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29 novembre 2016 2 29 /11 /novembre /2016 18:05

 

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

Filoche: «Une gauche bien à gauche peut gagner la présidentielle»

 

Par Mathieu Magnaudeix

 

 

 

Candidat à la primaire citoyenne du PS des 22 et 29 janvier, l’ancien inspecteur du travail Gérard Filoche, en tête de toutes les manifestations contre la loi El Khomri, veut rester optimiste. Il croit possible la victoire d’un candidat « de gauche » contre la ligne « Valls-Hollande ».

 

On l’a vu tempêter et manifester au printemps contre la loi El Khomri. Gérard Filoche est candidat aux « primaires citoyennes de l’unité » qui désigneront le candidat du PS les 22 et 29 janvier – les candidatures sont à déposer avant le 15 décembre et il n'a toujours pas le nombre de parrainages requis pour se présenter.

Au PS, qu'il a rejoint en 1994, cette ancienne figure de la Ligue communiste révolutionnaire se veut la voix infatigable des salariés, des acquis sociaux, de la défense du code du travail et de l'unité de la gauche. Dans la campagne des primaires, il entend « faire du Sanders ou du Corbyn » en mobilisant tous ceux qui ont protesté contre la loi El Khomri. Il appelle d'ores et déjà à l'unité pour que la « gauche socialiste batt[e] la droite socialiste dans les primaires ». Une victoire qui, dit-il, rebattrait les cartes de l'élection présidentielle. « Je n’imagine pas une campagne électorale sans une coalition, sans dynamique unitaire », dit-il à l'intention de Jean-Luc Mélenchon. « Passer par-dessus, c’est la défaite, c’est le désastre. Tout le monde pleurera le 23 avril à 20 heures quand on n’aura plus que le choix entre LR et le Front national, et quand il ne nous restera plus que 25 députés à l’Assemblée. »

 

Manuel Valls et François Hollande se livrent à une guerre ouverte au sommet de l’État en vue de la primaire citoyenne du PS des 22 et 29 janvier prochain. Cela vous étonne-t-il ?

Gérard Filoche : Les fins de règne sont toujours dramatiques. Quand il y a un échec total comme c’est le cas de ce quinquennat, ça finit par exploser. Macron candidat, Valls et Hollande qui se déchirent : le trio infernal qui a imposé la loi El Khomri se désintègre. Je me demande ce que les historiens retiendront de tout ça…

 

Vous considérez depuis longtemps que François Hollande ne peut pas être candidat à sa succession.

Hollande, j’ai fait des communiqués avec lui pour défendre le code du travail ! J’ai manifesté coude-à-coude avec lui en 2006 contre le CPE, et il dit maintenant qu’il était pour. Ça va bien ! Limite à l’hypocrisie, limite à la trahison politique, limite à la manipulation ! Il ne devrait pas se présenter. C’est le dernier service qu’il peut rendre à la gauche. Faut bien qu’il paie le prix ! Son horizon est bouché. Même ses amis le lâchent. Son bilan est catastrophique : 1,3 million de chômeurs de plus, 41 milliards d’euros [de crédit impôt-compétitivité distribué aux entreprises – ndlr] de gaspillés. 41 milliards, c’était des centaines de milliers de fonctionnaires, des infirmières dans les hôpitaux, des éducateurs pour lutter contre les décrocheurs à l’école, des enquêteurs contre le terrorisme au lieu de balancer des bombes en Syrie. Ça, c’est la gauche ! Sous la gauche au pouvoir, il y a toujours quelque chose qui a été gagné : les 40 heures, les 39 heures, les 35 heures, le remboursement de l’avortement, les congés payés. C’est la première fois en cent ans que la gauche au pouvoir fait reculer la gauche. Hollande est une tragédie dans l’histoire de la gauche, comme les Valls et les Macron qui vont avec lui. Il y a beaucoup de raisons d’être pessimiste pour l’an prochain, les nuages sont si sombres. Mais je suis persuadé qu’aujourd’hui, un Sanders ou un Corbyn pourrait gagner en France. Ce dont ce pays a besoin, ce n’est pas d’autorité mais de démocratie et de redistribution des richesses ! Ce n’est pas avec une République identitaire qu’on va résoudre le chômage. Que Hollande ou Valls soient candidats, j’aurai une très grande joie à débattre contre eux…

 

Depuis la victoire de François Fillon et sa ligne libérale-conservatrice dure à la primaire de la droite, les appels à une grande primaire de la gauche de Mélenchon à Macron ressortent.

Ça a été mon cheval de bataille pendant des mois. C’était la meilleure façon de résoudre nos problèmes, de battre Hollande et Valls, d’avoir un candidat unique, de sauver la gauche. On était sûr de gagner ! Si tout le monde était dans cette primaire, cinq millions de personnes venaient voter, et je vous jure que Hollande et Valls étaient battus…

 

Il est trop tard désormais ? 

Il faut dire à tout le monde de venir voter les 22 et 29 janvier. J’exclus Macron, car il n’est pas de gauche. J’ai lancé des appels à Marie-Noëlle Lienemann, à Benoît Hamon, à Arnaud Montebourg. Nous devons montrer que nous additionnerons nos voix, que la gauche socialiste battra la droite socialiste dans les primaires. Alors avec 1,5 million d’électeurs, et peut-être plus, il y aura un choc, la gauche liquidera le quinquennat, on donnera un nouveau visage à la gauche, on revigorera le parti, on aura un candidat charismatique, on aura une chance de gagner. Je suis plus que jamais optimiste.

 

Êtes-vous surpris par la victoire de François Fillon ?

Je pensais que Sarkozy gagnerait. Fillon, c’est la vraie droite catholique conservatrice, il ne répond pas à la société française, celle qui descend à 4 millions dans la rue en disant « je suis Charlie », celle qui manifeste contre la loi El Khomri. La société française est plus libertaire, plus athée que cette vieille tradition catho de paroisse. Les gens vont avoir le temps de le découvrir. À mon sens, sa victoire est un argument supplémentaire pour dire que la gauche peut gagner. Face à une droite bien à droite, il faut une gauche bien à gauche.

10 septembre 2016. Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche et Arnaud Montebourg, à l'université des frondeurs du PS de La Rochelle. © DR
10 septembre 2016. Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche et Arnaud Montebourg, à l'université des frondeurs du PS de La Rochelle. © DR

 

Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, vous… Comment expliquer que vous soyez quatre candidats à contester la ligne Hollande-Valls ? Vu l’enjeu, vu le contexte qui rend à peu près tout possible en 2017, même une victoire de Marine Le Pen, ne pourriez-vous pas vous unir dès maintenant ?

Je suis pour un bloc avec mes amis Montebourg, Hamon, Lienemann. Je le propose depuis cet été. Il faut un accord entre nous. J’ai dit allons ensemble à la manifestation du 15 septembre contre la loi El Khomri, j’attends encore… J’ai proposé d’appuyer l’appel des 100 qui propose cinquante mesures rose-rouge-verte et pourrait servir d’accord à nous quatre, puis de ciment avec le reste de la gauche. Marie-Noëlle Lienemann a signé, Guillaume Balas [eurodéputé proche de Benoît Hamon – ndlr] est venu mais j’entends encore Arnaud. J’ai proposé un texte commun contre le budget, une conférence de presse contre Macron-Valls-Hollande, j’attends encore, je ne désespère pas !

 

Et si vous n’arrivez pas à vous entendre d'ici au dépôt des candidatures le 15 décembre ?

Être quatre, ça n’est pas un problème tant qu’il n’y a pas de menace pour le second tour. À cette heure, il n’y a pas d’urgence. Au second tour, celui qui sera en tête battra Valls ou Hollande.

 

Qu’est-ce qui vous rend si optimiste ?

Regardez l’élection américaine. Trump n’a été élu qu’avec 26 % des inscrits et Sanders aurait pu gagner si la primaire démocrate avait été honnête. Aux États-Unis comme chez nous, le salariat se bat, il progresse. La vague porteuse, même dans le capitalisme, ce sont les CDI, pas la flexibilité. La force montante, et l’exigence, c’est un salariat bien formé, bien payé. Quand il y a une force du salariat de ce type, les possédants, les riches, la finance, ces monstres inhumains pompent, pompent, pompent. Les possédants sentent les inquiétudes et font feu de tout bois : c’est là qu’arrivent les méchants, les Trump, les Orban, les Le Pen… et les Macron.

 

Vous parlez d’un Bernie Sanders ou d’un Jeremy Corbyn français. Mais il n’y en a pas dans le paysage !

Bah si : il y a moi ! Sanders a 74 ans, j’en ai 70, j’ai tout l’avenir devant moi (rires). Corbyn était marginal dans son parti, comme moi. Donc c’est tout à fait possible. Pourquoi suis-je le meilleur ? Pas parce que je suis mégalo, mais parce que j’exprime le salariat.

 

Et les autres, Arnaud Montebourg, Marie-Noëlle Lienemann, Benoît Hamon ?

Arnaud a un côté brillant, fantasque, improvisateur et incertain. Il y a beaucoup de dossiers qu’il ne connaît pas et je ne pense pas qu’il tiendrait la route face à Valls sur tous les sujets. Moi je tiendrai, je peux enfoncer mon adversaire. Il dit qu’il faut produire les richesses avant de les distribuer, je veux justement faire l’inverse. La baisse du coût du travail, c’est une fumisterie, il faut augmenter les salaires et baisser les dividendes qui n'ont jamais été aussi élevés. Benoît Hamon, je l’aime bien mais je n’arrive pas à comprendre ce qu’il défend. C’est le moins lumineux du point de vue de la ligne. Je suis pour les 32 heures par la loi, par entreprise : si ce n’est pas la République qui le fait, c’est “Mad Max” ! Il est pour un revenu universel, je ne suis pas pour ça, je suis pour un salaire pour tout le monde. Ça me fait un autre désaccord...

 

*Suite de l'article sur mediapart

 

 

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

 

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