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11 juin 2016 6 11 /06 /juin /2016 14:58

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

 

18 mois de prison requis contre les lanceurs d'alerte «LuxLeaks»
10 mai 2016 | Par Dan Israel
 
 

Lors de la septième journée d'audience, le procureur luxembourgeois a demandé au tribunal de condamner Antoine Deltour et Raphaël Halet, tout en se disant « pas opposé » à des peines avec sursis. Contre le journaliste Edouard Perrin, il a demandé une simple amende. Cela ne l'a pas empêché de critiquer durement ceux qui sont à l'origine de la révélation du scandale.

 

En apparence, le procès LuxLeaks n’aura pas fait bouger les lignes. Mardi 10 mai, au septième et avant-dernier jour des audiences où comparaissent les anciens employés de PriceWaterhouseCoopers (PwC) Antoine Deltour et Raphaël Halet aux côtés du journaliste Edouard Perrin, le procureur David Lentz a prononcé un réquisitoire implacable envers les « soi-disant lanceurs d'alerte » et le journaliste qui serait « allé trop loin ». Auparavant, ce mardi et le mercredi précédent, les avocats des prévenus s’étaient démenés pour démontrer que les actions de leurs clients, qui ont copié, transmis et diffusé des centaines d’accords fiscaux secrets entre le Luxembourg et des multinationales, n’ont répondu qu’à un souci d’intérêt général. Les avocats ont par conséquent tous demandé la relaxe de leurs clients.

La situation semble donc être restée figée à ce qu’elle était avant l’ouverture du procès. Et pourtant, le procureur paraît être moins sûr de son fait que ses mots ne l'ont laissé entendre. Aussitôt après avoir demandé 18 mois de prison pour Antoine Deltour et Raphaël Halet, il a précisé qu’il ne serait « pas opposé » à ce que ces peines soient intégralement assorties d'un sursis. On est donc loin des 10 ans de prison et du million d’euros qu’ils encouraient au maximum, pour « vol domestique », « divulgation de secrets d’affaires » et « violation du secret professionnel ». Et après avoir durement critiqué Edouard Perrin, jugeant que « la liberté d'expression journalistique ne prévaut pas sur la violation du secret professionnel » (comme l’ont rapporté les journalistes sur place, lire notre boîte noire), le procureur n’a demandé qu’une amende à son encontre, laissant le montant à l’appréciation du tribunal. Il a même conclu en félicitant Edouard Perrin « pour son travail et son opiniâtreté », et a reconnu que le scandale LuxLeaks avait contribué à mettre au jour des « pratiques fiscales douteuses ».

 

Antoine Deltour et son avocat William Bourdon, au tribunal de Luxembourg le 26 avril. © Reuters - Vincent Kessler Antoine Deltour et son avocat William Bourdon, au tribunal de Luxembourg le 26 avril. © Reuters - Vincent Kessler

 

Pour autant, le procureur n’a pas rechigné à endosser son « rôle », celui de « protéger la société contre les abus ». « Si une infraction a été commise, il ne peut y avoir que condamnation », a-t-il déclaré, en s’appuyant sur le fait que les trois mis en cause reconnaissent la matérialité des faits qui leur sont reprochés. Le représentant du parquet luxembourgeois est allé plus loin. « La justice, ça se rend. Ça ne se vole pas », a-t-il fait valoir, extrêmement soucieux de casser l’image de justicier au service de l’intérêt général à laquelle Deltour et Halet ont été associés tout au long des audiences. Pour lui, aucun doute, le premier avait même « une volonté de nuire » à son employeur, en violant le secret des affaires.

David Lentz a expliqué que l’impunité ne pouvait être accordée aux deux hommes, car même si une loi locale existe depuis février 2011, elle ne protège que ceux qui dénoncent des agissements contraires à la loi, alors que les accords fiscaux dévoilés par le scandale LuxLeaks étaient légaux. « Pas question d'ouvrir les portes aux délateurs de tout poil », a-t-il prévenu. Quant au chef d’accusation de vol, il l’a maintenu, bien que les avocats des accusés aient plaidé que les biens immatériels n’étaient pas concernés par la loi luxembourgeoise qui définit ce délit. De fait, dans la jurisprudence du pays, une seule décision de la Cour de cassation englobe les « meubles immatériels », et elle a été contredite depuis.

Revenant sur le rôle d’Edouard Perrin, le procureur a ensuite maintenu que le journaliste avait téléguidé Raphaël Halet. Pour ce faire, il est resté arc-bouté sur les déclarations de l’ex-employé de PwC devant les policiers et la juge d’instruction, mais n’a apparemment pas tenu compte de sa déposition au procès, où il avait fermement démenti cette version. Rappelons aussi que Perrin a bénéficié d’un non-lieu pour les accusations de complicité de vol, rendu le 25 novembre dernier par la chambre du conseil du tribunal, qui décide des poursuites ou non après la conclusion de l’enquête d’un juge d’instruction. Qu’importe, le magistrat l’a jugé coupable de complicité de viol du secret professionnel et du secret des affaires. « Il y a des limites à la liberté d'expression », a-t-il assuré, faute de quoi on sombrerait « dans l'anarchie ».


« Le secret des affaires, ce n’est pas le secret de magouilles » 

Le réquisitoire du procureur a dû satisfaire PwC. Lors de l’audience précédente, mercredi 4 mai, son avocat avait demandé à la justice de ne pas céder à la « stratégie de défense très efficace à l'égard de la presse », consistant à présenter Deltour et Halet comme des lanceurs d’alerte. Pour PwC, « au regard des faits », ni Deltour ni Halet n'avaient l'« animus du lanceur d'alerte », et ce statut dont ils se revendiquent serait une « invention ex post facto, concoctée pour les  besoins de la défense ». Concernant Antoine Deltour, l’avocat de PwC avait particulièrement insisté sur son non-respect du secret professionnel, pourtant détaillé dans son contrat de travail. « M. Deltour n'est pas un lanceur d'alerte chimiquement pur. Il n'est pas un lanceur d'alerte du tout », avait-il lancé, assurant que, en copiant des documents de formation en plus des « rulings », son « but premier » avait été de « piller le “know how” [le savoir-faire – ndlr] de PwC ».

Le cabinet d’audit avait demandé une indemnisation d'un euro à l’égard de ses anciens employés, car il ne serait pas possible de mesurer l’impact réel de leurs actions. Pourtant, en décembre 2014, l’entreprise avait fait signer un accord de confidentialité à Halet en lui faisant reconnaître qu’elle avait perdu au moins 10 millions d’euros du fait de la fuite des seize documents dont il était l’auteur… En ne demandant qu’un euro de dommages et intérêts, « PwC ne souhaite en aucun cas montrer qu’elle n’aurait pas subi de préjudice », assurait son avocat, martelant qu’il « s’agit d’une affaire grave ».

Ce mardi, la réplique de William Bourdon, l’avocat français d’Antoine Deltour et figure emblématique de la défense des lanceurs d’alerte, a été cinglante. « Les lanceurs d'alerte ne savent pas encore qu'ils le sont lorsqu'ils agissent », a-t-il asséné, invitant le tribunal à être « au rendez-vous de l'Histoire », s’attirant les applaudissements d’une partie de la salle, où étaient réunis les soutiens des trois accusés. Le mercredi précédent, c’est Bernard Colin, l’avocat de Raphaël Halet, qui avait enthousiasmé le public, en demandant d’« appeler un chat un chat » et en dénonçant l'« évasion fiscale », et non l'« optimisation fiscale », organisée par PwC pour les multinationales. Très en verve, il avait déclaré se trouver « face à des tordus de la finance », et clamé : « Pour moi, le secret des affaires, ce n’est pas le secret de magouilles. »

Les uns après les autres, tous les avocats présents ont plaidé pour une relaxe générale, en s’appuyant notamment sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et sur l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui définit la liberté d’expression et la liberté de la presse. Selon les règles européennes, qui s’imposent aux droits nationaux de chaque État membre,  défendre l'intérêt général peut permettre de violer la confidentialité, dans certains cas. May Nalepa, qui défend Raphaël Halet, a notamment détaillé point par point les conditions qu’il faut remplir pour se prévaloir de cette jurisprudence, et a plaidé qu’elles étaient toutes remplies. « M. Halet a défendu les intérêts de la nation européenne », a-t-elle lancé. « Que valent les petits secrets de PwC face au droit à l'info de 500 millions d'Européens ? » a surenchéri Olivier Chappuis, avocat d’Edouard Perrin. Le procureur ne les a pas suivis sur ce point. Il leur reste un dernier droit de réplique, mercredi 11 mai, pour convaincre le tribunal que ce sont eux qui ont raison.

Le jugement devrait être connu pendant la seconde quinzaine de juin.

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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