Discuté au Sénat ces jours-ci, le « projet de loi pour la reconquête de la biodiversité et des paysages » a été vidé de toutes ses avancées significatives, notamment de l’interdiction des néonicotinoïdes, mortelles pour les abeilles. Au nom de la préservation de l’activité économique et sous l’influence des lobbys.
Les oiseaux de nuit ? On n’en parle plus. La taxe sur l’huile de palme non durable ? Retirée. L’interdiction des néonicotinoïdes, pesticides mortels pour les abeilles ? Effacée. Etc. Les sénateurs écolos ne cachaient pas leur déception, mardi 10 mai au matin, devant le résultat des discussions de la commission du développement durable du Sénat sur le « projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ». Le texte est présenté en deuxième lecture à la Haute Assemblée depuis le mardi 10 mai et devrait être discuté jusqu’à ce jeudi 12.
Le parcours de cette loi a été chaotique. Promise en 2012, elle devait être adoptée en 2013. Elle aura finalement presque trois ans de retard. Après la première discussion à l’Assemblée, en mars 2015, puis au Sénat, en janvier 2016, le sénateur écolo de Loire-Atlantique Ronan Dantec restait relativement satisfait. L’esprit de la COP21 planait encore sur les débats parlementaires.
Mais, pour ce deuxième passage au Sénat, toutes les avancées ont été gommées par ses collègues. « Le texte proposé aujourd’hui en discussion n’est plus une loi de reconquête de la biodiversité, c’est un accompagnement de la perte de biodiversité ! déplore-t-il. D’ailleurs, un amendement a proposé de retirer le terme “reconquête” du titre de la loi, ce n’aurait été que le reflet de ce qu’elle contient désormais. »
« La loi est passée sous le seuil d’acceptabilité »
Article par article, le groupe des écologistes au Sénat a listé les reculs. Ceux sur les néonicotinoïdes et l’huile de palme sont les plus visibles mais loin d’être les seuls. Par exemple, l’article premier supprime la mention des paysages nocturnes. Or, « 28 % des vertébrés et 64 % des invertébrés vivent partiellement ou totalement la nuit […]. Il est indispensable de reconnaître que les paysages nocturnes sont spécifiques », précise leur argumentaire.
Autres disparitions symboliques dans l’article 2, les principes « d’absence de perte nette » et de « non régression » de la biodiversité. Autrement dit, la préservation de la biodiversité existante n’est même plus un objectif. Dans l’article 2 bis, la possibilité d’aller en justice pour défendre l’environnement est quant à elle réduite à une liste restrictive d’acteurs ; les professionnels de l’environnement ou les communautés indigènes en sont notamment exclus. Etc. « Même l’obligation de mettre des chapeaux sur les poteaux creux, où meurent coincés énormément d’oiseaux, a été enlevée ! s’indigne Ronan Dantec. Ils ont supprimé tous les cadres qui pourraient limiter les activités économiques au nom de la préservation de la biodiversité. »

- Mue imaginale d’une libellule à quatre taches.
Les associations de protection de l’environnement (France nature environnement, Ligue pour la protection des oiseaux, WWF, etc.) font le même constat, et allongent la liste. Elles signalent, dans leur communiqué commun, la « disparition de l’encadrement de la publicité dans les parcs naturels régionaux » ou encore « la suppression des zones prioritaires pour la biodiversité ». « La loi est passée sous le seuil d’acceptabilité », résument-elles....
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Source : http://reporterre.net