A peine la crise chypriote s'éloigne-t-elle que déjà un autre pays suscite l'inquiétude de la zone euro : la Slovénie, touchée elle aussi par une crise bancaire. Et ce malgré la multiplication des déclarations rassurantes de Ljublana. Une semaine après son arrivée à la tête du gouvernement, mercredi 27 mars, Alenka Bratusek affirmait pourtant que le pays était "capable de s'en sortir tout seul !"
Quinze jours plus tard, la nouvelle première ministre de centre-gauche réaffirmait sa priorité : "Nous travaillons littéralement jour et nuit pour résoudre le problème bancaire (...) qui est le problème numéro un en Slovénie". Et de rappeler la mise en œuvre, en juin, d'une 'bad bank', c'est-à-dire une structure rassemblant les actifs bancaires toxiques.
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Le secteur bancaire de ce pays de deux millions d'habitants, en récession depuis février 2012, croule en effet sur les créances douteuses, estimées à 7 milliards d'euros par le Fonds monétaire international (FMI), soit 20 % du PIB. Il évalue à un milliard d'euros le besoin de recapitalisation des trois principales banques du pays. L'agence de notation Fitch est quant à elle plus pessismite : elle estime ce besoin à 2 milliards d'euros. Elle a d'ailleurs dégradé vendredi cinq banques slovènes, dont les deux plus importantes Nova Ljublanska Banka et Nova Kreditna Banka Maribor, et assorti leur note d'une perspective négative.
PAS DE "BESOIN IMMÉDIAT DE PLAN DE SAUVETAGE"
Dans un rapport, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a recommandé mardi à Ljublana d'assainir d'urgence son secteur bancaire, prônant des mesures radicales, même si, pour l'instant, il n'y a "aucune raison d'anticiper un besoin immédiat de plan de sauvetage" – comme ce fut le cas pour Chypre, fin mars.
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Car c'est bien cette peur d'un bis repetita qui cristallise l'inquiétude des Etats-membres de la zone euro, focalisés sur le cas de l'île méditerranéenne pendant une quinzaine de jours, après qu'elle est devenue le cinquième pays de l'union monétaire à bénéficier d'une aide internationale.
Voir l'infographie : Chypre entre en convalescence
TENSION SUR LES PRIMES DE RISQUE
Pour autant, pas question pour Bruxelles de comparer les deux pays. Le président de la Commission, José Manuel Barroso, a tenu mardi à réfuter toute comparaison avec Chypre. Malgré les "inquiétudes", "la situation est complètement différente, la taille des banques par rapport à l'ensemble de l'économie n'est pas la même et le modèle financier est différent". En effet, son secteur bancaire n'est pas, comme celui de Nicosie, hypertrophié : il représente quelque 150 % du PIB, contre 800 % à Chypre.
En revanche, pour l'Institut de la finance internaitonale (IIF), qui représente plus de 450 banques mondiales, il faut agir maintenant. Selon lui, la Slovénie doit faire appel au fonds de secours européen, et ce, afin d'éviter un plan de sauvetage global associant le FMI, à l'instar de Chypre. Les analystes de Bank of America Merrill Lynch ont évalué, dans une note du 5 avril, le montant d'un éventuel plan de sauvatage entre 6 et 8 milliards d'euros, nécessaire notamment pour recapitaliser ses banques.
Une inquiétude partagée par l'IIF, qui s'inquiète de savoir comment le pays couvrira ces besoins de financement, à l'heure où les investisseurs affichent leur méfiance. Mardi, la Slovénie n'a réussi à lever que 56 millions d'euros sur les marchés alors qu'elle en espérait près du double. Et, selon les données de Bloomberg, la prime de risque (credit default swap) sur les emprunts du pays a bondi de 66 % entre le 15 et le 28 mars... au plus fort de la crise chypriote.
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