Près de 90 % des diamants bruts sortis de terre passent par la ville indienne de Surat, pour y être taillés et polis. Les pierres issues de zones de guerre s'y mêlent aux autres sans garde-fou, écrit le magazine "Foreign Policy".
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AFP PHOTO/Indranil MUKHERJEE
A Surat, chef-lieu du district indien du Gujarat, un habitant sur dix coupe, taille, transporte, achète ou vend des diamants. Depuis deux décennies, cette ville est devenue l'une des plus importantes places diamantaires au monde : plus de 90 % des diamants bruts sortis de terre, où que ce soit à travers le monde, y sont polis. Les plus petites pierres, surtout, dont la taille est ici rentables, grâce à une main-d'œuvre bon marché.
L'autre spécialité de Surat, ce sont les pierres illégales, issues de zones de guerre. Dans un reportage édifiant, le magazine américain Foreign Policy a remonté la filière indienne du diamant, montrant en quoi les garde-fous prévus par l'industrie contre ces "pierres de sang", qui n'ont jamais tout à fait fonctionné dans d'anciennes places bien policées comme Anvers, n'ont plus court en Inde.
A Surat, le bureau des inspecteurs chargés de repérer ces pierres compte en tout et pour tout… sept employés, qui vaquent entre quatre murs défraîchis, écrit le magazine. Ces policiers sont chargés de vérifier le "passeport" censé accompagner chaque lot de pierres, de la mine à l'acheteur.
Ces papiers d'identités ont été adoptés par l'industrie en 2000, suivant le processus dit de Kimberley. Il s'agit d'une simple feuille de papier donnant le pays d'origine et la destination du lot de pierres, sa valeur, le nombre de carats total, un numéro de série et quelques signatures. Ce document "est à peu près aussi facile à falsifier qu'un bon vieux permis de conduire," écrit Foreign Policy.
Notamment parce qu'il ne mentionne que le nombre total de carats d'un lot. Or, la taille enlevant jusqu'à 50 % des carats d'une pierre, rien n'empêche un malfaiteur d'ajouter ou de retrancher discrètement des diamants taillés dans un lot de diamants brut, et inversement, afin de mélanger quelques pierres sales à d'autres propres.
A Surat, on gère une telle quantité de pierres, parfois de taille infinitésimale, dans des échoppes employant un, deux ou plusieurs milliers de personnes, les pierres changent tant de fois de main dans des marchés de rue, sans paperasse, sur une simple poignée de main, que les certificats n'y ont plus court. Quelque 35 tonnes de diamants bruts passent en ville chaque année pour y être taillés et polis, mais moins de deux tiers arrivent par voie légale, selon une enquête du journaliste Yagnesh Mehta pour le Times of India. Les diamants de sang qui arrivent sans passeport en ville se fondent dans les lots de ceux qui ont perdu le leur.
Vente aux enchères. Les autorités indiennes vendent, à un prix largement inférieur à celui du marché, les pierres illégales saisies à Surat. Ceux qui souhaitent placer une offre peuvent s'enregistrer en ligne. Les gains sont versés au Trésor indien.
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