Bataille judiciaire
Depuis, l’Andra a choisi d’éviter la confrontation directe, tout en déplorant des dégradations commises, le 14 février, devant son laboratoire de Saudron, tout près de Bure. Ses incursions dans la forêt avaient pour objet, explique-t-elle, de « reprendre les opérations de nettoyage et de remise en état du bois » dont elle est, souligne-t-elle, « propriétaire ». Mais la bataille se mène aussi sur le terrain judiciaire, avec plusieurs échéances importantes.
Le 22 février, d’abord, le tribunal de grande instance de Bar-le-Duc doit se prononcer sur l’expulsion d’un occupant « clandestin » du bois Lejuc, qui a volontairement donné son identité afin que puisse se tenir une procédure contradictoire. Une décision favorable à l’Andra pourrait préfigurer une évacuation générale par les forces de l’ordre.
Le 27 février, c’est la cour d’appel de Nancy qui rendra sa décision sur la contestation, par l’Andra, d’un jugement d’août 2016 qui établissait le caractère « illicite » de ses travaux de défrichement, faute d’autorisation préalable. Un arrêté préfectoral autorisant les travaux est en préparation, mais il n’a toujours pas été délivré.
Le 28 février pourrait marquer un tournant dans le conflit. Le tribunal de grande instance de Nancy doit trancher sur la légalité, contestée par des habitants, de la cession du bois Lejuc à l’Andra par la commune de Mandres-en-Barrois, en échange d’une autre parcelle forestière. La rapporteuse publique a conclu en faveur de l’annulation de cette cession, décidée au cours d’un vote précipité du conseil municipal à bulletins secrets.
Le calendrier en question
Si le tribunal suit ses conclusions, il faudra alors un nouvel accord entre la commune de Mandres-en-Barrois et l’Andra pour que celle-ci devienne effectivement propriétaire du terrain. Ce qui, en attendant une éventuelle régularisation, remettrait en question les procédures d’expulsion et, au-delà, la poursuite des travaux préparatoires au projet Cigéo.
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Enfin, le 23 mars, la cour d’appel de Versailles doit rendre son délibéré sur le dossier du potentiel géothermique du sous-sol de Bure. Le réseau Sortir du nucléaire et cinq associations accusent l’Andra d’avoir sous-estimé l’importance de cette ressource qui, selon eux, interdit la création d’un site de stockage dans cette zone.
Cette double guérilla, au milieu des arbres et dans les prétoires, pourrait bien faire déraper le calendrier du projet d’enfouissement des déchets radioactifs. C’est la carte que jouent les opposants, décidés à inscrire leur mouvement dans la durée et à s’enraciner dans la région de Bure. Pour l’instant, l’Andra n’en maintient pas moins les échéances qu’elle s’est fixées, à savoir une demande d’autorisation de création du centre de stockage « au cours du deuxième semestre de 2018 », pour une mise en service en 2025.