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18 septembre 2014 4 18 /09 /septembre /2014 14:23

 

Source : cadtm.org

 

CADTM

 

 

Bancocratie : « pour construire leur pouvoir, les banques n’ont pas eu besoin de coup de force… »

18 septembre par Isabelle Ponet

 

 


D’autres ont déjà dit la mécanique complexe et barbare qui a construit petit à petit le pouvoir absolu des banques : Bancocratie ! Trop grandes pour faire faillite et trop grandes pour être condamnées. Des États au-dessus des États. Mais qui refuse de laisser ces banques tomber en faillite, qui renonce à les poursuivre en justice, qui, en fait, leur donne le pouvoir sinon les États eux-mêmes ?

C’est cette dimension-là du livre d’Eric Toussaint qui m’a le plus touchée au fur et à mesure où l’analyse avançait. Non, ce n’est pas par la force que le Capital financier a pris le pouvoir au Politique. Il a instrumentalisé le Politique en lui dictant les lois, les institutions et les discours qui lui sont favorables : une BCE qui ne peut prêter qu’aux banques privées, à un taux d’intérêt minime, pour que celles-ci les re-prêtent aux États à un taux bien plus élevé ; les accords de Bâle, censés augmenter le contrôle sur les banques mais qui leur donnent explicitement les moyens de le contourner ; le refus des gouvernements de séparer la face spéculative des banques et la face service au public etc. Elles continuent donc à jouer avec notre épargne en étant sûre d’être renflouées aux frais de la collectivité sous prétexte de « salut public ».

La dernière partie du livre d’Eric Toussaint égrène les compromissions des responsables politiques, les complicités, les passages de plus en plus fréquents du management des banques aux marocains ministériels et inversement. Non, pour construire leur pouvoir, les banques n’ont pas eu besoin de coup de force… sauf contre les citoyens. La crise qui a éclaté en 2008 coûte chaque jour des larmes, du sang et même la vie à des millions de travailleurs européens, comme aux travailleurs du Sud. Diminution des protections sociales, des services publics, des budgets culturels pour pouvoir rembourser aux banques la dette qu’elles ont imposée aux Etats. Et surtout, partout, diminution des salaires, des pensions… et des droits syndicaux !!!

Car, au-delà des jeux boursiers, l’objectif du Capital à travers toute cette crise est de restaurer les taux de profit en rapprochant les salaires européens de ceux pratiqués en Asie. Et pour ce faire, il devra affronter les travailleurs et leurs organisations.

C’est donc bien finalement dans une guerre que nous sommes engagés, et le livre d’Eric Toussaint nous rappelle utilement les armes de la désobéissance :

  • Démasquer les discours sur la nécessité de payer les dettes que les banques elles-mêmes ont organisées
  • Annuler les dettes illégitimes, suspendre les autres pour renégocier les taux usuriers en forçant les banquiers à la table des négociations
  • Socialiser le secteur des banques et des assurances afin qu’il soit réellement mis au service des besoins sociaux, et contrôlé par les citoyens qui y déposent leurs épargnes, par les travailleurs et les associations autant que par les mandataires publics.

C’est à ce prix seulement que nous pourrons récupérer collectivement le pouvoir sur nos vies.


Plus sur le livre Bancocratie : http://cadtm.org/Bancocratie

 

 

Source : cadtm.org

 

 

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Source : blogs.mediapart.fr/blog/cadtm

 

 

«Bancocratie»: la radicalité nécessaire d’Eric Toussaint

 

 

 

La première fois que j’ai parlé à Eric Toussaint, c’était en 2011 au plus fort de la crise des dettes souveraines. Je me souviens distinctement de cette période où l’Europe était à la croisée des chemins, pour ne pas dire au bord de l’abyme. Alors que les ministres des Finances et banquiers centraux s’affairaient à éviter à tout prix un défaut de paiement de la Grèce et d’autres pays fragilisés, Eric Toussaint plaidait, lui, pour l’annulation d’une partie des dettes publiques européennes (comme il l’expliquait dans cette interview à La Libre Belgique). Il y avait là un changement de paradigme frappant : Eric Toussaint était (il l’est toujours) le président du CADTM, le Comité pour l’annulation des dettes du tiers monde. Autant dire que pour un journaliste couvrant la politique européenne, rompu à la loi du mort-kilométrique, son sujet de base était loin de mon radar. Or voilà qu’il s’avérait que les dettes des pays européens, aussi, devaient être annulées ? L’Europe était-elle en voie de tiers-mondisation, comme le laissaient supposer les articles effarants sur les opérations de MSF en Grèce ?

Je connaissais le concept de dette odieuse des dictateurs africains, dont le droit international prévoit l’annulation. Eric Toussaint en proposait une version beaucoup plus étendue : les dettes contractées pour éponger les pertes des banques devaient elles aussi être remises à zéro, plaidait-il - et n’a-t-il cessé de plaider depuis lors, d’Athènes à Bruxelles.

Mais en plein coeur de la crise, cette demande a été balayée par un argument massue : le risque de contagion. En Belgique, Didier Reynders, alors ministre des Finances, que j’ai interrogé à maintes reprises sur le sujet, répétait comme un mantra qu’un défaut de paiement de la Grèce serait similaire à la faillite de Lehman Brothers. La déroute du géant bancaire américain avait plongé le système financier mondial dans le choas trois ans plus tôt. ""Même un âne ne bute pas deux fois sur la même pierre", insistait Didier Reynders en 2011. La suite de l’histoire est connue : les créanciers privés de la Grèce ont accepté du bout des lèvres une décote sur leurs titres, mais l’essentiel de la dette grecque est passée désormais entre les mains des autres Etats européens, à travers le Mécanisme européen de stabilité, au prix d’une cure d’austérité drastique.
Dans son livre "Bancocratie", qui vient de paraître aux éditions Aden, Eric Toussaint règle son compte au fameux risque de contagion.

"Aucune des faillites bancaires depuis 2007", rappelle-t-il, "n’a été provoquée par un tel défaut de paiement. Aucun des sauvetages bancaires organisés par les Etats n’a été rendu nécessaire par une suspension de paiement de la part d’un Etat surendetté. Ce qui menace les banques, c’est le montage de dettes privées qu’elles ont progressivement construit depuis la grande déréglementation qui a commencé à la fin des années 1970 et qui s’est poursuivie au cours des années 1990 jusqu’à 2007-2008".

Ce n’est pas le moindre mérite du livre que d’analyser méthodiquement le bilan des banques européennes pour montrer à quel point les risques encourus par le système financier est le fait des banques elles-mêmes.
Dans les chapitres les plus intéressants, à la fois techniques et pédagogiques, l’auteur explique pourquoi et comment les banques ont gorgé leurs comptes de produits dérivés risqués, axés sur le profit, au détriment des prêts aux ménages et aux entreprises. Si le constat n’est pas neuf, Bancocratie donnera à ses lecteurs les outils pour mieux décoder les informations cryptiques que seule véhicule la presse financière.

Le chapitre relatif aux règles de Bâle permet de comprendre à quel point les nouvelles exigences de recapitalisation des banques sont manipulables.
Spéculation sur les produits agricoles, recherche de retours élevés, banques universelles "too big too fail & jail" : toutes les grandes dérives bancaires sont dénoncées avec une rage qui n’ôte rien au sérieux de l’exercice.
Qu’on partage ou non toutes les conclusions d’Eric Toussaint, son livre dresse un constat radical, mais nécessaire. Car ce n’est qu’en prenant la mesure des enjeux que le politique sera en mesure d’y apporter des remèdes.
Parmi les nombreuses pistes que l’auteur offre dans son dernier chapitre, relevons la plus emblématique : la "socialisation du secteur bancaire sous contrôle citoyen". Est-elle réellement utopique, au vu du coût des sauvetages bancaires par les contribuables ? La question doit être posée.

L’Etat belge contrôle Belfius à 100%, il est le premier actionnaire de BNP Paribas, mais l’actualité de l’année écoulée a révélé à quel point il se désintéressait de sa mission d’actionnaire public. Comble du pathétique : l’un des administreurs représentant l’Etat belge au Conseil de BNPP, Emiel Van Broekhove, s’est gargarisé publiquement de son indépendance. Dans une interview, il a osé affirmer qu’il n’avait pas de compte à rendre.
Ces propos ont suscité l’indignation dans la classe politique, mais il n’est pas certain que le gouvernement ait pris la mesure de l’enjeu.
Voici d’ailleurs - en exclusivité - ce que dit le projet d’accord de la coalition suédoise à ce sujet :

"Le gouvernement fédéral continuera à jouer son rôle d’actionnaire dans des institutions financières en conformité avec les principes de gouvernance en vigueur et se basera à cet égard sur le Code de conduite de l’OCDE de gouvernement d’entreprise à l’intention des Etats qui détiennent une participation dans ces entreprises. Le gouvernement établit un cadre pour les administrateurs qui, en fait, représentent l’Etat et conclut des accords avec ladirection de ces entreprises afin de s’assurer queles normes d’éthique des affaires soient respectées".

A coup sûr, Eric Toussaint trouverait ça mou du genou, d’autant que le prochain gouvernement entend se désengager du secteur bancaire.

"Le gouvernement veille à valoriser les participations dans le secteur financier au moment opportun et de manière judicieuse. Le rôle de la Société Fédérale de Participations et d’lnvestissement est réexaminé : la capacité de gestion est renforcée, la politique d’investissement est réorientée et les participations de l’Etat fédéral sant centralisées au sein de la SFPI".


Par Éric Walravens, journaliste à Belga et auteur de Dumping Fiscal.

 

 

 

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/cadtm

 

 

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*Vous pouvez lire aussi:

 

 

Compte rendu de lecture de Bancocratie de François Chesnais

Reponse d'Eric Toussaint à Francois Chesnais

 

 

 

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