Source : www.marianne.net
Mais du côté des socialistes français, les choses ne sont pas aussi claires. Loin de là même. Certes, au micro de la matinale de France inter, jeudi dernier, Yann Galut, député PS du Cher et ancien rapporteur du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale, a bel et bien déclaré que Jean-Claude Juncker ne pouvait « pas rester en place ».
Ainsi, si Henri Weber, ancien député européen et secrétaire national du PS en charge des Etudes européennes, admet que les dernières révélations sur Juncker mettent ses défenseurs dans « une position qui n’est pas très confortable », pas question pour autant d’accabler le président de la Commission européenne. Pour trois raisons au moins.
« Un raisonnement pas forcément facile à comprendre » !
Et la première est aussi gonflée que les suivantes. D’abord, nous explique-t-il, parce que ces révélations ne viennent que confirmer la nécessité de mettre en place « une politique d'harmonisation fiscale » en Europe car « il existe une compétition fiscale en Europe et dans le monde ». Oui, on s'en était rendu compte et d'ailleurs Juncker a été un des organisateurs de cette « compétition ». Mais Weber ne semble pas en vouloir plus que ça à nos voisins luxembourgeois. Il note d’ailleurs, non sans malice, que « la France y participe avec son Crédit d'impôt recherche à sa manière et ses multiples niches fiscales ».
Deuxième élément, « basé sur un raisonnement pas forcément facile à comprendre », prévient-il : « Ce sont les meilleurs braconniers qui font les meilleurs garde-chasses ». En effet : « pas facile à comprendre ». Et à digérer surtout. Mais Weber assume et agite le cas Mario Draghi, l’actuel patron de la BCE, en exemple : « Lorsque Draghi a été nommé à la tête de la BCE, certains de mes petits camarades se sont offusqués en disant qu’il avait fait partie de la bande de Goldman Sachs. Moi, j’ai dit tout de suite qu’il serait très bon à son nouveau poste, justement parce qu’il connaissait très bien les rouages et les dérives financières ».
Enfin, il distingue le Juncker Premier ministre du Luxembourg, « enfermé dans une logique nationale », et le Juncker de la Commission, « un vrai démocrate-chrétien qui a conscience du rôle qu’il doit jouer ». Preuve en serait : son positionnement, dès le début de son mandat, sur la nécessité d’un plan de relance par l’investissement.
Pour Gilles Pargneaux, député européen et patron de la puissante fédération socialiste du Nord, le mea culpa du président de la Commission, devant le Parlement européen, l’a pleinement convaincu et il a « accueilli plutôt favorablement son intervention et celle de Pierre Moscovici pour dire que la lutte contre l’évasion fiscale serait leur combat ». Il ne voit d’ailleurs pas quel serait l’intérêt d’une démission « surtout maintenant que le plan de relance en Europe est au menu des discussions ». Il souhaite donc que les députés européens soient dans « la vigilance », certes, mais pas dans « la méfiance automatique ». Pas de démission, donc, mais un droit de suite des élus. « Si on se rend compte que d’ici un an, rien n’a bougé, il faudra reposer la question ». On prend rendez-vous ?
Pour le secrétaire général du courant de l'aile gauche Un Monde d’avance, Guillaume Balas, qui siège lui aussi à Strasbourg, ces révélations ne sont pas une « surprise ». « On le savait très bien, pas exactement l’ampleur mais on était au courant », s’agace-t-il, pointant du doigt « l’hypocrisie » sur la question. Et d'en déduire, paradoxalement, que demander sa démission, « n’a aucun sens » : « Ce sont des foutaises. C’est avant qu’il fallait réfléchir et ne pas être aussi complaisant ». Surtout, ce proche de Benoît Hamon ne saisit pas le sens de la démarche qui n’aurait comme conséquence que « de foutre le bordel, en créant une crise, alors que l’on est en train de discuter d’un plan de relance de 300 milliards d’euros ».
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