À la SNCF, entreprise publique, la précarité gagne les salariés. Comme ailleurs, les CDD à répétition deviennent un mode de gestion du personnel, quitte pour la direction à payer des indemnités prud’homales plutôt que d’embaucher.
L’action tient de la bravade. Farid (nom d’emprunt), soutenu par une grappe de militants FO et CGT, s’est présenté au travail comme d’habitude le 31 juillet dernier, au pôle opérationnel Paris-Nord-Picardie de la SNCF. Le service, qui jouxte la gare du Nord, gère les arrivées et les départs de trains, ainsi que la régularité du trafic. Mais l’entrée de la petite troupe dans le bâtiment est stoppée illico. Le badge du jeune homme a été désactivé depuis la veille au soir et Farid est refoulé dès le rez-de-chaussée.
L’ex-employé garde un sourire quasi permanent accroché au visage, enchaîne les « merci, merci beaucoup » et les poignées de main aux syndicalistes qui l’accompagnent. Son amertume est pourtant réelle. Farid a enchaîné sept CDD à la SNCF depuis janvier 2015. Il faisait, selon ses collègues, très bien l’affaire, à tel point qu’il était programmé au « planning » pour tout l’été. La direction de la SNCF commet cependant une erreur, qui grippe la machine. Au mois de juillet, un huitième CDD parvient à Farid, mais avec du retard. Cela fait une quinzaine de jours que l’employé travaille sans contrat, ce qui le requalifie automatiquement en CDI, selon une jurisprudence ancienne de la Cour de cassation.
« Faut croire que je suis un optimiste naïf car, quand j’ai appris qu’il y avait un problème avec mon contrat, je n’étais pas du tout dans une logique d’affrontement, raconte Farid. Les syndicats eux-mêmes espéraient que l’on trouverait une solution à l’amiable, comme cela avait pu arriver dans le passé. » Ils y croient d’autant plus que des documents et des mails circulant en interne font état, à plusieurs reprises, du salarié comme d’un excellent élément. Une prime, non obligatoire et attribuée aux résultats, lui a même été offerte les mois passés.
« J’ai attendu un peu que mon chef rentre de vacances, j’étais prêt à accepter un poste en 3×8, à aller travailler en Picardie si besoin, l’essentiel étant de continuer à faire un métier qui me plaisait », poursuit Farid. Mais la réponse de la SNCF à cette erreur manifeste est un énième contrat antidaté, un neuvième CDD pour le mois d’août, ainsi que cette phrase, en forme de fin de non-recevoir : « Ils m’ont dit que je n’avais qu’à attaquer aux prud’hommes, pour toucher des indemnités supplémentaires. » Interrogée sur ce cas précis, la direction de la SNCF n’a pas répondu à nos questions....
*Suite de l'article sur
Source : https://www.mediapart.fr