« Orange participe indirectement au maintien et au renforcement des colonies israéliennes situées dans le Territoire Palestinien Occupé, pourtant considérées illégales par la communauté internationale. » Telle est la conclusion d’un rapport publié par cinq ONG [1] et deux syndicats (CGT et Sud). En cause, la « relation d’affaires » entre le groupe Orange et l’entreprise israélienne de télécommunications Partner Communications, un des principaux acteurs du marché de la téléphonie mobile en Israël et dans les territoires occupés.
Partner Communications offre ses services aux colonies illégales – allant jusqu’à y installer ses boutiques – et aux opérations de l’armée israélienne. Elle possède plusieurs centaines d’antennes de téléphonie mobile sur des terres palestiniennes confisquées – et parfois confisquées expressément pour permettre l’installation de ces antennes. Du fait des restrictions imposées aux compagnies palestiniennes, Partner et ses homologues captent une grande partie de marché de la téléphonie mobile y compris parmi les Palestiniens, privant l’Autorité palestinienne des recettes fiscales associées. Suite à la publication du rapport, Orange a précisé n’avoir « aucun lien capitalistique ou opérationnel avec Partner » [2]. Selon les termes du contrat qui la lie à l’entreprise française, Partner est néanmoins autorisée à utiliser la marque et le logo d’Orange pour ses opérations commerciales, moyennant le paiement d’une redevance dont le montant n’est pas connu.
Les auteurs du rapport ont essayé depuis des années d’interpeller la direction d’Orange et le gouvernement à ce sujet, sans résultat. Ils pointent notamment la responsabilité et les contradictions de l’État français. Avec ses homologues européens, il multiple les prises de position publiques contre les colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés. L’État français a également publié un avis aux entreprises françaises attirant leur attention sur les risques juridiques qu’elles encourent du fait de leur activité dans les territoires occupés [3]. Avis dont la publication aurait notamment entrainé le retrait de Safege, filiale de Suez environnement, d’un projet à Jérusalem Est. Pour l’instant, Orange et l’État français, son principal actionnaire, ont choisi de passer outre. Malgré les pressions exercées à l’époque, le partenariat avec Partner a été renouvelé en 2011, puis apparemment à nouveau en 2015 [4].
L’implication de plusieurs autres entreprises françaises dans les territoires occupées a déjà défrayé la chronique, notamment celle d’Alstom et de Veolia dans la construction du tramway de Jérusalem (lire notre article). Pour ces raisons, elles se sont retrouvées la cible des militants de la campagne Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS), notamment en Angleterre et aux États-Unis.
La campagne « Made in Illegality », dans laquelle s’inscrit la publication de ce rapport sur Orange, vise pour sa part à mettre en lumière le rôle de l’Union européenne et de ses entreprises dans la perpétuation du conflit israélo-palestinien, à travers les relations économiques qu’elles nouent dans les territoires occupés. Orange aurait fini par demander in extremis, un rendez-vous aux ONG et aux syndicats qui ont publié ce rapport. Leur apportera-t-elle enfin des réponses satisfaisantes ?
Olivier Petitjean
Lire le rapport Les liaisons dangereuses d’Orange et de son actionnaire l’État français dans les colonies israéliennes