En 2017, comme chaque année, la majorité des Français paieront l’impôt sur les revenus 2016. En 2018, ils pourraient commencer à payer cet impôt chaque mois, prélevé directement sur leurs revenus de l’année – c’est du moins ce que souhaite le gouvernement. Quid des revenus 2017 ? Il s’agira d’une « année blanche » pour les comptes de l’Etat. Explications.
Qu’est-ce que le prélèvement de l’impôt à la source ?
Serpent de mer de la fiscalité, promesse de campagne de François Hollande en 2012, le prélèvement à la source consiste à retenir l’impôt directement sur le salaire du contribuable plutôt que de le laisser percevoir son salaire pleinement, déclarer ses revenus et payer l’impôt ensuite.
Pour le contribuable, le salaire est ainsi moins élevé chaque mois, mais il n’y a plus d’argent à sortir spécifiquement pour les impôts une à trois fois par an – ou de mensualisation sur dix mois, comme le font déjà 60 % des contribuables.
Décryptage : Ce que le prélèvement à la source changerait pour vos revenus
Pourquoi vous payerez tout de même
En réalité, il faut parler d’une année « semi-blanche ». Tous les assujettis à l’impôt sur le revenu s’acquitteront, en 2017 de leur impôt… 2016. Et l’année suivante, en 2018, si le principe du prélèvement à la source est en place, nous paierons l’impôt sur le revenu de… 2018.
Pour le contribuable, le fait de ne pas être imposé sur ses revenus 2017 ne changera donc pas grand-chose : il paiera, cette année-là, ses impôts sur ses revenus 2016. Et l’année suivante, si le prélèvement à la source démarre, il paiera également, mais pour ses revenus de l’année en cours.
Le principal syndicat des impôts, Solidaires finances publiques, met en garde contre « de nombreux effets pervers » de cette mesure. Il souligne notamment que « certains contribuables pourraient en profiter pour réaliser des plus-values qui ne seraient pas imposées alors que d’autres qui auraient bénéficié de restitution au titre de certains crédits d’impôt seraient lésés ». « Ceci ne ferait donc qu’accroître l’injustice du système fiscal entre ceux qui ont la possibilité de différer ou avancer l’imposition de leurs revenus et ceux qui ne l’ont pas », ajoute-t-il dans un dossier sur la retenue à la source, publié en juin 2015.
Le « cadeau » sera… à votre mort
Mais on aura quand même une année blanche ! La rédaction du Monde.fr, comme sans doute nombre de Français, a beaucoup débattu autour de ce projet de réforme. Il est vrai que tout n’est pas aisé à comprendre. Oui, on l’a dit, il y aura bien une « année blanche » fiscale, puisque les revenus 2017 ne seront pas imposés. Néanmoins, les salariés paieront en 2018 leurs impôts sur les revenus… 2018. Il y a cependant un « cadeau », mais il est quelque peu morbide : jusqu’ici, le fisc réclamait les impôts sur le revenu d’une personne morte dans l’année, puisqu’il s’agissait de ses revenus de l’année précédente. Avec le système de prélèvement à la source, cela disparaît. Votre famille n’aura plus à payer l’impôt pour vous après votre mort.
Combien cela coûtera-t-il à l’Etat ?
Si, pour les contribuables, l’année « blanche » ne change pas grand-chose, pour l’Etat, en revanche, il s’agira bien d’une année sans recettes fiscales issues de l’impôt sur le revenu. Mais le manque à gagner serait, lui, étalé dans le temps.
En 2014, le produit de l’impôt sur le revenu était supérieur à 75 milliards d’euros. Certes moins que la TVA, mais plus que l’impôt sur les sociétés.
Cette somme « manquera » donc – comptablement – en 2018, même si l’Etat pourra alors compter sur les rentrées fiscales de l’année en cours. Le gouvernement a indiqué qu’il ferait en sorte d’éviter l’effet d’aubaine sur les transactions et autres primes.
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