Source : https://www.mediapart.fr
Un temps freiné par une décision du tribunal, le conseil départemental du Haut-Rhin a finalement réussi à imposer son objectif : conditionner le versement du RSA (revenu de solidarité active) à des heures de bénévolat hebdomadaires. Le programme doit officiellement démarrer dès ce mois de février : il pourra s’appliquer aux 20 000 allocataires que compte le département. Une première en France, avec, possiblement, un effet boule de neige dans d’autres départements.
Éric Straumann, président LR du conseil départemental du Haut-Rhin, doit être ravi. Il tient enfin son dispositif, consistant à pousser les allocataires du RSA à effectuer des heures de travail hebdomadaires, sous forme de bénévolat. Dès février, le programme sera officiellement « déployé » avec une plateforme dediée et Un numéro vert et pourra s’appliquer aux 20 000 allocataires que compte le département.
Malgré une première annulation du délibéré du tribunal administratif de Strasbourg, en octobre 2016 – le juge a estimé l’initiative contraire au code de l’action sociale et de la famille –, le conseil départemental « persiste et signe », comme l’avait annoncé Éric Straumann l’an dernier dans un communiqué, bien décidé à aller au bout de son idée, résumée par la représentante du département à l’audience le 21 septembre dernier : « Une logique de donnant-donnant : pas de bénévolat, pas de RSA. »
Pour passer entre les mailles du filet juridique, le programme a cependant été revisité : plus d’obligation d’aller, sept heures par semaine précisément, travailler dans les municipalités, les maisons de retraite ou les associations. Tous les nouveaux allocataires se verront proposer un « contrat d’engagement réciproque » (CER) les liant au conseil départemental, outil qui sert déjà à inscrire un certain nombre d’obligations en termes de formation, d’insertion et de recherche d’emploi. S’ajoutera donc, dans ce contrat, « l’action de bénévolat », « librement débattue et négociée ». Un projet voté en décembre par le conseil départemental à l’unanimité moins une voix, celle de la seule élue PS dans un territoire très à droite. « Ça ne va pas résoudre le problème, c'est faire du buzz. Cette vision ne permettra pas aux gens de retrouver un emploi », a critiqué Marie-France Vallat, citée par France Bleu.
« On se fixe comme objectif sept heures par semaine, mais ce sera adapté au cas par cas », a expliqué Éric Straumann à l’AFP, cité par 20 minutes. Selon lui, l’incitation à faire du bénévolat tend à « faire prendre conscience aux bénéficiaires que ce n’est pas une situation dans laquelle ils peuvent rester de manière indéfinie ». Le débat est pourtant loin d’être épuisé. Car dans le délibéré du conseil départemental de décembre dernier, il est également précisé que « les manquements aux engagements pris dans le CER pourront conduire à des sanctions, allant de la suspension du versement de l’allocation jusqu’à la radiation ». En clair, si le bénéficiaire d’un revenu de solidarité ne tient pas son « engagement », il pourra voir son allocation partiellement ponctionnée ou carrément supprimée et des contrôles pourront être menés tous les trimestres.
Pour Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (anciennement Fnars), la méthode reste « scandaleuse, du point de vue juridique et moral », et accrédite « l’idée perverse que les allocataires du RSA sont des inactifs et des inutiles ». « Dans leur grande majorité, ces personnes sont occupées à chercher un emploi, rappelle Florent Gueguen. Et ceux qui restent longtemps au RSA ont d’autres problèmes, de santé, de transport, de garde d’enfants… Pourquoi le conseil départemental ne fait pas plus pour développer l’activité économique et l’emploi, même au Smic, plutôt que d’appliquer une telle mesure ? »
Anne-Brigitte Cosson, présidente de l’Anas (Association nationale des assistants de service social), soupire. « Du bénévolat imposé, on peut aussi appeler ça des travaux d’intérêts généraux… Où est la liberté ? »...
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