C’est par un communiqué, diffusé ce vendredi 10 mai dans l’après-midi, que la nouvelle est tombée. Le procureur de la République de Bordeaux, Claude Laplaud, requiert un non-lieu en faveur de Patrice de Maistre et d’Eric Woerth dans un des volets de l’affaire Bettencourt.
« Dans la procédure suivie aux cabinets de Monsieur Jean-Michel GENTIL, Mesdames Cécile RAMONATXO et Valérie NOEL, pour financements illicites de campagne électorale et de parti politique, complicité et recel de ces délits, trafics d’influence, à raison de laquelle MM. Patrice de MAISTRE et Eric WOERTH ont été mis en examen pour trafics d’influence actif et passif, le parquet a remis, ce jour, son réquisitoire définitif afin que les susnommés soient admis au bénéfice de non-lieux », expose le communiqué du parquet.
« Les délits de financements illicites de campagne électorale et de parti politique – pour lesquels MM. WOERTH et de MAISTRE n’ont d’ailleurs pas été mis en examen – ne ressortent, en effet, nullement caractérisés et, à supposer le contraire, circonscrits au 1er trimestre 2007, ils auraient, en tout état de cause, été couverts par la prescription de l’action publique », précise le procureur, sans trop d'égards pour le travail effectué dans ce dossier par les juges d'instruction.
Par ailleurs, « s’agissant des présomptions de trafic d’influence, à raison de la mise à disposition par l’État de la « Parcelle de l’An IV », sise 11 quai de Conti à PARIS 6°, à l’Institut de France, pour qu’il y soit réalisé un auditorium financé par Mme Liliane BETTENCOURT, opéré par arrêté ministériel du 29 janvier 2009, signé par M. Eric WOERTH alors Ministre du Budget, il a pu être établi que cette décision était intervenue en application et pour la mise en œuvre des dispositions entérinées par le Parlement, notamment de l’amendement n° 374 adopté le 9 décembre 2008 par l’Assemblée Nationale dans le cadre du projet de loi de finance rectificative pour 2008 (article 36 III de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 rectifié) et que, par conséquent, l’action conduite par M. Eric WOERTH n’encourt aucun reproche », assène le procureur.
Pour finir, « Concernant enfin les présomptions de trafic d’influence relatives aux conditions d’embauche de Mme Florence WOERTH au sein de la société CLYMENE (société gestionnaire du patrimoine de Mme Liliane BETTENCOURT, dirigée par M. Patrice de MAISTRE) et de la nomination de M. Patrice de MAISTRE dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur, le parquet estime que le lien de corrélation entre les deux faits – condition nécessaire à la caractérisation du délit – n’est pas formellement démontré ». Fermez le ban.
Certes, le procureur de Bordeaux a toujours été d'une prudence extrême, proche de la componction, dans cette affaire d'Etat qu'est le dossier Bettencourt. Sa gestion médiatique de la mise en examen d'Eric Woerth par les juges d'instruction avait déja suscité de sérieuses critiques (lire notre article ici).
Mais l'analyse juridique faite aujourd'hui par le procureur Laplaud, pleine de compréhension et de mansuétude pour Eric Woerth et Patrice de Maistre, au point qu'elle épouse parfaitement leur défense, tranche très singulièrement avec celle qui a été faite depuis deux ans par les trois juges d’instruction chargés du dossier. Le 12 juin 2012, ceux-ci avaient mis en examen l'ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, pour « trafic d'influence actif » dans l'affaire de la Légion d'honneur que lui avait remise l'ex-ministre Eric Woerth en janvier 2008.