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21 janvier 2014 2 21 /01 /janvier /2014 17:47

 

Source : www.marianne.net

 

Cette guerre idéologique que l’austérité est sur le point de gagner!
Mardi 21 Janvier 2014 à 05:00

 

*Michel Santi

 

Le scénario est toujours le même. Le gouvernement du pays en question opte pour l’austérité, croyant ainsi conserver la confiance des marchés financiers. A l’unisson, l’ensemble des partis politiques affichent leur indéfectible volonté de préserver la notation de la dette souveraine de leur pays. Jusqu’à ce que l’austérité déprime la consommation, fige l’investissement et, en finalité, débouche sur la récession.

 

Un vieil homme marche les pieds symboliquement enchaînés lors d'une manifestation, septembre 2012, Athènes - RAKITA MAGDA/SIPA
Un vieil homme marche les pieds symboliquement enchaînés lors d'une manifestation, septembre 2012, Athènes - RAKITA MAGDA/SIPA
Le scénario est toujours le même. Le gouvernement du pays en question opte pour l’austérité, croyant ainsi conserver la confiance des marchés financiers. A l’unisson, l’ensemble des partis politiques affichent leur indéfectible volonté de préserver la notation de la dette souveraine de leur pays. Jusqu’à ce que l’austérité déprime la consommation, fige l’investissement et, en finalité, débouche sur la récession.

Les objectifs en matière de réduction des déficits sont donc évidemment très loin d’être atteints, tant et si bien qu’une intensification de l’austérité est exigée par les responsables politico-économiques. Lequel regain de rigueur exerce une pression supplémentaire sur ce qui reste de croissance et que, en finalité, le pays perde son AAA, ou la note enviable dont il bénéficiait de la part des agences de notation. Lesquelles agences de notation qui invoquent les misérables perspectives de croissance pour justifier la dégradation de la note de ce pays.

C’est à peu près à ce stade que le Ministre des Finances de ce pays, montrant une détermination sans faille, assure vouloir redoubler d’efforts pour réduire la dette publique, non sans distiller son angoisse vis-à-vis de déficits « qu’il nous est impossible de transmettre aux générations futures »…
 
Scénario familier, donc, qui ne s’est que trop répété ces dernières années en Europe et qui a par exemple touché en décembre dernier les Pays-Bas, « déshonorés » par la perte de leur triple A. Austérité qui a donc embarqué ce pays dans une spirale infernale où la croissance rétrécit comme une peau de chagrin année après année et où le fardeau de l’endettement s’aggrave, lui, année après année. Comment et pourquoi s’en émouvoir – ou tout simplement s’en étonner ? – quand le gouvernement hollandais adopte des mesures d’économies et d’augmentations d’impôts se montant à 6.5% du P.I.B. entre 2011 et 2014, et à 2.5% d’économies supplémentaires entre 2015 et 2017 ? Pourtant – quelle surprise ! – : la dette publique s’enfonce de 65.7% du P.I.B. en 2011 à 76.3 prévue cette année. Tandis que le chômage double quasiment sur la même période de 4.3% en 2011 à 8% prévu en 2014…

C’est donc plus ou moins à ce moment de cette tragédie dont le final n’est que trop connu que le gouvernement hollandais (ou du pays européen en question) décrète un resserrement de l’austérité, afin d’atteindre – ou de se rapprocher le plus possible – du critère aberrant des 3%. Gouvernement du pays en question qui ne se rend nullement compte de l’ironie de la situation où il s’empêtre le cœur léger, et qui veut que chaque mesure supplémentaire de rigueur adoptée l’éloigne un peu plus de ce AAA si convoité.
 
Autorités du pays dégradé en question qui se rebellent et qui se scandalisent dès que leur notation souveraine se retrouve dégradée par celles-là mêmes (les agences de notation) qui les avaient mises en garde… « Que d’efforts pour rien ! », s’exclament alors des autorités politiques et financières qui semblent n’avoir toujours rien compris aux rudiments de la macro économie. Qui, dans leur infinie naïveté, sont persuadés que tous les secteurs d’une économie peuvent épargner, peuvent cesser de dépenser, et peuvent interrompre leurs investissements sans que cela ne se ressente sur l’activité, et donc sur la croissance. Et qui, à la faveur de la gifle de la dégradation de leur notation, commencent enfin à intégrer des éléments de macro économie pour apprentis-économistes.
 
Non : l’économie hollandaise (ou française, ou espagnole, ou britannique…) n’était absolument pas en danger. Non : ses finances publiques ne risquaient à aucun moment d’échapper à tout contrôle. Non : il n’est nullement impératif du point de vue macro économique d’atteindre un budget excédentaire. Oui : les critères européens des 3% sont de nature à fausser la donne et à troubler la vision des politiques qui ne se braquent plus dès lors que sur le quantitatif au détriment du qualitatif. Et, oui: les seules et uniques priorités de ce gouvernement (comme de tout autre exécutif) sont de résorber le chômage et de soutenir la croissance. Et pourtant, elle est en train de la gagner cette guerre : l’austérité ! Grâce à l’économie britannique qui reprend enfin le chemin de la croissance. A l’Espagne dont le P.I.B. cesse subitement de se dégrader. A l’Irlande qui vient de voir sa note remontée par les agences de notation. Et même à la Grèce qui voit poindre un semblant de reprise.
 
Ne vous y trompez toutefois pas car ce rebond n’est strictement pas redevable à la « sagesse » de nos gouvernants, mais à une interprétation qualitative fallacieuse des statistiques économiques. Car c’est les pays ayant imposé l’austérité la plus rude qui ont subi le plus fort décrochage de leur croissance et l’augmentation la plus spectaculaire de leur dette. Car la croissance est comme ce ballon qui rebondit forcément – et mécaniquement – après avoir touché le sol : elle repart même sans mesure qui puisse la stimuler.

L’économie – c’est comme les êtres humains- : ils récupèrent après un moment d’abattement et finissent par se relever. Si ce n’est que les économies touchées par l’austérité se rétablissent à un rythme d’une lenteur extrême, et qu’elles ne reviennent jamais à leur niveau d’avant, d’avant la crise.


(*) Michel Santi est économiste, auteur de « L'Europe, chronique d'un fiasco politique et économique »« Capitalism without conscience »   Son dernier ouvrage est  «Splendeurs et misères du libéralisme»    (l’Harmattan)

 

Source : www.marianne.net

 

 


 

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