Samedi 30 Juillet 2016 à 12:00
Esther, 85 ans, a reçu la lettre couperet courant juin. "Vos droits changent à compter du 1er juillet", lui indique la Caisse d’allocations familiales (CAF). L’aide au logement de quelques centaines d’euros dont elle bénéficiait jusqu’ici est purement et simplement supprimée. Esther vit à Nice et, pour la CAF, son loyer est jugé trop élevé. Esther habite le même logement depuis trente ans. Elle vient de perdre son mari. Sa retraite, désormais de 800 euros, ne suffit plus à payer son loyer de 940 euros, mais ses enfants ont choisi de l’aider plutôt que lui imposer un déménagement. "Qui accepterait de me louer un appartement, à mon âge ?", s’interroge-t-elle. Pour la vieille dame, la sanction est rude : sans APL (aide personnalisée au logement), ses revenus mensuels chutent d’un mois sur l’autre de près de 300 euros, sans recours possible !
Les villes chères sont les plus concernées
Esther n’est pas la seule dans ce cas. Depuis le 1er juillet – les locataires ne s’en rendront compte qu’en août, les aides au logement étant perçues avec un mois de retard –, près de 80 000 foyers vont subir une baisse, voire la suppression, de leur APL si leur loyer est manifestement trop élevé par rapport à la taille du ménage. Un rabotage qui concerne surtout les personnes vivant dans des villes chères comme Paris, Nice, Lyon… "Plus précisément 1,2% des allocataires percevant les aides au logement. Pour 98,8% des allocataires, il ne se passera rien !" , se défend-on au ministère du Logement. Il n’empêche : pour près de 80% des foyers concernés, l’aide diminuera de 70€ en moyenne. Pour les 20% restants, elle va disparaître.
La mesure ne vise pas les ménages aisésL’affaire a été rondement menée : la CAF de Nice a informé ses allocataires le 28 mai dernier. A Paris, la communication a été plus succincte : pas de courrier, juste un coup de fil ou un SMS… Et pour cause, le décret d’application de la réforme n’a été publié que le 6 juillet ! "Les gens ont été prévenus", assure la CAF de Paris, qui redoute l’afflux de mécontents… La mesure d’aujourd’hui ne vise pas les ménages aisés. "On fait porter sur les familles la responsabilité de payer des loyers élevés, parce qu’ils habitent dans des zones tendues, en leur supprimant leurs aides", explique-t-on à la Confédération nationale du logement.
Les APL représentent près de 18 milliards d’euros, distribués à 6,5 millions de bénéficiaires. En les limitant, le gouvernement cherche à briser la hausse des loyers, qui serait encouragée par ces aides qui ne cessent d’augmenter (+ 2% par an environ depuis cinq ans). Ce que contestent les associations de locataires, favorables à l’encadrement des loyers. Paradoxe : des dizaines de milliers de locataires risquent de se retrouver dès le mois prochain dans l’incapacité de faire face à leurs prochaines échéances, alors que l’Etat n’a jamais consacré autant d’argent à l’aide au logement…
Source : http://www.marianne.net
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