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4 juin 2013 2 04 /06 /juin /2013 16:20

 

Médiapart

 

 

 

Istanbul, de notre envoyée spéciale Isabelle Mayault

« C'est la première fois que quelque chose de ce genre se passe en Turquie ! » exulte Kubra Orcan, 20 ans, étudiante en relations internationales. La surprise des manifestants d'Istanbul, massés sur la grande place Taksim, a le goût savoureux des premières fois. « Vendredi matin, quand tout le monde marchait en direction de la place, j'ai dit à l'ami qui m'accompagnait : nous sommes en train de faire quelque chose de nouveau », raconte Ozgür, militant de gauche, âgé d'une quarantaine d'années.

 

Place Taksim, lundi 3 juin. 
Place Taksim, lundi 3 juin.© IM

Sur la place Taksim, comme au théâtre, il y a le côté cour et le côté jardin. Rodés aux sit-in et aux manifestations, les représentants des partis politiques ont eu le réflexe de se poster à l'entrée du parc Gezi en bordure de la place. En évidence, sur les marches, là où leurs drapeaux seront visibles depuis chaque angle de Taksim. Sur ces marches coexiste tout l'éventail des courants nationalistes et de gauche que compte la Turquie. « À les voir ensemble, on sait qu'on est en présence d'un mouvement complètement nouveau, explique Berrin, cadre supérieure et militante, présente à Gezi depuis le premier jour de la manifestation, le 27 mai. Je n'ai jamais vu tous ces gens réunis au même endroit auparavant, que ce soit chez les kémalistes ou chez les communistes. »

Derrière ce premier ensemble, à l'intérieur du parc, des collectifs moins politisés se sont approprié un morceau de terrain. Tour à tour, ils défilent en cercle autour du square, sous les applaudissements des autres groupes. Ici, le collectif des artistes, là, les militants de Greenpeace, au fond, ceux du mouvement LGBT avec leurs drapeaux arc-en-ciel et, juste à côté, le groupe des féministes. Lundi 3 juin, ce sont les lycéens qui ont pris le dessus : leur nombre aide, leur enthousiasme aussi. Parmi eux, les supporters de football se détachent, reconnaissables à leurs écharpes colorées. Souvent, ce sont eux qui entonnent les slogans.

Mixte, et diverse, la foule l'est d'abord par son rapport inégal à la mobilisation. De fait, les militants historiques ont plus d'expérience que les manifestants non-politisés : ceux-là sont les premiers surpris de se retrouver à participer à un mouvement de contestation. « Je suis juste une personne normale », dit spontanément Yelis Keles, professeur d'anglais à l'université. « Je n'ai jamais manifesté avant et je n'appartiens à aucun parti politique, parce que j'estime qu'aucun d'entre eux ne me représente. »

Mais l'apprentissage de la protestation est rapide. Il a suffi de quelques jours pour voir les réseaux de solidarité s'étendre. Lundi soir, quand des vagues persistantes de gaz lacrymogène ont inondé Taksim depuis le stade de Besikstas, où les affrontements avec la police se sont déplacés, c'est avec calme et naturel que 90 % des présents ont sorti de leurs sacs des lunettes de piscine, des masques de plongée et divers accessoires emportés pour se protéger le visage. Le même soir, des chaînes humaines de plusieurs centaines de personnes se passaient des pierres de main en main pour renforcer les barricades érigées par les manifestants autour de Taksim pour empêcher le retour de la police.

Diverse, la foule l'est aussi dans ses attentes. Ce mouvement, commencé autour de quelques dizaines de militants pro-environnement pour protester contre une opération de réaménagement et de destruction du parc Gezi, compte une semaine plus tard des multitudes d'autres participants. Ozgur regrette qu'il n'y ait pas une plus grande coordination entre les groupes. « Le mouvement prendra une autre tournure si on arrive à comprendre pourquoi on est là, assure-t-il. Pour le moment, certains disent “Nous sommes les enfants d'Atatürk”, d'autres disent “On veut des parcs propres”. Mais moi, par exemple, je n'aime pas les kémalistes, et je n'aime pas les gens obsédés par la propreté, alors qu'est-ce qu'on fait ? »


Le matériel des manifestants pour se protéger des gaz. 
Le matériel des manifestants pour se protéger des gaz.© IM

Pour beaucoup, le parc Gezi est un symbole, pas un enjeu. « C'est parti d'un parc mais maintenant, c'est le pays entier qui est mobilisé », commente Yasar Adanali, universitaire, spécialiste des questions urbaines et auteur du blog Reclaim Istanbul. Une partie importante des manifestants insiste pourtant sur l'importance de la politique de la ville. Sous la plus grande tente, Hasan, militant communiste, dort sur place depuis cinq nuits consécutives. Malgré la foule qui grossit ce lundi soir à mesure que la nuit tombe, pour lui, l'enjeu est resté le même : défendre le parc Gezi. « Si le gouvernement nous promet de ne pas construire le centre commercial, alors je quitterai la place », dit-il.

« Je suis ici parce que je veux préserver Istanbul de la démolition », explique pour sa part Yelis Keles. « Cet environnement est celui dans lequel je veux continuer à vivre », dit-elle en désignant le parc derrière elle. « Le gouvernement doit nous consulter sur des questions aussi importantes. Pour moi, ce sont les questions urbaines qui sont en jeu ici, pas le mandat d'Erdogan.

Erdogan, arrogant, impopulaire

Pourtant, s'il fallait trouver un dénominateur commun à cette immense foule, ce serait bien l'énervement épidermique que la seule mention du nom d'Erdogan provoque. Son nom est partout, dans les tags, dans les slogans, et même sur cette carcasse de voiture brûlée à l'entrée du parc, ornée de post-it sur lesquels les passants se font un plaisir d'ajouter leur touche personnelle à l'œuvre en cours. « Recip, va-t-en ! » peut-on y lire. « Nous sommes des buveurs d'Ayran (boisson turque non-alcoolisée) », dit un autre post-it, en réponse aux propos du premier ministre qui a récemment taxé les manifestants d'alcooliques.

Tançar Uerli, 44 ans, chauffeur de camion, contemple la carcasse hérissée de petits mots bleus. Venu seul après le travail, ce lundi 3 juin, il s'emporte dès qu'il est question d'Erdogan : « C'est un dictateur, un Saddam, un Hitler ! Il ne voit la Turquie qu'à travers des œillères, dit-il en mimant le geste de ses mains. Nous sommes musulmans, mais nous sommes démocrates ! Il faut qu'il le comprenne. »


Rania et Yeliz, deux manifestantes de la place. 
Rania et Yeliz, deux manifestantes de la place.© IM

C'est aussi avec colère que Gultekin Orcan s'exprime à propos d'Erdogan. Cet économiste de 47 ans est venu manifester en compagnie de sa fille – c'est une première pour Kubra, 20 ans. « Erdogan n'est pas turc, dit-il avec intensité. Car si vous êtes turc, vous ne pouvez pas parler aux gens comme le fait Tayyip Erdogan. Contrairement à ce qu'il assure, cette mobilisation n'est pas idéologique. Vous trouvez vraiment qu'on a des têtes de vandales ? De terroristes ? Ce sont eux les terroristes, ce sont eux qui utilisent du gaz toxique contre nous. » Le nom d'Abdullah Gül, président de la République, qui a pris le parti de multiplier les déclarations conciliantes à l'égard des manifestants ces derniers jours, fait lever les yeux de Gultekin au ciel : « Gül ! Mais qu'est-ce que vous voulez qu'il fasse ! Vous croyez qu'il a un pouvoir de décision, Gül ? »

Rania, professeur d'anglais, est arrivée il y a presque un an de Damas. Son regard de Syrienne donne une autre couleur encore à la foule de Taksim. Cette semaine, Erdogan l'a gravement déçue. « Au début du mouvement Occupy Gezi Park, je n'étais pas sûre de ce que je devais en penser. Étant donné qu'Erdogan a pris ouvertement position contre Bashar al-Assad, j'étais très fan de lui jusque-là. Mais après la semaine qui vient de s'écouler, je vois les choses différemment. »

« Sans comparer la nature des conflits, qui bien sûr restent incomparables, poursuit Rania, je suis stupéfaite de constater que des techniques similaires en matière de désinformation et de propagande sont utilisées, ici, en Turquie. Avec ce qui se passe dans la rue en ce moment, ils réussissent à passer des documentaires avec des pingouins à la télé ! Ça m'a mise très en colère. » La diffusion d'un documentaire animalier sur CNN Turquie, ce week-end, au moment où CNN International était en live depuis Taksim est devenue l'exemple le plus parlant de la façon dont les médias pro-gouvernement couvrent le mouvement.

Plus laconique au sujet d'Erdogan, Ozgur développe : « Je crois que notre but devrait être le départ d'Erdogan et l'organisation d'élections anticipées. Même si quelqu'un de l'AKP passait, ce serait très différent d'Erdogan. Il y a un vrai problème dans le style de sa gouvernance. »

C'est peut-être le mot « style » qui explique finalement le mieux comment ce premier ministre, deux fois élu et largement élu, canalise après dix ans de mandat un tel sentiment de colère. Pourquoi maintenant ? « Ces derniers temps, remarque Yelis Keles, professeure d'université, Erdogan a agi de façon plus unilatérale que d'habitude, avec arrogance. En faisant cela, il a perdu des soutiens parmi sa base. Parmi mes étudiants qui viennent de familles musulmanes conservatrices, beaucoup étaient place Taksim hier. C'est ce qu'ils m'ont dit aujourd'hui en cours. »

D'autres voient derrière l'ampleur du mouvement la colère des citoyens devant la répression policière déployée cette semaine et la réaction aux déclarations d'Erdogan qui, en taxant les manifestants de vandales et de buveurs de bières avant de quitter le pays pour un voyage diplomatique de trois jours en Afrique du Nord, n'a fait que souffler sur des braises déjà chaudes. « Si Erdogan continue comme ça, alors c'est sûr, il va devoir partir », dit Rania, la Syrienne, avec la conviction de quelqu'un qui sait de quoi elle parle « C'est incroyable, on dirait qu'aucun des dirigeants de la région n'a su apprendre des erreurs des autres », conclut-elle.

 

Les groupes de gauche en bordure de la place, lundi. 
Les groupes de gauche en bordure de la place, lundi.© IM

Lundi, à la tombée de la nuit, des milliers de femmes et d'hommes ont frappé sur leurs casseroles depuis leurs fenêtres, en signe de soutien aux manifestants. Pourquoi maintenant ? Beaucoup ne savent pas. Mais tous sont d'accord pour dire qu'ils participent à la création de quelque chose de nouveau. Almuila, 30 ans, le dit avec un grand sourire calme : « J'ai l'impression de vivre un nouveau commencement. »


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3 juin 2013 1 03 /06 /juin /2013 16:24

 

Marianne.net

 Rédigé par Martine GOZLAN le Dimanche 2 Juin 2013 à 14:35

 

 

 

Nous avons rencontré l'écrivain turc Nedim Gürsel qui analyse les raisons de la révolte de la jeunesse à Istanbul mais aussi, selon ses informations, "dans une cinquantaine de villes". Le romancier, lauréat du prix Méditerranée 2013 avec "l'Ange rouge" (Seuil), voit dans le mouvement " un grand tournant pour Erdogan et l'AKP".

Nedim Gursel
Nedim Gursel
Nedim Gürsel est l'un des plus grands romanciers turcs. En France où il vit tout en retournant souvent dans  son pays natal, il vient de se voir décerné le prix Méditerranée pour "L'Ange rouge" où il retrace le destin du poète communiste Nazim Hikmet. Fils d'Istanbul, Nedim Gürsel suit heure par heure les manifestations. Interview.

          - Que se passe-t-il brusquement en Turquie?

   NEDIM GÜRSEL

Tout a commencé avec un mouvement de protestation contre l'aménagement de la place Taksim, la destruction d'un parc où la municipalité veut installer un complexe commercial. Mais, très vite, ce mouvement a pris beaucoup d'ampleur. 80% des manifestants sont des jeunes, notamment des lycéens, d'ailleurs appuyés par le reste de la population. C'est une réaction qui va beaucoup plus loin que la défense de l'écologie , c'est très profond. Il se déroule en ce moment des manifestations dans une cinquantaine de villes en Turquie, pas seulement les grandes villes. C'est donc un mouvement national qui s'explique par la dérive autoritaire d'un pouvoir qui veut imposer le mode de vie islamiste. Dernier exemple en date: la limitation de la vente des boissons alcoolisées. Le Premier ministre Erdogan a osé dire: " Allez boire chez vous!" Mais moi, je veux aller siroter mon raki sur le bord du Bosphore!   Et le pouvoir veut me renvoyer chez moi pour que je boive en cachette comme si c'était honteux dans l'espace public!
C'est insupportable mais tout aussi insupportable est le problème des médias turcs, des chaines de télévision où les journalistes font l'éloge du Premier ministre du matin au soir, comme si le contrôle des medias avait éradiqué toute velléité d'esprit critique.
                    
                             - C'est une fronde générale?

NEDIM GÜRSEL

Erdogan répète sans cesse qu'il veut une jeunesse conservatrice, respectueuse des valeurs conservatrices. C'est  ce processus qui déclenche la réaction de toute la population. J'y vois un grand tournant, le début du déclin d'Erdogan dont l'omniprésence et l'omniscience sont devenues insupportables. Aujourd'hui encore, il n'entend rien, il veut continuer sur le projet de destruction du parc Gezi. Il se contente de dire que la police a exagéré en utilisant les gaz. Mais les images et les témoignages sont là: c'était affreux. La police a agi avec une extrême violence contre des jeunes, pacifiques, qui n'étaient pas des casseurs. J'espère que le ministre de l'Intérieur va présenter sa démission...En réalité, cette révolte, c'est une voix montée d'en bas. C'est la première fois depuis 2002 ( date de l'arrivée au pouvoir de l'AKP) qu'on assiste à un mouvement d'opposition jailli de la base.

                           - A-t-il une chance de durer?

NEDIM GÜRSEL

D'abord, il dure depuis plusieurs jours. Ensuite, il s'étend. Le pouvoir doit revenir sur ce discours arrogant - je répète le mot arrogant à dessein parce que c'est une des clés de la colère- qui consiste à imposer un mode de vie  à toute la population.
Et cela se traduit aussi par ce projet de centre commercial à la place du parc Gezi. Istanbul n'est pas Dubaï! Aussi paradoxal que cela paraisse, ce gouvernement qui se dit irréprochable lance des projets uniquement pour la rente. Erdogan pratique un ultra-capitalisme accompagné  d'une mégalomanie qui ne tolère aucune critique. C'est tout cela qui me donnerait envie à moi aussi d'aller manifester si je me trouvais à Istanbul. Même mes amis, des intellectuels libéraux, en ont assez. Assez de ce discours de conquête. Et je constate qu'en Europe, il commence à se produire une prise de conscience: Erdogan a beaucoup perdu de sa crédibilité...

( interview réalisée à Paris le 2 juin)

* Parmi les très nombreuses oeuvres de Nedim Gürsel, citons:
- "La Première femme" ( Points-Seuil); "Les filles d'Allah"( Seuil 2009); " La Turquie, une idée neuve en Europe"( Seuil 2009); " L'Ange rouge"( Seuil 2012, prix Méditerranée 2013)
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3 juin 2013 1 03 /06 /juin /2013 16:11

 

Médiapart

 

 

 

C'est l'un des plus importants mouvements de protestation depuis l'arrivée au pouvoir du premier ministre Erdogan en 2003. Il a pris vendredi une tournure violente quand la police a décidé de réprimer les manifestants à grands renforts de gaz lacrymogènes et de canons à eau. Plusieurs centaines de personnes ont été blessées à Istanbul. Samedi, le mouvement, déclenché par un projet d’aménagement et qui s’est transformé en contestation plus large de la politique du gouvernement, se poursuivait et s’étendait à plusieurs grandes villes turques, dont la capitale Ankara.

 

Sur VG TV, samedi 
Sur VG TV, samedi© DR

Comme lors des révolutions arabes ou les mouvements d’Indignés en Europe ou aux États-Unis, les activistes ont rapidement mis en place des réseaux d’entraide (voir notamment ce site pour accéder à internet depuis la place Taksim d’Istanbul, trouver les coordonnées de médecins ou les contacts d’avocats), utilisé Twitter (avec le hashtag #occupygezi) et créé une page Facebook. Ils ont aussi installé une retransmission en direct des manifestations à Istanbul (notamment ici ou ici).

Samedi après-midi, les images montraient des milliers de personnes scandant des slogans hostiles au premier ministre, alors que la police s’était retirée de la place la plus célèbre de la ville, la place Taksim, aussitôt envahie par les manifestants.

 

 

D’autres manifestations étaient prévues dans plusieurs villes turques (à Antalya, Mersin, Gaziantep ou encore Diyarbakir). Dans la capitale Ankara, des manifestants faisaient aussi face à la police, qui usait samedi après-midi de lacrymogènes et de canons à eau.

 


 

La contestation a pris une nouvelle dimension après que la police est très violemment intervenue vendredi matin à Istanbul pour déloger les centaines de personnes qui occupaient pacifiquement le parc Gezi, situé sur la place Taksim. En deux jours, plusieurs certaines de manifestants ont été blessés, dont certains étaient dans un état grave. Vendredi, une photo d'Ahmet Sik, un célèbre journaliste, la tête en sang, a fait le tour de Twitter, touché par un tir de lacrymogène, « délibéré » selon Reporters sans frontières.


Ahmet Sik 
Ahmet Sik© DR

Samedi, l’association Greenpeace a annoncé avoir transformé son bureau stambouliote en « hôpital d'urgence pour les manifestants blessés ».

 

 

Les violences policières ont provoqué un élan de solidarité en Turquie. « Au moins autant que la diversité des manifestants, c’est le nombre et les modalités des soutiens qui étonnent : tel restaurant nourrit les manifestants gratuitement ; tel hôtel les accueille ; sur l’avenue Istiklal en état de guerre, des commerçants applaudissent les manifestants ; face au brouillage des lignes de téléphone portable par les forces de sécurité sur les zones d’affrontement, les cafés et restaurants environnants fournissent leurs codes de wifi par réseaux sociaux… Des riverains affichent sur les bâtiments que les manifestants peuvent venir se réfugier chez eux. Dans plusieurs quartiers, au milieu de la nuit encore, de nombreux habitants manifestaient leur soutien en allumant et éteignant les lumières et en descendant dans les rues avec casseroles et poêles. Nombreux sont ceux qui, aux fenêtres, applaudissent ou acclament les manifestants, comme ceux qui klaxonnent pour les encourager », raconte Élise Massicard, la responsable de l'Observatoire de la vie politique turque

La répression a aussi suscité de nombreuses protestations dans le monde. Amnesty International a critiqué « le recours excessif à la force contre des manifestants pacifistes ». La violence de la répression a même conduit Washington à rappeler à l’ordre son allié turc« Nous sommes préoccupés par le nombre de gens qui ont été blessés lorsque la police a dispersé les manifestants à Istanbul », a déclaré la porte-parole du département d’État, Jennifer Psaki. La porte-parole a appelé les autorités turques à « respecter les libertés d’expression, d’association et de rassemblement telles que ces personnes, visiblement, les exerçaient ». « Ces libertés sont vitales à toute démocratie saine », a-t-elle souligné.

Les plus hautes autorités turques ont fini par réagir et, samedi en milieu de journée, la police s’est retirée de la place Taksim d’Istanbul. Samedi, le président de la République, Abdullah Gül, a lancé un appel au « bon sens » et au « calme ». « Nous avons tous besoin d'être responsables face à ces manifestations (...) qui ont atteint un niveau inquiétant », a-t-il affirmé dans un communiqué, avant d’exhorter la police à « agir avec le sens de la mesure ».

Même le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a finalement concédé que la police avait agi dans certains cas de façon extrême. « Il est vrai qu'il y a eu des erreurs, et des actions extrêmes dans la réponse de la police. Les mises en garde nécessaires ont été faites », a indiqué celui qui focalise la colère des manifestants. Mais sur le fond, il est resté totalement intraitable, continuant, comme il le fait depuis des mois, de traiter les mécontents par le mépris. « Je demande aux protestataires d'arrêter immédiatement leurs manifestations (...) pour éviter plus de dommages aux visiteurs, aux piétons et aux commerçants. La place Taksim ne peut pas être un endroit où les extrémistes font ce qu'ils veulent »,a ajouté Erdogan

 

A l'origine, un projet de réaménagement du parc Gezi

Tout a commencé en début de semaine quand les premiers bulldozers ont fait leur apparition dans le parc Gezi sur la place Taksim, que le maire de la ville, proche du premier ministre, veut complètement réaménager. Ce projet est dénoncé par de nombreux urbanistes, architectes et écologistes qui ont remporté une première victoire vendredi avec la décision d’un tribunal administratif d’Istanbul de suspendre le projet de reconstruction de la caserne. 

 

 

Depuis le début de la semaine, des milliers de Stambouliotes s’étaient donc rassemblés place Taksim pour contrer les plans de réaménagement du maire qui prévoit notamment de construire, dans le parc, d’anciennes casernes ottomanes, agrémentées d'un centre commercial.. Jeudi soir, ils étaient au moins 10 000, soutenus par des associations environnementalistes, des syndicats, de partis politiques de gauche. 

Mais vendredi à l’aube, la police est très violemment intervenue pour déloger les centaines de militants qui occupaient le parc Gezi. La répression a provoqué un vaste élan de solidarité et de nombreux habitants sont venus en renfort aux abords de la place Taksim.

 

 

Leur mouvement a très vite pris un tour politique en dénonçant le gouvernement et ses méga-projets de construction à Istanbul, comme le troisième pont sur le Bosphore, dont la première pierre a été posée mercredi, ou un aéroport géant. Les manifestants, de l’extrême gauche aux partis nationalistes kemalistes en passant par les organisations kurdes, dénoncent plus généralement l’autoritarisme du premier ministre Erdogan, au pouvoir depuis 2003 après avoir été très facilement réélu en 2007 et en 2011 avec son parti musulman-conservateur, l’AKP.

« Finalement, la mobilisation autour du parc de Gezi n’aura été qu’une étincelle, celle de trop. En fait, plus que le parc lui-même – certes l’un des seuls espaces verts de cette partie de la ville, mais qui n’était ni très fréquenté, ni très bien entretenu, ni particulièrement valorisé par qui que ce soit, bref qui avait assez peu en commun avec Central Park –, c’est l’attitude des forces de sécurité, et plus largement du pouvoir, qui a véritablement mis le feu aux poudres et suscité l’élargissement de la mobilisation »écrit de son côté Élise Massicard, la responsable de l'Observatoire de la vie politique turque

Depuis deux ans, et singulièrement ces derniers mois, les militants de gauche et des droits de l’homme dénoncent un durcissement du régime et de nombreuses arrestations d’opposants, des attaques contre la liberté de la presse et plusieurs lois qu’ils jugent liberticides et/ou conservatrices (par exemple, récemment, sur la vente d’alcool).

« En se lançant dans une politique souvent qualifiée d’aventuriste à l’égard d’Israël, puis de la Syrie, en morigénant l’agence Standard & Poors qui avait fait passer la note de la Turquie de “positive” à “stable” en mai, en laissant entendre qu’il pourrait envisager un rétablissement de la peine de mort et en affichant une morgue proche de l’inhumanité à l’encontre des grévistes de la faim kurdes à l’automne – “Certains d’entre eux ont d’ailleurs besoin d’un régime” –, (...) en cherchant à prendre le contrôle de l’université quitte à provoquer une fronde étudiante en décembre, en critiquant une série télévisée populaire, “Le Siècle magnifique”, au point d’obtenir que Turkish Airlines renonce à la projeter dans ses avions, il a nourri les accusations de dérive autoritaire et de “poutinisation” que lui prodiguait l’opposition depuis plusieurs années », estimait le chercheur Jean-François Bayart dans un billet publié en février sur son blog sur Mediapart.

 

 

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2 juin 2013 7 02 /06 /juin /2013 16:33

 

 

 

 02.06.2013 à 15h07 • Mis à jour le 02.06.2013 à 16h38

Par Guillaume Perrier à Istanbul


 

Samedi, 20 heures. L'impressionnant déploiement de forces de police anti-émeute qui avaient repris la place Taksim et le parc de Gezi aux manifestants, samedi matin, a disparu comme par enchantement. Tous les bataillons de policiers se sont retirés et ont laissé la place aux manifestants. Très vite, des dizaines de milliers de personnes, peut-être des centaines de milliers, remplissent la place, le parc, les quartiers aux alentours et l'avenue piétonne Istiklal, la grande artère commerciale du centre-ville où déambule chaque jour plus d'un million de personnes.

Les manifestants fêtent leur victoire arrachée après trois jours de bataille avec la police. Avec un mois de retard, c'est le 1er-Mai. Le gouvernement avait en effet interdit cette année tout rassemblement sur la place Taksim pour la Fête des travailleurs.

Partout l'alcool coule à flots, les bouteilles de bière s'entrechoquent et, chose inhabituelle, on consomme ouvertement dans la rue. Des vendeurs ambulants en font leur commerce et se baladent avec des seaux d'eau glacée remplis de bouteilles. La diabolisation, la stigmatisation répétée des buveurs d'alcool par le premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, et les mesures de restriction de la consommation ont été l'un des nombreux éléments qui ont nourri cette révolte.
 

"M. Erdogan veut s'en prendre à notre mode de vie, il ne tolère pas les gens qui aiment l'art, qui vivent à l'occidentale. Il détruit les immeubles historiques, les cinémas et les théâtres pour les remplacer par d'horribles centres commerciaux construits par ses amis", tempête Erkan, un père de famille de 55 ans, venu avec sa femme et ses deux enfants adolescents. Plus loin, une jeune femme avec un groupe d'amis donne un avis similaire. "Sa vision de la famille turque et des femmes est totalement rétrograde", dit Esra, une bière dans une main, un drapeau turc dans l'autre.

Le gouvernement s'est attiré les foudres des "laïques" pour ses attaques répétées contre le droit à l'avortement ou la limitation d'accès à la pilule du lendemain. "Faites au moins trois enfants", a coutume de répéter aux Turques M. Erdogan.

Samedi, 23 heures. La fête continue sur la place et le sol est désormais jonché de bouteilles. Au centre, le monument à l'indépendance de la Turquie est escaladé par des jeunes qui veulent se faire prendre en photo. Jour de gloire, jour historique pour tous ces manifestants qui tiennent leur revanche. La statue d'Atatürk est affublée de toutes sortes d'emblèmes politiques, de drapeaux d'associations LGBT, des couleurs kurdes ou de partis de gauche.

Une danse traditionnelle alévie est improvisée : y entrent des Kurdes qui scandent "vive le président Apo [Öcalan, leader du PKK]" mais aussi des kémalistes avec leur drapeau turc. Joyeuse cacophonie. "Ce qui nous réunit ici, c'est que beaucoup d'entre nous sommes alévis", hurle Metin, originaire de Malatya. Les alévis, une branche éloignée du chiisme, sont environ 15 millions en Turquie et cultivent un mode de vie libéral. "Le gouvernement est un parti sunnite religieux qui ne nous aime pas. Nous ne voulons pas de leurs cours de religion et nous ne voulons pas prier dans leurs mosquées. Nous voulons notre culture", s'énerve Metin.

Dimanche, 1 heure. Aux quatre coins de la place et du parc Gezi, des militants équipés de sacs poubelle commencent à nettoyer. Contrairement aux affirmations du premier ministre et de ses supporters, peu de casse et de vandalisme ont été constatés. Sur Istiklal, le fameux pâtissier qui appartient à la mairie a été entièrement dévasté. Quelques vitrines cassées et voitures abîmées, mais de manière très marginale. Les banques, peu protégées, n'ont pas été endommagées. Des personnes s'interposent pour calmer les plus énervés. Des véhicules de police, quelques bus municipaux et les camions satellite de chaînes de télévision jugées "vendues à Erdogan" ont en revanche été détruits et traînés jusqu'aux barricades.

Les barricades justement, sont en train de se constituer. La place commence doucement à se vider. Rentrent chez eux les manifestants les moins politisés, la petite-bourgeoisie laïque et kémaliste des quartiers du centre-ville. Restent les militants les plus motivés, les mieux organisés. Les groupes de la gauche radicale montent des campements pour tenir la place toute la nuit et s'affairent sur les barricades : bus, voitures, barrières de police, matériel de chantier... Tout autour de la place, des obstacles bloquent les voies d'accès.

Cem, un militant du Halk Cephesi (Front du peuple), obscur groupuscule d'extrême gauche issu d'une scission du Parti communiste, montre ses blessures de guerre. Une grenade de gaz lacrymogène l'a touché à l'épaule. Un autre tir tendu de la police lui a éclaté l'arcade sourcilière. "Cela fait trois jours que j'y suis avec les camarades. Nous resterons jusqu'au bout. Jusqu'à ce qu'il démissionne", assure ce jeune ouvrier d'une trentaine d'années, originaire du Dersim, une région de l'Est, foyer traditionnel de la gauche alévie.

Dimanche, 2 heures. Un nuage de gaz continue de flotter sur le parc de Gezi, désormais aux trois quarts vide. Les yeux piquent et la peau brûle. La plupart des manifestants n'ont qu'un simple masque de chirurgien ou un foulard, bien dérisoire. Toutes sortes de rumeurs circulent parmi les occupants de la place. A Besiktas, à deux kilomètres de là, de violents heurts opposent anarchistes, autonomes et policiers qui repoussent les tentatives d'approche des bureaux du premier ministre. Le gaz lacrymo remonte jusqu'à Taksim.

Au nord de la place, à Harbiye, tout est calme. Des voitures défilent en klaxonnant, drapeau turc à la fenêtre. Aux fenêtres de la "orduevi", la résidence pour officiers de l'armée, on observe de loin cette insurrection anti-Erdogan. Dans la journée, une rumeur sur les réseaux sociaux avait fait état de distribution d'eau et de masques aux manifestants par des militaires. L'armée était un ancien bastion kémaliste et laïque, avant qu'elle ne soit décimée par les arrestations et les procès lancés par la justice. Elle a été responsable de quatre coups d'Etat depuis 1960 mais n'est plus vraiment en position de le faire aujourd'hui.

Dimanche, 4 heures. La place est désormais quasiment vide, quelques grappes de jusqu'au-boutistes subsistent ça et là. Des véhicules de chantier ont été enflammés et l'incendie s'est propagé jusqu'à une citerne de gaz qui a fini par exploser et toucher les arbres du parc de Gezi. Le feu sera maîtrisé. L'attente, elle, sera encore longue. Dimanche en début d'après-midi, la place se remplira à nouveau d'une nouvelle foule de protestataires. En attendant, adossée avec son compagnon à la vitrine d'une banque, une jeune femme à la voix de chanteuse d'opéra se lance dans un numéro de soliste. Et se taille un joli succès.

Guillaume Perrier à Istanbul

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1 juin 2013 6 01 /06 /juin /2013 16:17

 

Le Monde.fr avec AFP

 01.06.2013 à 06h25 • Mis à jour le 01.06.2013 à 18h00

 
 

 

Les forces de l'ordre, qui ont violemment réprimé les manifestants la veille faisant, selon des médecins sur place, plusieurs centaines de blessés, se sont retirées de la place en milieu d'après-midi.

 

Alors que les manifestants étaient revenus, samedi 1er juin, sur la place Taksim dans le centre d'Istanbul, pour protester contre un projet d'urbanisation qui cristallise les rancunes, le gouvernement du premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, a refusé la moindre concession, affirmant que ces rassemblements étaient avant tout "idéologiques".

Les forces de l'ordre, qui ont violemment réprimé les manifestants la veille faisant, selon des médecins sur place, plusieurs centaines de blessés, se sont retirées de la place en milieu d'après-midi. Immédiatement, des dizaines de milliers de personnes brandissant des drapeaux turcs ont envahi les lieux dans une immense clameur de victoire, comme l'a constaté notre correspondant sur place.

 

Guillaume Perrier @Aufildubosphore

Les manifestants célèbrent la prise de #Taksim. La police s'est totalement retirée. A cours de gaz disent les manifestants.

 

 

Si M. Erdogan a reconnu "qu'il y a eu des erreurs, et des actions extrêmes dans la réponse de la police", il a maintenu que "la place Taksim ne peut pas être un endroit où les extrémistes font ce qu'ils veulent". Il a également assuré que le gouvernement poursuivrait le projet qui a jeté le feu aux poudres, et qui détruirait le parc Gezi, où se sont rassemblés de nombreux manifestants. 


"NOUS AVONS TOUS BESOIN D'ÊTRE RESPONSABLES"

Face à l'ampleur des protestations, plusieurs hauts responsables turcs ont tenu une ligne moins dure que celle du premier ministre. Le président Abdullah Gül a été forcé de constater que l'heure était grave : "Nous avons tous besoin d'être responsables face à ces manifestations qui ont atteint un niveau inquiétant. Dans une démocratie, les réactions doivent être exprimées avec bon sens, avec calme".

Le vice-premier ministre, Bülent Arinç, est allé jusqu'à présenter ses "excuses". "Plutôt que de lancer du gaz sur des gens qui disent 'nous ne voulons pas de centre commercial ici', les autorités auraient dû les convaincre et leur dire que leurs inquiétudes étaient partagées".

Ce mouvement de protestation, l'un des plus importants dirigés contre le pouvoir islamo-conservateur depuis son entrée en fonction en 2002, est parti d'une manifestation contre un projet d'aménagement urbain contesté à Istanbul. Associations environnementalistes, riverains et syndicats dénonçaient la destruction du parc arboré, promis aux bulldozers. A la place, la municipalité a prévu de reconstruire d'anciennes casernes ottomanes agrémentées d'un centre commercial.

Lire l'éditorial M. Erdogan ou l'ivresse du pouvoir

Une opération opaque, menée sans concertation, qui rentre dans le cadre de plusieurs projets urbains pharaoniques lancés ces derniers mois par le gouvernement : aéroport géant, canal de contournement du Bosphore, troisième pont sur le détroit, villes nouvelles et reconstruction de la place Taksim.

 

PLUSIEURS CENTAINES DE BLESSÉS

Les affrontements ont débuté vendredi à l'aube avec l'intervention musclée de la police pour déloger quelques centaines de militants qui occupaient le parc Gezi. Une source médicale citée par l'agence Reuters parle d'un millier de blessés dans les heurts, tandis qu'au moins six personnes ont perdu un oeil après avoir été touchées par des grenades lacrymogènes, selon l'association des médecins turcs.

Ameutés par les réseaux sociaux, de nombreux militants associatifs sont venus en renfort, rejoints au fil de la journée par beaucoup d'autres manifestants venus dénoncer plus globalement la politique du gouvernement islamo-conservateur.

Lire aussi Comment suivre les manifestations en Turquie en ligne

 

Guillaume Perrier @Aufildubosphore

Ce qui est notable dans ce soulèvement est qu'il assemble des sensibilités hétéroclites. Le trait d'union: l'autoritarisme d'#Erdogan

 

 

Les autorités n'ont donné aucun chiffre précis. Vendredi en fin de journée, le gouverneur de la ville, Huseyin Avni Mutlu, s'est contenté d'indiquer que douze personnes étaient toujours hospitalisées en fin de journée, dont une femme victime d'une fracture du crâne, et qu'au moins soixante-trois personnes avaient été interpellées. Des ONG évoquent plusieurs centaines de blessés, dont certains dans des états graves.

 

Guillaume Perrier @Aufildubosphore

Cette personne est ce soir en soins intensifs après avoir été frappée à la tête par une grenade. pic.twitter.com/tcAw7f1Hs7

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29 décembre 2011 4 29 /12 /décembre /2011 17:09
29/12/2011 à 17h41
Marie Kostrz  Journaliste Rue89


 

En décidant de bombarder le 29 décembre une zone kurde proche de la frontière irakienne, l'armée turque a confondu les 35 villageois tués dans l'opération avec des combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Les civils subissent la dégradation des relations entre l'organisation armée et la Turquie, il y a plus d'un an.

Des corps alignés et recouverts de couverture avec, autour, des habitants en pleurs : les images diffusées par les télévisions locales montrent la stupéfaction des villageois découvrant la mort de leurs proches.

 

 

Les victimes étaient originaires de la province turque de Sirnak, dans le sud-est du pays. Selon RFI, les personnes prises pour cibles seraient des trafiquants d'essence, des chemins de contrebandes étant souvent empruntés entre la Turquie et l »Irak.

Selon Reuters, la Turquie a reconnu avoir lancé l'attaque après que des drônes ont repéré un groupe d'une cinquantaine de personnes suspectés d'être du PKK :

« Elle a précisé qu'il n'y avait pas de civils dans les parages au moment de l'attaque. »

Il s'agit de l'accident le plus grave impliquant des civils dans le conflit qui oppose la turquie au mouvement séparatiste armé kurde depuis 1984.

« Le PKK a été déçu par les négociations »

Les combats entre le PKK et la Turquie se sont intensifiés depuis l'été 2010. Dernière attaque massive en date : le 18 octobre, 24 soldats turcs avaient trouvé la mort dans des attaques du PKK. Jean Marcou, chercheur, alimente régulièrement la rubrique question kurde de l'Observatoire de la vie politique turque (Ovipot). Il explique que le mouvement kurde est devenu plus agressif :

« Avant le référendum sur la constitution en 2010, il y avait des négociations entre les deux parties. Il semblerait que le PKK ait été déçu des engagements pris par la Turquie sur la question kurde et décidé de rompre la trêve qui avait été établie. »

Les bombardements turcs, qui ont pour but d'atteindre les combattants, actifs le long de la frontière turco-irakienne, se sont aussi intensifiés.

L'intervention turque, menée sur son propre sol ou en Irak, touche en premier les civils qui ne participent pas au conflit. Ils sont particulièrement nombreux en Irak. En septembre, Human Rights Watch écrivait :

« Les attaques turques et iraniennes au Kurdistan irakien ont fait au moins dix victimes civiles et déplacé des centaines d'entre eux entre le milieu de juillet 2011.

Certaines attaques ont été menées sans que des mesures suffisantes soient prises pour s'assurer d'un impact minimal sur la population. »

Des centaines de villageois déplacés

La Turquie n'est pas la seule à prendre en étau les civils avec les mouvements kurdes armés. Depuis juillet, l'Iran a lui aussi intensifié ses bombardements à la frontière irakienne pour combattre le PJAK, l'équivalent iranien du PKK créé en 2004.

Des centaines de familles ont dû être déplacées. Selon Human Rights Watch, les soldats iraniens qui ont pénétré sur le sol irakien ont détruit leurs maisons et tué leur bétail.

Le Haut commissariat des Nations unis pour les réfugiés (UNHCR) explique que le but est d'attaquer les villages pour faire pression sur le PJAK pour qu'il cesse ses attaques en Iran. Une stratégie qui n'est cependant pas nouvelle : les attaques ont commencé en avril 2010.

En août de la même année, Rana Ksaifi, employée du UNHCR à Erbil, capitale de la province autonome du Kurdistan irakien, avait recensé 620 familles irakiennes déplacées à cause des bombardements turcs et iraniens.

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27 octobre 2011 4 27 /10 /octobre /2011 11:18

Le Nouvel Observateur - Publié le 27-10-11 à 13:40    

 

ERCIS (AP) — Le bilan du séisme qui a frappé dimanche l'est de la Turquie s'est alourdi pour atteindre jeudi 534 morts, selon les autorités turques.

Au moins 2.300 personnes ont été blessées et 185 ont été sauvées des décombres du tremblement de terre de magnitude 7,2 qui a frappé la région de Van, non loin de la frontière iranienne, a précisé le centre de crise et de gestion de l'urgence du Premier ministre.

Jeudi, les milliers de sans-abris devaient lutter contre la pluie et la neige, alors que l'aide internationale, notamment israélienne, commençait à arriver sur place, et une dizaine de chaînes de télévision ont organisé un téléthon, qui a rapporté 62 millions de lires turques (25 millions d'euros).

"Il fait de plus en plus froid et mes enfants toussent. Je ne sais pas combien de temps nous devrons rester ici", témoigne Sermin Yidiz, enceinte de huit mois et mère de jumeaux. Elle partage avec son mari et ses enfants une tente avec une famille de quatre personnes. Son appartement située dans un immeuble de trois étages n'a pas été endommagé mais ils craignent d'y retourner. "Nous attendons d'avoir notre propre tente".

Le Croissant rouge et d'autres organisations humanitaires islamiques ont installé des cuisines de fortune et préparé des soupes et du riz avec des haricots.

L'agence météorologie turque prévoit de nouvelles chutes de neige pour les trois jours prochains.

Un séisme de 5,4 a été enregistré dans la province voisine de Kandilli, à environ 150km au sud de l'épicentre du tremblement de terre de dimanche, provoquant la panique chez les habitants. Il n'y aurait pas eu de dégât, mais quelques blessés légers, des personnes ayant tenté de fuir par la fenêtre. AP

ljg/v335

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26 octobre 2011 3 26 /10 /octobre /2011 12:07

LEMONDE.FR avec AFP | 26.10.11 | 07h30   •  Mis à jour le 26.10.11 | 09h11

 
 

 

Des secouristes à l'œuvre à Ercis, dans l'est de la Turquie, dans la nuit de mardi 25 à mercredi 26 octobre.

Des secouristes à l'œuvre à Ercis, dans l'est de la Turquie, dans la nuit de mardi 25 à mercredi 26 octobre.REUTERS/OSMAN ORSAL

Trois jours après le séisme de magnitude 7,2 qui a frappé dimanche 23 octobre l'est de la Turquie, quelques miraculés sont toujours extraits des décombres. Soixante-six heures après que la terre a tremblé dans la province à majorité kurde de Van, une enseignante de 27 ans a été sortie vivante des ruines dans la ville d'Ercis, la plus ravagée par le séisme. Gözde Bahar, blessée, a immédiatement été hospitalisée à l'hôpital de campagne d'Ercis, ont rapporté les chaînes NTV et CNN-Türk. Un voisin de palier de cette survivante a confirmé à l'AFP que la jeune femme a bien été sauvée après d'intenses efforts des secouristes toute la nuit.

Mardi, c'est la petite Azra Karaduman, âgée d'à peine une quizaine de jours, qui a été sauvée, redonnant espoir aux secouristes dans leur course contre la montre pour retrouver des survivants. Le bébé a été transporté à l'hôpital de campagne sous les ovations de la foule. "Lorsque je l'ai attrapée, j'étais l'homme le plus heureux du monde", a raconté Kadir Direk, le sauveteur d'Azra.

 

Azra Karaduman, âgée de 15 jours, a été transportée à l'hôpital de campagne sous les ovations de la foule.

Azra Karaduman, âgée de 15 jours, a été transportée à l'hôpital de campagne sous les ovations de la foule. REUTERS/STR

 BILAN DE 459 MORTS

Deux heures plus tard, la mère du bébé, Seniha (24 ans), puis sa grand-mère Gülzade (73 ans), qui ont été retirées vivantes des décombres dont elles étaient prisonnières depuis dimanche. Les trois survivantes ont été transportées à Ankara. Le père de famille se trouvait aussi sous les décombres, mais n'aurait donné aucun signe de vie.

 

La mère de la petite Azra, Seniha, a elle aussi été retrouvée sauve deux jours après le séisme du 23 octobre dans la province de Van.

La mère de la petite Azra, Seniha, a elle aussi été retrouvée sauve deux jours après le séisme du 23 octobre dans la province de Van.REUTERS/OSMAN ORSAL

Par ailleurs, au même moment, une autre équipe de secouristes a retiré vivant d'un amas de béton dans cette même ville un homme d'une trentaine d'années. Plus tard dans la soirée, à Van, capitale régionale, un garçon de 10 ans a été retiré en vie des gravats de son immeuble, dont son père et son frère avaient été auparavant extraits.

Le bilan encore provisoire du séisme a été établi à 459 morts et plus de 1 350 blessés mardi soir par les autorités des situations d'urgence. Le précédent bilan faisait état de 432 morts.

 

 

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 13:22

Le Nouvel Observateur - Publié le 25-10-11 à 11:55    Modifié à 15:20     par Le Nouvel Observateur avec AFP    

Un bébé, sa mère et sa grand-mère ont été retrouvés sains et saufs près de 48 heures après la catastrophe. Les recherches continuent.

A Van en Turquie le 24 octobre (Ma Yan/Xinhua/Sipa) A Van en Turquie le 24 octobre (Ma Yan/Xinhua/Sipa)

Les secouristes mènent mardi 25 octobre une course contre-la-montre pour retrouver des personnes en vie dans les amas de béton, deux jours après le puissant séisme qui a frappé la province orientale turque de Van.

Le bilan du drame s'est alourdi mardi matin à 366 morts et 1.300 blessés, selon un bilan officiel encore provisoire. Le bilan précédent donné dans la nuit de lundi à mardi s'établissait à 279 victimes.

Les centaines de secouristes ont travaillé sans relâche dans un froid glacial pendant toute la nuit et près de 48 heures après le séisme, un bébé âgé d'une quinzaine de jours a été retrouvé sain et sauf. Peu après, sa mère et sa grand-mère ont également été sauvées des décombres.

Quelques heures auparavant, une femme enceinte et ses deux enfants avaient été extraits des décombres d'un bâtiment public à Ercis, ville la plus durement frappée par le drame, rapporte le journal Hürriyet.

Mais malgré ces miracles, c'est surtout des corps qui sont retirés des décombres, comme ont pu le voir les journalistes sur place après le tremblement de terre de magnitude 7,2, le plus fort de ces dernières années en Turquie.

Dizaines de disparus

Des dizaines de personnes sont toujours portées disparues.

Les victimes sont particulièrement nombreuses à Ercis et Van, la capitale régionale.

Des familles en deuil ont commencé à enterrer des proches mardi, tandis que d'autres continuaient de veiller auprès d'amas de ruines dans l'espoir que les équipes de secours retrouveront des survivants.

Pour les sauveteurs, il ne fait pas de doute que le bilan aurait été beaucoup plus lourd si le séisme n'avait pas frappé un dimanche en plein jour à une heure à laquelle beaucoup étaient sortis pour aller déjeuner.

"L'espoir est maintenant bien mince" de trouver des miraculés, souffle Emrah Erbek, un jeune homme de 23 ans, volontaire comme des dizaines d'autres.

"On a travaillé sans relâche depuis 48 heures", dit-il, les vêtements souillés de poussière et de boue.

 


Les sauveteurs à pied d'oeuvre, lundi 24 octobre. 

 

Angoisse des répliques

Des engins lourds tentent de soulever des blocs de béton alors que les rescapés qui ont passé une deuxième nuit dans l'angoisse des répliques tentaient de se réchauffer autour de feux de bois dans l'attente de distributions de rations par le Croissant-Rouge ou d'autres organisations caritatives. La neige est annoncée pour mercredi.

Certains rescapés ont dormi dans leur voiture tandis que d'autres se sont contentés d'une seule couverture pour passer la nuit dans la rue.

"Notre maison a subi de graves dégâts. Nous allons devoir vivre comme ça probablement une ou deux semaines", dit Zuleyha qui s'abrite avec son mari et leur fils de 5 ans dans leur voiture.

Aide arménienne

L'Etat turc a déployé des moyens considérables, dépêchant sur les lieux des centaines de secouristes, 145 ambulances, six bataillons de l'armée et des hélicoptères-ambulances.

Dans un élan de solidarité, de nombreux Turcs se sont mobilisés pour venir en aide à leurs concitoyens kurdes, alors que l'armée poursuit une vaste offensive contre les rebelles kurdes qui ont tué la semaine dernière 24 soldats, attisant les divisions ethniques.

"Mobilisation nationale", proclamait à la Une le quotidien Haber Türk tandis que le journal Sözcü félicitait les Turcs pour avoir "enterré dans leur coeur" le deuil des soldats tombés.

De nombreux pays, dont aussi Israël et l'Arménie, deux Etats avec lesquels les relations d'Ankara ne sont pas au beau fixe, ont offert leur assistance ou dit leur soutien à la Turquie qui les a "remercié", affirmant vouloir faire face seule à la situation actuelle.

Le Nouvel Observateur - AFP

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 11:48

LEMONDE.FR avec AFP | 25.10.11 | 11h07   •  Mis à jour le 25.10.11 | 13h12

 
 

 

Le tremblement de terre de magnitude 7,2 a également fait 1 300 blessés.

Le tremblement de terre de magnitude 7,2 a également fait 1 300 blessés.AFP/MUSTAFA OZER

Les secouristes menaient, mardi 25 octobre, une course contre la montre pour retrouver des survivants du puissant séisme qui a fait 366 morts deux jours plus tôt dans la province turque orientale de Van, mais l'espoir s'amenuise.

Le tremblement de terre de magnitude 7,2 a également fait 1 300 blessés, selon un nouveau bilan fourni mardi par la direction officielle des situations d'urgence. Le précédent bilan donné dans la nuit de lundi à mardi par cette même instance était de 279 morts.

De nombreuses personnes restent portées disparues, probablement prises au piège des 2 262 bâtiments qui se sont effondrés lors du séisme. Des centaines de secouristes ont travaillé sans relâche dans un froid glacial pendant toute la nuit. Ce sont surtout des corps qui sont retirés des décombres.

 

Ercis, dans la nuit de lundi à mardi.

Ercis, dans la nuit de lundi à mardi.REUTERS/BAZ RATNER

FROID GLACIAL

Pourtant, des miracles ont lieu. Mardi en fin de matinée, un bébé a été extrait des décombres, quarante-huit heures après la secousse, selon les télévisions locales. Un peu plus tôt, c'était une femme enceinte et ses deux enfants qui ont été retrouvés vivants à Ercis, puis un policier et sa femme, dans la même ville.

Pour les sauveteurs, il ne fait pas de doute que le bilan aurait été beaucoup plus lourd si le séisme n'avait pas frappé un dimanche en plein jour à une heure à laquelle beaucoup étaient sortis déjeuner.

Guillaume Perrier, correspondant du Monde en Turquie, rapporte sur son compte Twitter que des répliques se font sentir dans la région de Van dans la matinée de mardi.

 

DR

Le Croissant-Rouge turc a distribué autour de 13 000 tentes et il s'est préparé à fournir un abri à environ 40 000 personnes, même si l'on ignore le nombre exact d'habitants ayant tout perdu. L'organisme, critiqué pour son incapacité à venir en aide aux personnes en ayant le plus besoin, a promis que 12 000 tentes supplémentaires seraient distribuées mardi.

De la neige est annoncée pour mercredi. Certains rescapés ont dormi dans leur voiture tandis que d'autres se sont contentés d'une seule couverture pour passer la nuit dans la rue. L'Etat turc a déployé des moyens considérables, dépêchant des centaines de secouristes, 145 ambulances, six bataillons de l'armée et des hélicoptères-ambulances sur les lieux.

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