Les spéculateurs sont à l’affut de tout et ils spéculent aussi bien sur la baisse des prix comme sur la hausse selon les opportunités que donne la spéculation. Tout dépend des perspectives de profits dans une démarche où tous les spéculateurs ne peuvent être gagnants mais où les consommateurs et les producteurs sont assurés d’être perdants tour à tour, voire en même temps. Depuis cinq ans, les prix alimentaires mondiaux n’ont cessé de baisser globalement en dépit de des fluctuations. Selon la FAO, ils sont passés de l’indice 208,3 en octobre 2010 à moins de 160 en septembre 2015 avant de monter de 3,9% en octobre dernier.
Cette hausse imputable au phénomène climatique El Nino qui pousse les spéculateurs à changer leur fusil d’épaule comme les mouches changent d’âne pour mieux sucer du sang. Ces derniers mois, le prix du sucre continuait de baisser car les réserves mondiales étaient élevées. Mais à cause d’El Nino, il pleut de trop dans certaines provinces du Brésil et pas assez en Asie. Du coup la canne à sucre est difficile à récolter au Brésil tandis que ses rendements seront en baisse dans les pays asiatiques. Cela a suffit pour que le prix du sucre bondisse de plus de 17% en ce seul mois d’octobre 2015.
« Au Brésil, premier producteur mondial de sucre, les retards causés par les précipitations excessives dans les régions de production du Centre et du Sud on eu de lourdes incidences sur la récolte de canne à sucre», affirment benoitement les experts de l’ONU. Et les mêmes d’évoquer « des préoccupations de plus en plus vives suscitées par les effets négatifs que pourrait avoir le phénomène climatique sur la production de l’année prochaine notamment en Indonésie » à propos, cette fois, de l’huile de palme pour cause de sécheresse. Une sécheresse bien réelle, au point que les incendies criminels qui ont été allumés dans la forêt indonésienne pour augmenter ensuite les plantations de palmiers à huile sont devenus incontrôlables. Du coup, le prix de l’huile de palme a aussi grimpé de 6% en octobre. Mais il se dit que le blé, dont les prix sont tombés très bas, pourrait aussi valoir plus cher si El Nino réduit la production australienne, voire celle de l’Ukraine tandis que le prix du riz ne sera pas en reste si la mousson n’est pas à la hauteur des attentes dans les principaux pays producteurs.
De tout temps, les aléas climatiques ont provoqué une certaine irrégularité dans les récoltes de denrées de base que sont les céréales, les plantes sucrières et oléagineuses. Comme toutes ces denrées sont facilement stockage, ont sait qu’il suffit de constituer des stocks de sécurité pour réguler l’offre afin qu’elle réponde au mieux à la demande ; laquelle ne varie guère en volume d’une année sur l’autre. Mais dans les grands pays exportateurs on préfère désormais laisser les places financières décider du prix des denrées de base à travers les transactions spéculatives sur le marché à terme où chaque denrée est cotée au jour le jour. Ce qui influence aussi le marché physique au jour le jour.
Encore une irresponsabilité collective des décideurs politiques de nombreux pays qui seront dans moins de trois semaines à Paris pour nous dire, la main sur le cœur, qu’ils sont la pour sauver le climat et permettre aux pauvres de manger à leur faim. En occultant le fait que, quand ils spéculent à la baisse, les marchés ruinent les paysans. Quand ils spéculent à la hausse, ils affament les consommateurs aux revenus les plus faibles. Et ça touche durement des centaines de millions, voire des milliards personnes dans le monde à certaines époques comme on l’a vu lors des émeutes de la faim en 2007-2008.
Source : http://www.humanite.fr