique dans ces deux pays en crise, et en campagne électorale. Et, de fait, au cynisme en politique. Idéalistes s'abstenir, émotions trop fortes.

« L'Exercice de l'Etat », de Pierre Schoeller, et « Les Marches du pouvoir » de George Clooney, qui sortent mercredi sur les écrans français, posent, chacun à sa manière et dans son contexte national, la question de l'engagement politique, de la frontière invisible entre compromis et compromissions, de la marge de manœuvre dont disposent réellement les dirigeants dans nos Etats complexes, et... en faillite.

Le film de Pierre Schoeller, qui était présenté dans la sélection Un certain regard à Cannes cette année, offre une problématique des plus actuelles. Dans une France dont « les caisses sont vides », Bercy veut privatiser les gares pour réduire le déficit, et se heurte à un ministre des Transports qui « refuse d'être le ministre de la privatisation des gares ».

 

 

Bande-annonce de « L'Exercice de l'Etat » de Pierre Schoeller

Les magouilles de coulisses menées par les groupes privés alléchés par la privatisation qui s'annonce, rendent vaine la « résistance » du ministre des Transport, qui s'illustre dans le passage ci-dessous.

 

 

Extrait de « L'Exercice de l'Etat » de Pierre Schoeller

Mais monsieur le ministre, alias l'acteur Olivier Gourmet, doit penser à sa carrière politique prometteuse, doit se trouver un parachutage dans une circonscription gagnable quitte à éjecter le local de l'étape, gérer sa com... Bref, il finit par se coucher.

« L'Etat est une vieille godasse pourrie qui prend l'eau »

Mais le personnage le plus intéressant est le « dir cab », le directeur de cabinet du ministre, magnifiquement incarné par Michel Blanc, grand commis de l'Etat qui récite son Malraux par cœur (« Entre ici Jean Moulin... ») pour raffermir son sens du devoir et son abnégation au service d'un homme... qui finit par le décevoir.

Le dialogue-clé du film oppose deux camarades de promo, Michel Blanc et un autre dir cab qui jette l'éponge et part « pantoufler » dans le privé, car, dit-il :

« L'Etat est une vieille godasse pourrie qui prend l'eau de toutes parts. »

Pierre Schoeller a réussi sa plongée au cœur de l'appareil d'Etat, entre lambris dorés et trains de vie fastueux, grandeurs et servitudes de l'action publique, grandes ambitions et petits calculs, et, surtout, l'ampleur des freins à l'action dans un système lancé à toute vitesse sans trop savoir où il va.

Autre pays, même cynisme

George Clooney, coscénariste, réalisateur, et acteur vedette de son propre film, a choisi de placer son action plus en amont par rapport au film français : au cœur des primaires qui précèdent l'élection du Président, une course de fond (et de fonds) éprouvante pour le candidat et son équipe.

 

 

Bande-annonce des « Marches du pouvoir » de George Clooney

L'homme-clé, comme dans « L'Exercice de l'Etat », est le bras droit de l'homme politique, en l'occurrence son directeur de campagne. Il doit tout savoir, tout contrôler, tout manipuler, y compris son propre boss, et la moindre erreur peut lui être fatale.

L'intrigue est simple, en partie inspirée d'une campagne bien réelle, celle du démocrate Howard Dean qui s'est terminée par un échec en 2004, et qui avait déjà inspiré une pièce de théâtre, « Farragut North », de Beau Willimon.

Tous les ingrédients de la politique américaine sont présents : le sexe (« ne pas baiser avec les stagiaires »), l'argent qui corrompt, les égos surdimensionnés, et la course aux « grands électeurs » qui font au bout du compte la décision lors des conventions de chacun des deux principaux partis, et dont l'obtention nécessite parfois de sérieux compromis avec les principes.

Jusqu'à l'écœurement

Difficile de sortir de ces deux films, excellents thrillers menés à grand rythme, sans un goût amer. Dans les deux cas, c'est la crédibilité de la parole politique qui en prend un coup, au risque de l'écœurement.

Dans les deux films, les principes qui guident l'engagement du personnage central – le ministre en France, le candidat aux Etats-Unis – se heurtent à la realpolitik, celle des rapports de force brutaux. Et dans les deux cas, c'est le cynisme qui l'emporte.

Ces films, qui sont promis à de beaux succès en salle, feront réfléchir alors que les deux pays sont en campagne électorale. A quoi bon, se dira le spectateur...

A quoi bon s'engager derrière un candidat si, une fois élu, la réalité de la « godasse qui prend l'eau » limite sa capacité d'action, le poids des lobbies le conduira à agir à l'opposé de ses convictions, et l'accumulation d'infimes trahisons finira par ruiner toute ambition de changement.

Ces deux films et surtout leurs réalisateurs ne visent pas à dégoûter le citoyen-spectateur de l'engagement, leurs biographies plaident au contraire pour l'opposé.

Mais en illustrant la réalité de manière crue et clinique, ils ont clairement démontré que pour changer le monde, il ne suffit pas de changer les hommes (ou les femmes), quelles que soient la force et la beauté de leurs convictions. Ils font le constat, et nous laissent en tirer les conséquences.

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