Dans le domaine du social, une mesure du gouvernement Michel rentre en vigueur à partir du 1er septembre: les jeunes de moins de 21 ans qui n'ont pas obtenu leur diplôme de fin du secondaire ne pourront plus bénéficier des allocations des allocations d’insertion.
Une mesure dans la lignée d’une autre, effective, elle, depuis janvier dernier, et qui fait en sorte que les diplômés au-delà de 25 ans n’auront plus droit non plus à cette aide financière.
Les moins de 21 ans sans diplôme privés d'allocations d'insertion
Cette mesure est passée plutôt inaperçue, elle entrera en vigueur le 1er septembre prochain et risque de prendre de cours de très nombreux jeunes.
Le gouvernement Michel impose désormais une condition de réussite pour pouvoir bénéficier des allocations d’insertion (des allocations de chômage sur base des études). Il faut un diplôme de secondaire ou d’une formation en alternance pour y avoir droit. Les jeunes entre 18 et 21 ans qui sortent sans diplôme en seront privés dès ce 1er septembre.
Un public déjà fragilisé, et pour qui décrocher un emploi est pourtant déjà plus compliqué que d’autres demandeurs d’emploi. Supprimer ces allocations d’insertion, c’est supprimer un filet de sécurité. Angela Sciacchitano, responsable des jeunes FGTB estime que "le gouvernement fédéral met en place un dispositif qui va exclure totalement les jeunes de moins de 21 ans sans diplôme de tout dispositif d’accompagnement".
Et c’est bien ce que craignent le Forem et Actiris : "Bloqués par le fait qu’ils n’ont pas droit aux allocations d’insertion, le risque est que ces jeunes ne trouvent plus la motivation de rester auprès des services publics de l’emploi, explique Grégor Chapelle, le directeur d’Actiris, et donc qu’on les perde, qu’ils deviennent malheureusement des 'DENI', des demandeurs d’emploi non identifiés".
Même constat pour Marie-Kristine Vanbockestal, directrice du Forem : "S’ils ne sont pas accompagnés par le Forem, ils risquent de tomber dans une espère d’errance sur le marché de l’emploi, avec des comportements défaitistes, de rejet qui risquent de surgir dans le chef de certains de ces jeunes".
"C’est une mesure injuste, car elle touche les plus fragiles, mais c’est aussi une mesure totalement contre-productive", enchaine Grégor Chapelle. "L’Europe et le gouvernement bruxellois nous demandent de garantir une solution aux jeunes dans les 6 mois de leur inscription, soit un emploi, soit un stage, soit une formation. Et ici le gouvernement fédéral prend une mesure qui cible les plus fragiles d’entre eux, c'est-à-dire ceux qui n’ont pas de diplôme du secondaire, et qui les décourage à rester inscrit à Actiris, à rester dans un parcours d’accompagnement vers l’emploi".
Encourager les jeunes à décrocher un diplôme?
Le gouvernement Michel, et le ministre de l’emploi Kris Peeters avancent qu’il s’agit là d’encourager les jeunes à décrocher un diplôme, et donc d’augmenter leur chance de trouver un emploi.
La directrice du Forem nuance : "Il y a un côté un peu pervers. Si l’intention du gouvernement et du législateur est d’inciter voire de forcer les jeunes à entreprendre des études, c’est bien, puisque un des grands constats en Wallonie et à Bruxelles c’est qu’il y a toute une frange de jeunes qui arrivent sur le marché de l’emploi sans détenir les qualifications et les compétences requises". Mais Marie-Kristine Vanbockestal estime que cette mesure entre trop vite en vigueur : "Il aura fallu prendre quelques mois voire une année pour bien informer les jeunes de ce qui les attendait, mais aussi les informer de la nécessité de malgré tout s’inscrire au Forem, où on les prendra en charge, on les accompagnera vers l’insertion."
Grégor Chapelle lui, balaye l’argument du gouvernement. Pour lui c’est avant tout une mesure idéologique et budgétaire : "Il nous semble que c’est bien mal connaître les jeunes. Penser que pour une jeune de 16, 17 ou 18 ans, sa motivation pour terminer ses études secondaire c’est de penser que peut-être dans un an il pourra bénéficier de 300 à 400 euros d’allocation cohabitant, penser que c’est ça sa motivation, il me semble qu’il y a un très grand décalage entre le ministre et la réalité des jeunes."
Le gouvernement table sur une économie de 35 millions d’euros. Ce premier septembre, le couperet tombera pour plusieurs milliers de jeunes sans diplômes, 6900 en Wallonie, 1500 à Bruxelles. Dans les deux régions, les jeunes de moins de 21 ans, sans diplôme représentent en réalité 17% des jeunes qui s’inscrivent pour la première fois comme demandeurs d’emploi.
Les plus de 25 ans privés eux aussi d'allocations d'insertion
Cette mesure est effective depuis le mois de janvier dernier. Elle prive les jeunes diplômés de plus de 25 ans des d'allocations d'insertion auxquelles ils avaient droit jusqu’à 30 ans. Une mesure qui pénalise les jeunes restés "trop longtemps aux études" ou qui, dans leur parcours scolaire, ont doublé une fois. "Or on sait qu’un jeune sur deux au sortir du secondaire a doublé au moins une fois", explique Angela Sciacchitano, responsable des jeunes FGTB.
FGTB et CSC dénoncent une "injustice"
Les jeunes de la FGTB et de la CSC condamnent mercredi l'entrée en vigueur à partir du 1er septembre de l'exclusion des jeunes en abandon scolaire du droit aux allocations d'insertion. Ces mêmes allocations sont également refusées aux jeunes diplômés du supérieur de plus de 25 ans depuis le 1er janvier.
Selon les jeunes CSC, le chômage des jeunes diplômés du supérieur atteint 12,5% en moyenne, contre 30% pour les jeunes peu ou non qualifiés. "Mais celui qui pense que l'on résout l'épineux problème de l'abandon scolaire précoce en excluant les jeunes du droit à la protection sociale se trompe", déclare Ludovic Voet, responsable national des jeunes CSC.
Son organisation estime que quelque 8000 jeunes francophones feront les frais de cette mesure qui n'est qu'"un argument facile pour faire des économies sur le dos des jeunes précarisés".
De la même manière, le syndicat déplore que les diplômés au-delà de 25 ans ne pourront plus prétendre à ces prestations. Cela exclura de facto tous les titulaires d'un master ayant raté ne fût-ce qu'une seule année d'étude. Ici aussi, quelque 8000 jeunes francophones seraient concernés.
Les Jeunes FGTB fustigent "l'injustice" et "l'absurdité" de ces mesures qui concernent également les apprentis alors que les interlocuteurs sociaux avaient négocié une revalorisation de leur statut en 2014, entrée en vigueur le 1er juillet dernier.
"Le gouvernement s'obstine (...) à démanteler les droits sociaux des travailleurs et à hypothéquer l'avenir des jeunes", estiment les jeunes affiliés du syndicat socialiste.
Source : http://www.rtbf.be