Dictature. Le mot fait mal ; la chose plus. Le président de la République n’emploie pas le mot, mais il le met en pratique en relayant les oukases des marchés. « J’ai conscience du risque de ne pas être compris des populations qui souffrent », a-t-il affirmé dans une interview, le 13 décembre. Pour aussitôt asséner : « Nous n’avons pas le choix ». Éternel discours des sauveurs suprêmes.
« Je crois que, dans la période actuelle, il y a une probabilité non négligeable qu’on tombe dans un système officiellement dictatorial. » En lançant cet avertissement quelques jours avant, André Bellon, ancien président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, ne pensait peut-être pas que Nicolas Sarkozy le confirmerait si vite.
C’était le 3 décembre, à Romainville, près de Paris, lors d’une réunion de l’Association pour une constituante* que préside André Bellon. Une quarantaine de participants, de diverses origines politiques et associatives y ont lancé publiquement un débat sur cette « idée neuve en Europe », l’Assemblée constituante.
Tout au long des débats, un constat partagé, celui d’une situation catastrophique pour le pays et pour sa population. Ainsi Jacques Cotta, journaliste et écrivain, animateur du site « la Sociale », pour qui nous sommes dans une « double crise ». D’abord la « crise du système capitaliste », qui « va en s’aggravant ». « L’an dernier, une personne chaque minute était rejetée au chômage ; chaque minute, une famille basculait ». C’est pour lui le point de départ, ce qui justifie que la question de la Constituante souveraine soit posée. Il y a ensuite crise de la représentation politique, parce qu’il y a « une adaptation généralisée du monde politique à la situation dans laquelle nous sommes », explique-t-il en visant Nicolas Sarkozy et François Hollande. Pour lui, « la constituante se fera à partir du mouvement d’en bas », mais il faut qu’une « force émerge, intellectuelle, idéologique, pour exprimer l’essentiel et permette, à un moment donné, que le mouvement d’en bas puisse s’en saisir ».