Source : www.marianne.net
Vingt-quatre heures avant l’annonce fatidique du bond calamiteux de 34 300 des demandeurs d’emplois en catégorie ABC (1) en mai, François Rebsamen a pris les devants. Sur LCI, le ministre du Travail qui ne s’était pas préparé à… ce travail — et veut échapper au calvaire de ses prédécesseurs Xavier Bertrand (UMP) et Michel Sapin (PS) —, a benoitement annoncé qu’il ne commenterait pas, au mois le mois, l’évolution du chômage en France « parce que ces chiffres ne veulent pas dire grand-chose et qu’il faut les étudier sur une période assez longue. »
Oublié donc la ridicule « baisse tendancielle de la hausse » du chômage façon Nicolas Sarkozy, l’ « inversion de [sa] courbe » avant la fin de l’année 2013 promis par le président Hollande ou même la modeste décrue du chômage des jeunes à grandes lampées d’emplois aidées, vantée par Michel Sapin lors de son départ à Bercy. Rue Grenelle, désormais on esquive, on ne promet plus rien, on se tait. Et pour cause…
Qu’aurait dû constater jeudi 26 juin François Rebsamen s’il en avait eu le cran ? Primo : que le chiffre de 5,3 millions d’inscrits à Pôle emploi dans l’Hexagone et les DOM-TOM lui donne le vertige. Car si on cherche à rendre plus « concret » ce chiffre, il représente… la totalité de population active de la Bretagne, de Haute et Basse-Normandie, des Pays-de-la-Loire et de l’Auvergne ! Imaginez-vous toutes ces régions quasiment à l’arrêt ? Dont une Basse-Normandie au point mort depuis plus de trois ans puisque le nombre de ses actifs équivaut à peu près aux 625 000 chômeurs de longue durée (catégories ABC)…
Ensuite, s’adressant aux jeunes de moins de 25 ans, François Rebsamen aurait dû les haranguer : « Haut les cœurs, les gars et les filles, vous êtes bien formés ! Allez donc tenter votre chance hors de l’Hexagone car le pays avec la politique de redressement que nous menons, n’aura pas besoin de vous de si tôt… » En dépit d’un objectif de 100 000 emplois d’avenir signés, 773 400 jeunes sont toujours désœuvrés (plus 3 600 en mai).
Le sous-emploi de masse gagne même nos régions les plus dynamiques comme l’Aquitaine, l’Ile-de-France ou les Pays-de-la-Loire (respectivement plus 6,7%, 6,4% et 6,2% de demandeurs d’emplois sur un an), dans lesquels ils auraient pu tenter leur chance. Le Medef vient d’ailleurs de reconnaître qu’il n’y avait pas 400 000 emplois non pourvus en France comme il prétendait dans sa campagne baptisée « Beau travail », mais tout au plus 75 049 (principalement des cuisiniers, des employés d’hôtellerie, des attachés commerciaux et ouvriers du bâtiment).
« C’est mauvais mais je refuse le fatalisme, s’est contenté d’affirmer le Premier ministre Manuel Valls depuis Matignon. Je compte donc sur les entreprises de France, avec les moyens que nous allons leur donner, la baisse du coût du travail, la baisse de la fiscalité, pour inverser la tendance. » A dix jours d’une troisième conférence sociale dont personne n’attend de miracle, puisque la CGPME fait encore des histoires pour y siéger, tout le pays en voie de pétrification, croise les doigts…
(1) Les demandeurs d’emplois des catégories ABC ont effectués en mai des actes positifs de recherche de postes. Les A n’ont pas du tout travaillé en mai, les B moins de 78 heures, les C plus de 78 heures tout en restant en activité réduite.
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