Officiellement, il s’agit d’un mariage entre égaux. Pourtant, la fusion entre le groupe parapétrolier Technip et l’américain FMC Technologies paraît bien déséquilibrée. Sans compter les suppressions d'emplois, l’État, premier actionnaire de Technip, accepte même de léser ses propres intérêts financiers. Après Alstom, un nouveau groupe industriel dans l’énergie est en passe de filer dans des mains américaines.
Et puis les premières annonces sont venues. Tout, selon eux, est en train de se mettre en place pour que Technip, qui se classe parmi les premiers mondiaux dans le parapétrolier, passe sous contrôle de l’américain FMC, quatre fois plus petit, dix fois moins rentable que lui. Dans l’indifférence générale. Comme au moment de la vente de Pechiney ou d’Usinor, pas un responsable politique ne s’est inquiété publiquement de l’avenir réservé à cette entreprise. Le seul argumentaire, fait comme à chaque fusion, de créer un « géant mondial » semble suffire à tout le monde.
Sur le papier, tout paraît en effet comme dans le meilleur des mondes des banquiers d’affaires. Les deux groupes annoncent que leur fusion va permettre la création d’un ensemble de plus de 20 milliards de dollars de chiffre d’affaires, présent sur toute la chaîne des activités parapétrolières. Alors que le contexte pétrolier n’a jamais été aussi difficile depuis que le baril est descendu en dessous de 50 dollars, ils promettent de pouvoir faire 400 millions de dollars d’économie d’ici à 2019, grâce aux fameuses synergies attendues. Traduction : grâce aux suppressions d’emplois, essentiellement.
Quant à la répartition des rôles, entre les deux groupes, tout semble soigneusement pesé au trébuchet, comme il se doit dans un mariage à 50/50. La direction du nouveau groupe sera répartie entre sept dirigeants issus de Technip et sept issus de FMC. Le nouveau siège du groupe doit être basé à Londres où les deux sociétés ont déjà une filiale commune.
« Il est apparu, ce qui est toujours le cas dans les fusions entre égaux, que le siège social ne pouvait être ni en France ni aux États-Unis (ligne rouge respective de FMC et Technip) et qu’il devait être dans un pays tiers. Le Royaume-Uni a été choisi par Technip et FMC parce qu’ils ont déjà des activités là-bas », nous a répondu le secrétariat d’État à l’industrie, s’inclinant par avance devant le fait que la direction du nouveau groupe ne saurait rester en France. L’État est pourtant le premier actionnaire de ce groupe, par l’intermédiaire de la banque publique d’investissement (BPI France) et de l’Institut français du pétrole.
Dans les faits, le siège de Londres semble appelé à avoir un rôle assez décoratif. Les fonctions les plus importantes du futur groupe sont en train de prendre le chemin de Houston (Texas), là où est basé FMC. Il est déjà acquis que la direction générale, la direction financière, la direction juridique notamment seront installées au Texas. Le président de Technip, Thierry Pilenko, semble s’apprêter aussi à y faire de longs séjours. Un retour aux sources en quelque sorte : il a passé de longues années à Houston chez Schlumberger puis chez Veritas DGC.
La direction de Technip n’infirme pas ces attributions mais dément tout transfert de compétences vers le Texas : « Il y aura deux sièges opérationnels l’un à Paris, l’autre à Houston », assure-t-elle sans préciser la répartition des tâches. « Près de 80 % du chiffre d’affaires du nouveau groupe sera géré depuis Paris. Enfin, le siège mondial de la R&D du nouveau groupe sera localisé en France », dit-elle.
Avant même que la fusion ne soit engagée, les salariés ont le sentiment d’avoir eu un avant-goût de ce qui les attend par la suite. Dès la mi-2015, le groupe français a lancé un vaste plan d’économies de plus d’un milliard d’euros, à réaliser d’ici à 2017, pour s’adapter à l’environnement totalement effondré du monde pétrolier. Plus de 6 000 suppressions d’emplois sont planifiées sur un total de 38 000 salariés...
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