Oui, mais que faire si l’on n’a pas de passion ? « Trouvez-la ! lance Jean-François Ouellet, professeur à HEC Montréal. Tout le monde a une passion, il s’agit simplement de la découvrir, en voyageant, en allant à la rencontre des autres pour comprendre ce qui véritablement nous fait vibrer. » « Il faut le faire, répète l’enseignant, parce que sans passion, il est bien difficile de passer par-dessus les embûches et d’aller jusqu’au bout des choses. »
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Oser cheminer sans se limiter
L’important est de réussir à ne pas se brider. « Ne pensez pas aux normes de la société, ne vous fixez pas de limite », insiste Ismaël Le Mouël, président de HelloAsso. « Lorsque j’étais en classe préparatoire, raconte-t-il, je visais une école d’ingénieurs. Mon professeur de mathématiques m’avait alors dit : “Non, non, ne vise pas celle-là, pense plutôt à celle tout en haut et tu verras bien après.” De fait, cette technique a assez bien fonctionné ! » « Il faut faire sauter tous les blocages », poursuit Amélie Edoin, directrice du Labo des histoires Ile-de-France-Ouest. Et de marteler : « Les grandes écoles ne sont pas réservées à une élite. Elles sont réservées aux gens qui ont les moyens de réussir intellectuellement et qui se surpassent pour réussir. »
Pour Thomas Schenck, cofondateur de Connect’O, le défi est d’être « à la fois ambitieux et humble : il faut être lucide sur ce que l’on est, sur ses qualités comme sur ses défauts. Si vous savez vous remettre en question, alors l’ambition vous permettra d’aller très loin ».
Ne pas s’arrêter en cas d’échec
« Oui, certains vont se tromper. Oui, leur parcours ne sera pas linéaire, et alors ? lance Sébastien Bazin, PDG d’AccorHotels. Oui, on a le droit de connaître enfin son parcours à 27 ans, car ça n’est pas parce qu’on a 22 ans qu’on doit être en mesure d’appréhender le monde de demain. Il y a des gens qui entrent dans le monde du travail à 32 ans et ils sont aussi bons, ça leur a pris cinq ans de plus, ça n’a aucune espèce d’importance. » Ludwine Probst, développeuse et cofondatrice de Ladies of Code Paris, renchérit : « Ce n’est pas parce que l’on décide à un moment de suivre une voie que l’on ne pourra pas bifurquer. Quand j’avais 16 ans, je me disais qu’il fallait tout réussir tout de suite. En fait, quand on veut aller d’un point A à un point B, on n’est pas obligé d’aller tout droit, on peut tout à fait passer par D, C, F… Il existe des passerelles : je rencontre de nombreuses personnes qui changent de métier à 30 ou 35 ans et qui apprennent encore. »
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Multiplier les expériences
« Pour apprendre à se connaître, le conseil numéro un que je donnerais est de se lancer dans des projets. Le simple fait de réaliser quelque chose vous apprend à mieux vous comprendre. Cela vous transforme également », estime le mathématicien Cédric Villani. Pour Marie Ekeland, cofondatrice du fonds d’investissement Daphni, ces expérimentations permettent de « sortir de sa zone de confort et de son environnement habituel ». Il est important d’« aller à la rencontre de différents mondes, poser des questions et ne pas avoir peur de dire “je ne sais pas, expliquez-moi”. Et ce, jusqu’à ce que l’on ait compris », note-t-elle.
« Regarder à droite et à gauche, faire des stages dans des entreprises variées pour vraiment savoir ce qui vous plaît et ce qui ne vous plaît pas. Ce travail personnel est indispensable », estime Sylvain Kalache, cofondateur de la Holberton School aux Etats-Unis. C’est finalement ce côté « touche à tout, curieux, qui sort des sentiers battus que les start-up valorisent déjà et qui va devenir la norme dans les années à venir », ajoute Philippe Wagner, cofondateur de Captain Contrat. L’avocate Lise Damelet encourage également cette curiosité. « Butiner sur des fleurs auxquelles on n’avait pas nécessairement pensé » permet de développer une pensée plus large, transversale, estime-t-elle, une pensée qui permettra d’être plus adapté au monde de demain.
Cultiver sa curiosité
Il faut tout lire, affirme le prospectiviste et conseiller de la Cité des sciences Joël de Rosnay : « Des livres philosophiques de grands penseurs, pour acquérir les fondamentaux, à la presse internationale, pour se familiariser avec la géopolitique. C’est grâce à cette culture que l’on acquiert des racines nous permettant de construire une vision systémique globale. »
Marita Cheng, fondatrice de 2Mar Robotics, abonde dans ce sens. « Soyez curieux du monde. Apprenez autant que vous pouvez, à l’école et en dehors. » Une ouverture d’esprit que défend aussi le paléoanthropologue Pascal Picq : « Pour être créatif, il faut regarder ce qu’il se passe ailleurs, lire, se documenter, échanger avec les autres. On peut trouver des idées géniales en allant voir un match de foot, pourquoi pas. »
Le meilleur conseil est de « ne jamais cesser d’apprendre, ne jamais penser que l’on a fini son développement et qu’on ne peut rien faire ou apprendre de nouveau », conclut, au Kenya, Ory Okolloh, investisseuse au sein de la fondation Omidyar Network. « Je lis toujours beaucoup, j’essaie des choses différentes. Cela me maintient connectée et m’ouvre à de nouvelles opportunités. On n’arrête jamais d’apprendre, et pas seulement de l’école : on apprend aussi des autres, des livres, des magazines, des amis, d’Internet. La connaissance est une quête infinie. »
Tout au long des événements O21 seront diffusées des vidéos de 35 pionniers du XXIe siècle dont des extraits sont publiés ci-dessous. Ils sont responsables académiques comme François Taddei (Centre de recherches interdisciplinaires – Paris 5), John Hennessy (Stanford), Peter Dillenbourg (Ecole polytechnique fédérale de Lausanne), Jean-François Ouellet (HEC Montréal) ; chefs d’entreprises comme Sébastien Bazin (Accor), Xavier Niel (Free), Frédéric Mazzella (Blablacar) et Bertin Nahum (MedTech-zimmer) ; startuppers comme Pierre Dubuc (OpenClassrooms), Laure Courty (Jestocke.com), Philippe Wagner (Captain Contrat) , Ben Rattray (Change.org), Sename Koffi Agbodjinou (Welab, Togo), Ory Okolloh (Omidyar Network, Kenya) ; entrepreneurs sociaux comme Ismaël Le Mouel (Hello Asso) et Amélie Edoin (Labo des histoires) ; « king coders » comme Paul Duan et Louison Dumont ; scientifiques et penseurscomme Pascal Picq (paléoanthropologue), Cédric Villani (mathématicien), Boris Cyrulnik (psychiatre), Henri Atlan (médecin et philosophe), Joël de Rosnay (prospectiviste), Aimée van Wynsbergh (professeur d’éthique, spécialiste des robots)…